Lorsqu’il faut augmenter les dépenses de défense, se serrer la ceinture, augmenter les impôts ou avaler toute autre nouvelle un peu difficile, c’est systématiquement parce qu’on n’a pas le choix. Du moins, c’est ce bon vieil argument auquel ont toujours recours les responsables politiques.
En politique comme dans tant d’autres domaines, c’est une façon de présenter une décision comme si elle coulait de source. Les choses ne pourraient aller autrement. Il n’y a pas de débat, l’option choisie s’impose d’elle-même. Pourquoi s’y opposer? Nous n’avons pas le choix.
Il n’y a pas d’alternative. Cette formule a donné lieu à un célèbre acronyme thatchérien: «Tina», pour there is no alternative. Ces quatre lettres symbolisent depuis lors tout ce qui est détestable aux yeux de ceux à qui les mots «économie de marché», «capitalisme» et «mondialisation» donnent des boutons. Mais elle figure toujours en tête des formules auxquelles il convient d’avoir recours, qu’il s’agisse ou non d’économie. Une simple et rapide revue de presse des derniers jours permet de s’en apercevoir.
Les patrons de la presse francophone n’ont pas d’autre choix que de s’unir pour sauver leur peau. Il y a quelques jours encore, plusieurs scénarios étaient sur la table, disait-on. Tout à coup, une option s’est semble-t-il imposée comme une évidence. Il en va de la survie de tout un secteur, essentiel s’il en est.
Dans un tout autre registre, il apparaît, selon un expert en géopolitique du Moyen-Orient, que Donald Trump n’a d’une certaine façon «pas le choix» de défendre Israël, dans le contexte du conflit en cours avec l’Iran. Il joue avec le feu, peut-être, mais il n’y a visiblement pas d’alternative du point de vue du président américain.
Le ministre-président wallon l’a encore affirmé dernièrement, comme il l’a fait régulièrement au cours de l’année écoulée: certaines mesures gouvernementales provoquent du déplaisir, certes, mais eu égard à la situation budgétaire, quelle autre voie emprunter?
Chacun a ses raisons d’agir, sans réellement en avoir le choix. Ce n’est pas de l’idéologie, c’est de la lucidité, à tous les coups. Il n’y a pas d’autres choix que se serrer la ceinture, aller chercher l’argent là où il se trouve, solliciter les épaules les plus larges, ponctionner les ultrariches, descendre dans la rue, prendre des mesures drastiques pour préserver l’environnement, ou l’emploi, ou les entreprises, ou le climat, ou les gens.
Il faut impérativement arrêter de gaspiller l’argent du citoyen avant de recommencer à parler d’impôt, pestait dernièrement le président du parti libéral. La Belgique a un problème de dépenses plutôt que de recettes. Taxer davantage, dans «le pays le plus taxé du monde»? C’est un non-choix, pour lui.
Il réagissait aux propos du ministre des Affaires étrangères, l’ancien président des Engagés. Lui aussi expliquait que, puisque l’argent ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval, le champ des possibles est réduit. Face à la géopolitique mondiale, à la présence de Donald Trump à la Maison-Blanche, aux exigences de l’Otan, aux efforts consentis par les alliés, il faudra bien augmenter nos dépenses de défense. La ministre de la Défense et le Premier ministre l’ont dit, eux aussi. Et pour ce faire, pas de tabou: il faut pouvoir parler à la fois d’endettement, de réduction des dépenses et d’augmentation des recettes (donc de fiscalité). «Il n’y a pas 36 solutions», expliquait-il. C’est encore une façon d’expliquer qu’il n’y a décidément pas le choix.