Paris est à nous
As du Rolleiflex format 6 x 6, Gaston Paris est tombé dans l’oubli à l’aube des années 1950. Deux expositions parisiennes ressuscitent le talent cinématographique de cet oeil éclectique.
« On ne s’explique pas comment il a pu ne pas passer à la postérité », commente Gilles Taquet, directeur de Roger-Viollet. Il est vrai qu’avec un corpus de quinze mille négatifs déposés par sa veuve à la célèbre agence de photographie parisienne, Gaston Paris (1903 – 1964) n’a pas chômé. Sa carrière débute par une fascination pour le cinéma – il a publié de nombreux articles sur le sujet, notamment pour la revue Cinémagazine – qui imprégnera son oeuvre de lumières savamment calibrées et de cadrages frisant la perfection.
Le cursus de l’intéressé connaît son apogée dans les années 1930. L’ homme est alors sur tous les fronts, absorbant et restituant l’époque comme personne. « Ce qui est remarquable chez lui, constate Dominique Lecourt, directeur éditorial de l’agence Roger-Viollet, c’est l’ampleur des domaines qu’il réussit à couvrir. Il est aussi à l’aise avec le monde du spectacle qu’avec la modernité d’alors, qu’il s’agisse d’une vue aérienne de la Ville lumière, avec, en coin, l’hélice d’un avion, ou de contre-plongées très graphiques donnant à voir des cheminées d’usine. Il excelle également lorsqu’il s’agit de thématiques graves, comme l’exode des républicains espagnols. » Entre 1930 et 1940, le Rolleiflex de Gaston Paris se fait également social, il est au plus proche du peuple – pas étonnant lorsqu’on sait qu’il fut l’unique salarié du célèbre et très à gauche hebdomadaire français Vu – notamment quand il immortalise les enfants de la « zone ». Débute ensuite pour lui une période peu faste ; il est de moins en moins publié. Dans les années 1950, il s’essaie à la composition d’images de romans-photos, notamment de nombreuses scènes de meurtres. La tentative n’aboutira pas. Aujourd’hui, en raison des efforts conjoints de Michel Frizot, commissaire de l’exposition du Centre Pompidou, et de ceux de l’agence Roger-Viollet, qui lui consacre également un accrochage, cet « oeil fantastique » revit.
Gaston Paris, la photographie en spectacle, au Centre Pompidou, à Paris, jusqu’au 18 avril.
Gaston Paris, l’oeil fantastique, à la galerie Roger-Viollet, à Paris, jusqu’au 23 avril.
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