Adrien Borne. © DR

Une identité à recoudre

Pendant sept semaines (du 30 juillet au 10 septembre), Le Vif/L’Express se penche sur les romans candidats au Prix Filigranes 2020 qui récompense, pour la 5e année,  » un livre de qualité accessible à tous « . Sept ouvrages francophones, dont cinq sortiront à la rentrée littéraire, sont en lice.

5/7 – Mémoire de soie Par Adrien Borne

Lorsqu’en 1936, Emile part faire son service militaire à Montélimar, sa mère Suzanne verse peu dans l’effusion – chez eux, on ne fait pas dans le sentimental et l’uniforme n’est pas vu comme glorieux. Elle se contente de lui remettre son livret de famille. Ce n’est qu’à l’issue d’une escapade avec son ami Simon, juste avant de s’enrôler, que le verdict tombe : on lui assène qu’il est né de Baptistin L. Que celui qu’il a toujours cru être son père, Auguste, ne l’est pas. Pour ce touchant premier roman, Adrien Borne s’empare des non-dits dévorants qui tissent leur toile autour des familles, étouffant dans le cocon leurs deuils, leurs attentes, et détruisant au passage toute possibilité liante et affection sincère. Il nous faudra revenir aux origines – la peur viscérale de deux petits gamins, enfermés toute une nuit dans une magnanerie poisseuse – pour comprendre ce qui se joue déjà entre les deux frères. Les retours vers 1915 puis 1918 éclairent aussi d’un jour nouveau l’âpreté de Suzanne, orpheline avec parents, pièce rapportée à peine tolérée puis veuve en colère sans héros à commémorer. Mémoire de soie, de facture classique et soignée, s’échine parfois à souligner en nuées de mots l’instant de grâce : à trop multiplier certains effets, l’impact des scènes les plus fortes en est parfois dilué.

Une identité à recoudre

La note du Vif : 6/10. JC Lattès, 252 p. Paru le 19 août.

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