L’exception à la règle hennuyère

Le marché immobilier tournaisien jouit d’une aura qui dépasse la frontière et rayonne jusqu’à Lille, toute proche. Tandis qu’au sein même du Hainaut il s’apparente à un îlot protégé.

T ournai ne connaît pas la crise, assène d’emblée Mathias Morant, de l’agence 069 Immo. L’année 2011 a été extraordinaire, tandis que 2012 commence en beauté.  » Et de  » toucher du bois pour que cela ne change pas « . Car, ailleurs en pays hennuyer, le constat est tout autre. En effet, la province de Hainaut affiche, en 2011, la plus faible progression du royaume en termes d’activité immobilière (+ 0,3 % de transactions par rapport à 2010). Une baisse de régime qui semble épargner le Tournaisis, que les courtiers qualifient d' » attrayant « , et même de  » paradis immobilier « , où  » fourmillent les investisseurs « . Les prix continuent à y grimper, dépassant les 6,5 % d’augmentation pour les maisons d’habitation et frôlant les 5,5 % pour les appartements. Ce nouvel élan, hérité de 2010, est soutenu à défaut d’être spectaculaire, comme par le passé.  » Les prix avaient fortement crû depuis 2004-2005 « , se souvient Caroline Detournay (Carré Immobilier). Et ce, avec force hausses annuelles consécutives de l’ordre de 10 %.  » Puis la crise économique a remis de l’ordre dans tout cela, poursuit-elle. Je ne parlerais pas vraiment de baisse des prix, mais plutôt d’une correction de ceux-ci. « 

Adeptes du marchandage

Ce qui n’empêche pas les candidats-acquéreurs de développer des talents de… négociateurs.  » La première question qu’ils posent est bien souvent : « Est-ce que l’on peut négocier ? » avertit Caroline Detournay. C’était moins flagrant hier mais, aujourd’hui, tout tourne autour de la négociation et des contre-propositions.  » Et avant même d’entamer les palabres autour des tarifs, les acheteurs font preuve de plus de rigueur.  » Ils prennent le temps de comparer avant de se décider.  » En s’aidant notamment de tous les outils dont ils disposent : attestation de contrôle électrique, certificat de performance énergétique (PEB), mise en conformité, etc.  » Autant d’informations concrètes, qui pèsent dans la balance. « 

Ce travail de présélection n’influe pourtant pas – ou peu – sur la longueur des transactions.  » Alors que les conventions exclusives de vente en agence sont de six mois en moyenne en Belgique, ici on table sur trois mois seulement « , atteste Caroline Detournay. Une rapidité d’action qui se marque dans des gammes de prix s’échelonnant entre 100 000 et 150 000 euros.

De part et d’autre de l’E 42

La carte des coins prisés du Tournaisis varie en fonction des coûts et des humeurs de ses prétendants.  » Avant, tout le monde voulait vivre en ville, souligne Mathias Morant. Désormais, les tarifs pratiqués obligent beaucoup d’acheteurs à se tourner vers la périphérie.  » Voire plus loin, car, depuis quelques années, les abords de Tournai gagnent en popularité et… en valeur. Témoin les villages de Templeuve, Blandain, Froyennes, Marquain, Warchin,  » sans oublier Kain, le plus cher d’entre tous, qui aligne les lotissements de maisons 4 façades cossues, de 400 000 à 500 000 euros « , et se situe à proximité immédiate de l’E 42, qui relie Tournai à Bruxelles via l’E 429. Ceux qui regardent à leurs sous ont dès lors tout intérêt à traverser l’E 42 et se diriger vers Maulde et Barry, qui offrent des prix plus accessibles.

Quid des terrains à bâtir ?  » La demande est là, mais l’offre se fait rare, déplore Xavier Smette (Immo 123). Les promoteurs et les grosses sociétés de construction achètent des friches pour y construire villas et appartements, mais les particuliers ont plus de mal à trouver chaussure à leur pied.  » Du moins autour de Tournai. D’où le risque, à l’avenir, de voir monter les prix.

Cela étant, Tournai-ville reste le must en matière de prétentions citadines dans le Hainaut occidental.  » Les prix y sont 20 % plus élevés qu’à Mouscron, relève Mathias Morant. Sans parler de son architecture, aux antipodes des rangées ouvrières mouscronnoises, et largement composée de maisons 2 façades bourgeoises et semi-bourgeoises.  » Lesquelles se monnaient entre 180 000 et 200 000 euros,  » pour une semi-bourgeoise confortable, avec jardin « , contre 160 000 s’il y a des travaux à faire. La bourgeoise,  » de qualité, aux beaux volumes « , débute à 300 000 – 350 000 euros pour atteindre rapidement 500 000 à 600 000 euros.

Le segment le plus dynamique du marché immobilier tournaisien est sans conteste celui des appartements neufs, pour lequel offre et demande semblent inépuisables.  » On parle de quelque 900 appartements prévus, la plupart au sein de résidences de standing « , intervient Xavier Smette. Qui colonisent la ville, quartier par quartier.  » L’ancien hôpital Saint-Georges, quai Saint-Brice, est en train d’être rasé pour y élever 29 logements basse énergie. La première pierre n’est pas encore posée qu’ils se vendent déjà !  » Même constat le long de la chaussée de Douai,  » où on entame les fondations d’immeubles à appartements, vendus à hauteur de 30 à 40 %.  » Et Caroline Detournay d’ajouter que  » le papy-boom booste la vente d’appartements, dont les plus demandés bordent l’Escaut – en particulier, sa rive la plus ensoleillée – et offrent une vue sur les différents bâtiments historiques de Tournai « . Le tout affichant des tarifs allant de 2 000 à 2 500 euros le mètre carré.

Une large demande outre-Quiévrain

Les Français, fidèles clients des agences immobilières tournaisiennes –  » Je reçois au moins deux appels de France par jour « , glisse Caroline Detournay – continuent à faire parler d’eux.  » Et à jeter leur dévolu sur le haut de gamme « , précise-t-elle. De là à les accuser de gonfler artificiellement les prix, il y a un pas que la courtière ne franchit pas.  » Une chose est sûre : ils ne les discutent pas, contrairement aux gens du coin, indique Xavier Smette. Pour eux, ce n’est pas cher payé.  » Et d’insister sur la stabilité du marché immobilier belge.  » La fiscalité sur l’immobilier change constamment en France. Avec les élections qui approchent, le flou est encore de mise.  » Il n’en faut pas plus pour motiver les investisseurs français, qui se ruent sur les immeubles de rapport.  » Lesquels échappent, ici, à l’imposition des revenus locatifs comme revenus propres. Et promettent à leurs heureux propriétaires un rendement de 6 à 7 %, complète Xavier Smette. Tandis que leurs équivalents français peinent à rassembler 3 à 4 %.  » Sans oublier l’absence d’impôt sur la fortune, qui augmente le parti pris des frontaliers pour la Belgique.

FRÉDÉRIQUE MASQUELIER

Les courtiers qualifient le Tournaisis de  » paradis immobilier « 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire