En droit international, rien n’empêche la Belgique de reconnaître la Palestine. Dans un contexte où le peuple palestinien est menacé dans son existence, quel serait un moment plus opportun?
Dans une interview diffusée le 11 mai, le Premier ministre Bart de Wever affirmait que la Belgique pourrait reconnaître la Palestine, conformément à l’accord de gouvernement. Il énonçait cependant une série de conditions qui devraient être réunies auparavant: l’instauration d’une Autorité palestinienne démocratique, le démantèlement du Hamas, la libération des otages israéliens, la reconnaissance d’Israël par la Palestine et l’engagement des Etats arabes à soutenir une paix durable au Moyen-Orient. D’après le Premier ministre, cette position correspond à ce qui est prévu par le droit international.
L’accord de gouvernement est loin d’être aussi précis puisqu’il affirme seulement que «nous souhaitons que l’Union européenne joue un rôle de premier plan pour parvenir, par la voie diplomatique, à une solution à deux Etats qui garantisse à la fois la sécurité d’Israël et permette la reconnaissance de la Palestine, dans le respect de l’intégrité territoriale». Si les conditions énumérées par le Premier ministre peuvent paraître opportunes politiquement, elles ne sont nullement dictées par le droit international. Ce dernier n’impose pas de conditions à la reconnaissance d’un Etat quant à son organisation politique, économique ou social. L’Afghanistan reste reconnu comme un Etat depuis que les talibans y ont repris le pouvoir en 2021. Le Vatican aussi alors que son organisation n’a rien de démocratique. Et si les Etats sont tenus d’agir pour empêcher ou faire cesser certaines violations des droits humains se déroulant sur leur territoire, le respect de cette obligation ne conditionne pas juridiquement leur reconnaissance comme Etat. Si tel était le cas, une multitude d’entre eux se verraient privés d’une telle reconnaissance, en ce compris Israël dont les violations du droit international ont été identifiées par la Cour internationale de justice à plusieurs reprises.
La seule exigence posée par le droit international est que la reconnaissance doit entériner une prétention sérieuse à la qualité étatique correspondant à une certaine réalité. La Palestine, dont l’indépendance fut proclamée en 1988, a été admise au sein des Nations unies en tant qu’Etat observateur en 2012. La Belgique avait voté en faveur de la résolution formalisant cette admission comme elle a voté en faveur de la résolution adoptée en mai 2024 par l’Assemblée générale de l’ONU qui «constate que l’Etat de Palestine remplit les conditions requises pour devenir membre de l’Organisation des Nations unies […] et devrait donc être admis à l’Organisation». La Palestine est partie à des dizaines de traités internationaux et a reconnu la compétence de comités ou de tribunaux internationaux qui en assurent le respect.
En droit international, rien n’empêche la Belgique de reconnaître la Palestine et de rejoindre les 147 Etats, y compris au sein de l’Union européenne, qui l’ont déjà fait. Dans un contexte où le peuple palestinien est menacé dans son existence même sur son propre territoire, le moment serait opportun.