Mélanie Geelkens

La sacrée paire de Mélanie Geelkens: le port du voile, ce paradoxe féministe

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Peut-on s’insurger des autorités iraniennes qui imposent le hijab et répriment durement celles qui s’y refusent, tout en revendiquant le droit des femmes en Belgique à porter le voile ? Bienvenue dans le paradoxe du féminisme (ou, du moins, de certains de ses courants).

La «police des mœurs». Elle aurait tout aussi bien pu s’appeler la «police des femmes» vu qu’ils ne font que ça, ses agents. Contrôler qu’une mèche ne dépasse pas du hijab. S’assurer que le tissu couvre bien le cou et les épaules (1). Vérifier qu’un pantalon n’est pas trop moulant. Inspecter que les ongles ne sont pas vernis, les chevilles pas apparentes, les vêtements pas colorés. Asservir, en résumé, les Iraniennes (et les Afghanes, et les Soudanaises, et les Saoudiennes…).

Un job prenant, selon un rapport d’Amnesty International: plus de 2,9 millions de femmes en Iran auraient reçu un avertissement pour non-respect du code vestimentaire islamique, tandis que 18 081 autres auraient été déférées aux autorités judiciaires pour être poursuivies et sanctionnées. Des chiffres qui datent de 2013-2014, mais depuis l’arrivée au pouvoir de l’ultraconservateur Ebrahim Raïssi, en 2021, une baisse des statistiques serait hautement surprenante.

Car désormais, en Iran, un foulard «mal porté», ça fait crever. Des coups de bâton aux mains, aux jambes, à la tête. Masha Amini, 22 ans, n’aura pas survécu au contrôle de la police des mœurs, le 13 septembre dernier. Et s’en insurger peut se terminer par six balles dans le corps. Des billes de plomb tirées par des fusils de chasse – dont les forces de l’ordre sont friandes pour réprimer les protestations – qui ont apparemment achevé Hadis Najafi, 20 ans.

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En Iran, les femmes manifestent en otant leur voile. © Getty

La «vidéo du chignon» est devenue virale, sur Instagram. La jeune fille blonde, qui noue ses cheveux avant de manifester comme un guerrier affûterait son épée avant un combat, n’est peut-être pas Hadis Najafi (l’origine des images a été contestée), mais elle s’est transformée en symbole. «La lutte continue», «liberté pour les Iraniennes», «non à l’oppression des femmes», «nos cheveux vous disent merde»…

Le bon et le mauvais voile

Pourtant, souvent, ces mêmes comptes défendent le droit à porter le hijab. Comme s’il existait deux types de foulards: les bons, brandis dans nos contrées comme un signe de liberté de la femme, et les mauvais, imposés là-bas. Inciter d’une voix ce que l’on condamne de l’autre: drôle de paradoxe féministe (ou, du moins, de certains de ses courants). Ce serait un peu comme fustiger les pays qui interdisent l’avortement, mais applaudir les médecins qui, ici, refusent de le pratiquer sous prétexte de leurs convictions.

La liberté de choix ne peut tout justifier. Encore faudrait-il s’entendre sur la définition de ce concept: se couvrir, par exemple, pour que sa famille autorise à poursuivre des études supérieures, est-ce réellement un choix? Arborer un voile mais se priver d’avoir accès à une série de professions (bah oui, bienvenue dans cette société discriminante), est-ce véritablement une liberté?

Puis cette «liberté» de «choix» masque assez mal que, qu’importe le pays où il couvre les têtes, le foulard reste le symbole d’une primauté de la religion. Comme si Allah devait dicter la manière de vivre en société, jusqu’aux moindres recoins des garde-robes. Si le fait que le christianisme empêche encore aujourd’hui des femmes d’accéder à l’IVG est inacceptable, que la religion musulmane impose aux pratiquantes comment s’habiller, ou pas, devrait l’être tout autant. Les femmes n’ont jamais rien eu à gagner à soumettre leur vie à une foi, quelle qu’elle soit. Elles y ont, au contraire, tant perdu…

(1) En Iran, depuis le 5 juillet 2022, une loi impose que le voile couvre le cou et l’ensemble des épaules, en plus des cheveux.

Une ratée

Comment s’offrir une petite cure de (mauvaise) notoriété lorsqu’on est un média peu connu? En consacrant sa Une à la reconquête du cinéma français et en y faisant poser sept mecs blancs, de Dany Boon à Guillaume Canet en passant par Vincent Cassel, comme l’a fait le magazine Le Film français, fin septembre. Une actrice, une réalisatrice, peut-être? Bah non, on parle d’avenir, là, autant reprendre les recettes du passé.

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Mois de prison avec sursis partiel: telle est la peine la plus élevée requise par le parquet de Liège dans le cadre d’une affaire survenue entre novembre 2019 et février 2020. Trois policiers sont accusés d’avoir violé quatre femmes et de les avoir filmées à leur insu. Ils auraient (ils contestent les faits) ensuite partagé les images dans un groupe Whatsapp avec deux autres collègues. La justice liégeoise est-elle au courant que la réforme du code pénal sexuel permet de condamner des viols à des peines allant de quinze à vingt ans de réclusion? Jugement le 9 novembre…

Le porno, cette industrie violente

Fin septembre, quatre sénatrices françaises ont rendu public un rapport sur l’industrie pornographique intitulé «Porno: l’enfer du décor». Leur analyse révèle que 90% des scènes véhiculent de la violence, physique ou verbale. Une magistrate, entendue lors de l’élaboration du texte, a avancé un lien potentiel entre ces violences à l’écran et les violences conjugales. Les élues formulent plusieurs recommandations, comme interdire l’accès aux films aux mineurs, faciliter la suppression des vidéos en ligne, renforcer l’arsenal juridique pour mieux protéger les actrices…

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