Les nouvelles routes de la drogue

Avant d’être consommée en Belgique et ailleurs en Europe occidentale, la drogue emprunte quatre itinéraires principaux. La menace la plus inquiétante vient de l’ouest : la cocaïne colombienne arrive désormais à grands flots, franchissant l’Atlantique à bord de magnifiques voiliers ou dans les cales de cargos rouillés qui ont pour destination finale Anvers ou Zeebruges, deux des principales portes d’entrée du Vieux Continent. A l’est, les Afghans sont redevenus les rois de l’opium. L’héroïne passe les hauts cols par des moyens de fortune avant d’être chargée dans des camions bringuebalants. Elle suit alors les ancestrales routes de la soie, à travers l’Asie centrale, ou la route des Balkans, via la Turquie. Au sud, la résine de cannabis marocaine est acheminée par camion, autocar ou voiture jusqu’en Belgique, où les saisies record se multiplient. Au nord, l’ecstasy, confectionné dans des laboratoires situés surtout aux Pays-Bas et au Limbourg belge, prend la direction des pays voisins ou des discothèques d’Anvers, de Malines, de Tournai… Le Vif/L’Express a mené l’enquête au cour de ce narcotrafic planétaire. Un voyage édifiant

Ouest Cocaïne –  » Slikkers « , voiliers et cargos

L’agonie fut brève. Ana Maria, appelons-la ainsi, est morte le 5 septembre 2003 au centre médico-chirurgical de la prison de Saint-Gilles, à Bruxelles. Elle avait 35 ans. Elle était arrivée quelques jours plus tôt à l’aéroport de Zaventem, sur un vol de la compagnie portugaise TAP en provenance de Caracas. Suspectée de trafic et de consommation de drogue, la Vénézuélienne avait d’abord fait l’objet d’un test de dépistage de produits stupéfiants dans les urines, avant de passer un examen radiographique qui avait révélé la présence de corps étrangers dans son organisme. La jeune femme avait ingéré de petits sacs en plastique remplis de cocaïne. L’un d’eux s’est ouvert pendant sa détention. Le produit s’est répandu dans son estomac, provoquant l’overdose fatale…

Comme elle, des centaines de passeurs prêtent chaque année leur corps pour importer de la cocaïne en Europe. Dans le jargon des policiers de Bruxelles-National, on les appelle les  » slikkers  » (avaleurs), ou  » bolletjes slikkers « , la drogue, souvent emballée dans le latex de préservatifs, ayant la forme de boulettes. On parle aussi de  » courriers  » ou de  » mules « , termes qui désignent tout type de passeurs. Car, à côté des  » slikkers « , d’autres utilisent, plus classiquement, bagages, vêtements et autres objets.  » L’imagination des passeurs n’a pas de limites, constate Pascal Garlement, patron du Service Central Drogues à la police fédérale : on trouve de la cocaïne diluée dans du shampooing ou de l’alcool, moulée sous forme de chandelle ou de semelle, soufflée à l’intérieur de chambres à air ou encore dissimulée dans des meubles…  »

En août dernier, les douanes belges ont ainsi découvert 54 kilos de cocaïne, sous forme de pâte dure à 86 %, cachée dans la structure de fauteuils en cuir. La drogue était enduite d’une couche de cire qui la rendait indétectable par les chiens.  » Un modus operandi auquel nos services n’avaient encore jamais été confrontés « , expliquait Glenn Audenaert, directeur du service judiciaire d’arrondissement de Bruxelles. Surveillés de près par les policiers de la capitale, les fauteuils ont été délivrés normalement à leur destinatrice, à Molenbeek. Cette dame était l’un des rouages d’une organisation criminelle ayant des liens avec le Benelux et le Venezuela.

A Zaventem

La plupart des  » courriers  » arrêtés sur le territoire belge ont pour point de départ la zone caraïbe, le Brésil, le Surinam ou Caracas.  » Une augmentation des saisies à Bruxelles-National ne correspond pas forcément à un accroissement du trafic, remarque Garlement, le Monsieur Drogue de la police fédérale. Elle peut être liée à l’ouverture d’une ligne directe entre les plaques tournantes de la drogue et Zaventem. Ainsi, en 2000 et 2001, les saisies ont été plus nombreuses en raison de l’existence d’une ligne entre Bruxelles et Paramaribo, capitale du Surinam.  »

Ces dernières semaines, la police belge a intercepté des passeurs presque tous les jours. Selon Caroline Vanhyfte, analyste stratégique au Service Central Drogues, ce  » boom  » serait dû aux contrôles de plus en plus systématiques et musclés effectués à l’aéroport international de Schiphol, aux Pays-Bas :  » Cette politique plus sévère contraint les ôcourriers » à se replier sur Zaventem.  »

Dans le sens inverse, les passeurs tentent de rapporter l’argent de la vente de drogue en Amérique du Sud. Le 13 mars dernier, une Brésilienne qui avait dissimulé 470 000 euros dans le double fond de sa valise a ainsi été interceptée à Bruxelles-National. Pour les services judiciaires, nul doute que cet argent provient du trafic de stupéfiants. La femme arrivait des Pays-Bas, où elle avait pris possession du magot, et voulait se rendre à São Paulo, via Lisbonne.

L’affaire du Thebit

La voie aérienne n’est évidemment pas la seule utilisée par les trafiquants. Les quantités les plus importantes continuent à transiter par mer. En 2002, 7,4 tonnes de cocaïne étaient saisies dans l’Atlantique par les douanes européennes, qui interviennent à l’occasion dans les eaux internationales. L’année dernière, les prises atteignaient plus de 33,7 tonnes… Thebit, Goanna ou Perkeo : les voiliers de tourisme sont très prisés par les cartels. Le premier cité, un ketch de 19 mètres battant pavillon belge, appartenait à un antiquaire anversois. Repéré par avion, puis arraisonné le 14 avril 2003 au large de la Martinique, dans les Antilles, le Thebit a été entièrement démonté lors de la fouille. Equipés de matériel d’endoscopie, les douaniers français ont découvert, en deux jours, pas moins de 1 100 paquets d’un kilo de cocaïne cachés sous le plancher des cabines, derrière les réserves d’eau potable et en d’autres endroits du navire de luxe. Les trois Belges trouvés à bord tentaient la grande traversée Venezuela-Grenade-Martinique-Espagne.

En 2003, 70 % du volume des saisies réalisées par les douanes européennes ont été trouvées à bord de voiliers ou de bateaux de pêche. Les 30 % restants provenaient de conteneurs. Les chargements de ballots de drogue se font souvent au large du Venezuela, du Brésil ou de Cuba. Scénario classique : un bateau de pêche discret ou un puissant hors-bord rejoint un cargo en pleine mer. Le navire commercial reprend alors sa route vers sa destination finale, les Pays-Bas, la Belgique û Anvers et Zeebruges sont parmi les principales portes d’entrée de la drogue en Europe û ou la péninsule Ibérique. Dans la nuit du 11 au 12 février dernier, les Espagnols attrapaient ainsi un  » gros poisson « , au large du Cap-Vert : le Lugo, un bateau de pêche, transportait 5 tonnes de cocaïne. S’ils se sentent repérés, les trafiquants n’hésitent pas à jeter les caissons par-dessus bord, ce qui provoque, de temps à autre, de curieuses marées blanches sur les côtes.

Afin d’éviter ce genre de mésaventure, les trafiquants recourent parfois à des stockages discrets en Afrique de l’Ouest. Au début de février, les Italiens démantelaient, grâce à un agent infiltré, un réseau dirigé par la Mafia calabraise. La marchandise était en partie acheminée dans des blocs de marbre évidés. L’affaire, aux suites internationales, a conduit les enquêteurs jusqu’au Togo, où des Colombiens avaient acheté des cimenteries et des hangars dans le port de Lomé.

Depuis que les Etats-Unis surveillent de plus en plus étroitement l’arc caraïbe, les flux s’orientent davantage vers l’Europe. D’autant que la cocaïne, réputée stimulante et festive, a largement dépassé le cadre des soirées de VIP. En l’espace d’une dizaine d’années, l’usage de cette substance, dont le prix a été divisé par deux (1 gramme se négocierait entre 15 et 50 euros en Belgique, selon la police fédérale), s’est démocratisé et a pénétré le monde des discothèques.

 » Cette drogue a pris une partie de l’espace occupé par l’héroïne il y a encore quelques années « , note le sociologue Alain Labrousse, auteur d’un monumental Dictionnaire géopolitique des drogues (De Boeck). La grande majorité de la cocaïne inhalée, fumée, voire injectée en Europe occidentale, provient de Colombie. Le pays fournit aujourd’hui les deux tiers de la production mondiale. O.R. et E. P.

Est Héroïne De la soie à l’héro

Qui se méfierait de l’âne qui franchit tranquillement un haut col, à la frontière entre l’Afghanistan et l’Iran ? Aucun muletier à l’horizon, l’animal connaît la moindre pierre du sentier. Il chemine seul : il sait que, au prochain village, il trouvera sa ration de fourrage. Dans le bât sanglé sur ses flancs, on a glissé des ballots d’opium. Au retour, il portera l’argent de la transaction…

L’anecdote, rapportée par Michel Danet, secrétaire général de l’Organisation mondiale des douanes, servait de préambule à la conférence qui s’est tenue à Bakou, en Azerbaïdjan, à la fin du mois de janvier, sur le thème du trafic de stupéfiants empruntant la route de la soie. Elle illustre les difficultés de la surveillance des frontières quasi désertiques qui encerclent l’Afghanistan.

Aujourd’hui, sur 100 kilos d’héroïne consommés en Europe, 80 % viennent de ce pays. Les prix demeurent relativement stables (de 30 à 40 euros le gramme en Belgique), ce qui laisse à penser que des stocks importants ont été préparés en amont.

Après avoir toléré, voire encouragé la production de pavot, les talibans avaient presque réussi à l’éradiquer en 2001. Mais l’instabilité politique qui a suivi l’intervention militaire américaine, la persistance de la pauvreté chez les paysans et un climat favorable en ont relancé la culture. A tel point que les zones de production ne se limitent plus aux régions traditionnelles des provinces orientales et méridionales : elles touchent aussi le nord du pays. Des provinces sous le contrôle d’anciens chefs de guerre théoriquement soumis au pouvoir central de Kaboul.

L’Afghanistan a déjà retrouvé sa place de premier producteur mondial d’opium avec une production de 3 600 tonnes l’année dernière, contre 185 tonnes en 2000), observe l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) dans son rapport annuel publié en mars dernier. Des laboratoires de transformation du produit en héroïne se seraient implantés dans le pays, alors qu’auparavant l’opium était raffiné en aval, au cours de sa longue route vers l’ouest. Le commerce de la drogue représenterait aujourd’hui la moitié du PIB afghan, si bien que l’ONU craint l’émergence d’un  » narco-Etat « .

La  » route des Balkans  »

Pour les passeurs, l’Iran est la première étape sur la voie traditionnelle de l’exportation vers l’Europe (voir carte). Téhéran s’est d’ailleurs lancé dans une véritable guerre contre les trafiquants : selon le Dictionnaire géopolitique des drogues, les forces de sécurité iraniennes ont perdu 3 078 hommes depuis vingt ans dans des affrontements armés destinés à stopper les convois d’opiacés. Ceux-ci prennent la direction de la Turquie et arrivent en Belgique par la  » route des Balkans « .

La route nord, elle, est appelée par commodité  » route de la soie  » : elle emprunte, en effet, les itinéraires commerciaux ancestraux qui relient l’Est et l’Ouest à travers l’Asie centrale et le Caucase. Elle a pris de l’importance ces derniers mois, notamment au Tadjikistan, un pays de plus en plus exposé. Ses gardes-frontières, encadrés par les militaires russes, réalisent près de 90 % des saisies en Asie centrale. La riposte tente dès lors de s’organiser au plan international. Mais elle se heurte à un manque de moyens et parfois à une mauvaise volonté évidente de certains Etats.

Par ailleurs,  » les anciens Etats soviétiques d’Asie centrale ne sont plus seulement une zone de transit, mais aussi une région de consommation « , déplore Herbert Schaepe, secrétaire de l’OICS. Dans les années 1990, le nombre d’héroïnomanes a connu une croissance régulière au Kazakhstan, au Kirghizistan, en Ouzbékistan et au Tadjikistan. A partir de 2001, il s’est envolé. La drogue consommée dans ces pays est, pour les deux tiers, injectée et sa qualité est nettement inférieure à celle destinée à l’Ouest. Conséquence : le sida fait des ravages depuis quelques années.

Dans les pneus

La route reste le principal vecteur d’importation de l’héroïne en Europe « , note Pierre Bertrand, douanier et analyste au Bureau régional de liaison chargé du renseignement pour l’Europe de l’Ouest, basé à Cologne. Ainsi, en juin 2002, des douaniers hongrois remarquent que les roues de secours d’un camion venu de Turquie résonnent étrangement lorsqu’on les sonde à coups de marteau : les pneus ne sonnaient pas creux. Les trafiquants avaient caché 84 kilos de drogue à l’intérieur…

Le Royaume-Uni est un pays phare de la consommation d’héroïne en Europe. Mais la Belgique se distingue elle aussi.  » Quelque 75 % du marché belge de l’héroïne est aux mains d’organisations turques « , signale le rapport annuel de la police fédérale. Ces dernières, pour déjouer la répression, fractionnent en général les quantités en circulation et, de ce fait, les saisies dépassent rarement 5 kilos. E. P. et O.R.

Sud Cannabis La route du Maroc

Début décembre 2003. Le village d’Hennuyères, près de Braine-le-Comte (Hainaut), est le théâtre d’une scène inhabituelle. Informés de l’arrivée d’un chargement illicite, des policiers fédéraux surveillent trois individus occupés à entasser des centaines de paquets dans les soutes d’un autocar d’une agence de voyages bruxelloise. Les équipes d’intervention bouclent le périmètre, arrêtent les trois hommes et saisissent les paquets, qui contenaient 1 200 kilos de haschisch, pour une valeur marchande estimée à plus de 6 millions d’euros. Une prise  » record « .

Placés sous mandat d’arrêt à Mons, les trois trafiquants ont expliqué que le haschisch venait du Maroc. Transportés par camions, les colis étaient dissimulés sous de fausses dalles de marbre. La drogue devait être écoulée en partie sur le territoire belge au départ de Bruxelles, le solde étant réservé au marché néerlandais. Satisfait du travail des enquêteurs, le procureur du roi Claude Michaux n’a pas caché pour autant son inquiétude :  » Des quantités toujours plus importantes sont découvertes lors de perquisitions et de contrôles. Avant, on comptait les saisies de haschisch en kilos, celles de cocaïne en grammes et celles d’ecstasy en centaines de comprimés. Maintenant, il s’agit de tonnes de drogues douces, de kilos de drogues dures et de dizaines de milliers de pilules.  »

A la mi-mars 2004, c’est à Jemappes que les limiers de la police fédérale de Mons ont trouvé, en fouillant un camion, 900 kilos de haschisch, cette fois dissimulés dans des poteries en terre cuite.  » Notre arrondissement judiciaire devient la plaque tournante du haschisch en Europe, déplore le premier substitut Henry. La production du Maroc connaît depuis dix ans une hausse exceptionnelle…  »

Le kif du Rif

La source n’est pas près de se tarir. Un rapport de l’ONU, rendu public en décembre 2003, consacre le Maroc premier producteur mondial de résine de cannabis, avec 3 080 tonnes par an. Le pays s’est imposé comme le fournisseur quasi exclusif des consommateurs belges. Et la culture du kif ne cesse de s’étendre sur les hauteurs de Tétouan, Chefchaouen, Taounate et Al-Hoceima, dans le nord du pays. Elle assure la subsistance des deux tiers des ménages de paysans de la région, soit quelque 800 000 personnes, indique le document de l’ONU, première enquête à donner une image précise de ce secteur économique. La production de cannabis constitue 51 % du revenu total annuel par famille, soit près de 2 000 euros. Ce qui est relativement insignifiant par comparaison aux sommes énormes générées par le trafic international du haschisch marocain (dont le chiffre d’affaires s’élèverait à 10 milliards d’euros).

 » L’enquête de l’ONU, soutenue par l’administration marocaine, marque tout de même une avancée en matière de coopération internationale « , note Michel Kensier, conseiller de l’ambassade de Belgique à Rabat, chargé des contacts policiers belgo-marocains. Autre signal fort : l’arrestation, en août dernier, d’un baron de la drogue du Rif. Une affaire qui passionne le Maroc : une trentaine de juges, procureurs, officiers de l’armée, des douanes, préfets, commissaires de police et chefs de la brigade des stupéfiants, tous en poste à Tétouan, sont en effet tombés dans le sillage de Mounir Erramach, un milliardaire de 30 ans. Ce n’est pas la première fois qu’un gros bonnet de l’industrie du haschisch est capturé. Mais jamais un tel ratissage n’avait été opéré parmi de hauts fonctionnaires suspectés de complicité.

L’Espagne est le pôle de transit principal de la drogue marocaine à destination du marché de l’Europe occidentale. En 2002, plus de 800 tonnes de haschisch ont été saisies en Europe, dont 550 sur le seul territoire ibérique.

En Belgique, les saisies avaient pour cadre, depuis 1994, les opérations annuelles  » Eté  » : la police interceptait les véhicules de ressortissants marocains ou de touristes se rendant en vacances au Maroc. Mais les temps ont changé. Le trafic n’est plus familial et estival.  » Il se déroule tout au long de l’année et est le fait, en général, de bandes de passeurs d’origine marocaine installés en région bruxelloise ou anversoise « , constate le commissaire divisionnaire Pascal Garlement. Le rapport annuel de la police fédérale précise que ce trafic est en partie structuré  » par des organisateurs établis aux Pays-Bas, qui disposent de connexions marocaines, dirigent des réseaux de courriers et procurent des véhicules pourvus de caches appropriées « . O.R.

Nord Ecstasy La Colombie belge

Les enquêteurs de la police fédérale de Tongres ont observé discrètement, pendant quelque temps, les allées et venues d’un couple de Néerlandais, tous deux âgés d’une cinquantaine d’années, et d’un jeune couple germano-néerlandais. Le quatuor était soupçonné de travailler pour une bande internationale de trafiquants de stupéfiants. Le 18 mars 2004, à 5 heures du matin, des agents de la section drogue ont, simultanément, fait irruption à quatre adresses à Maasmechelen. Ils y ont découvert une véritable caverne d’Ali Baba : 400 000 pilules d’ecstasy et des produits de base pour fabriquer plus de 100 millions d’autres pilules. Une prise exceptionnelle d’une valeur de revente de 400 millions d’euros.

 » Notre arrondissement judiciaire a la fâcheuse réputation d’être la Colombie des drogues synthétiques, reconnaissait Peter De Buysscher, directeur de la police fédérale de Tongres. En 2003, pas moins de trois des sept laboratoires pour la fabrication de drogues démantelés en Belgique étaient implantés dans notre secteur.  » Peu cher et festif, l’ecstasy a trouvé son marché. Par ailleurs, la hausse des saisies est liée à l’augmentation des capacités de production aux Pays-Bas et en Belgique, les deux pays où se sont implantés la plupart des laboratoires clandestins.

 » Les ministres fédéraux de l’Intérieur de la Justice ont placé la lutte contre la production et l’exportation des drogues de synthèse en tête des priorités inscrites dans leur plan national de sécurité « , signale Pascal Garlement, chef du Service Central Drogues. On nous a demandé de détecter et de démanteler les laboratoires, situés pour la plupart au Limbourg et en Campine anversoise. Nous constatons toutefois une dispersion : on en a localisé aussi à Liège, Verviers, Louvain, Marche-en-Famenne…  »

Fin avril 2004, la police a découvert un laboratoire et 665 kilos d’ecstasy (1,66 millions de pilules) dans un hangar situé près de la gare de Knokke-Heist. Cinq Britanniques de Liverpool, un Néerlandais et deux compagnes belges de membres de la bande ont été arrêtés. C’est la plus grosse saisie jamais réalisée en Belgique.

Les exportations suivent en général la voie routière ou ferroviaire. L’ecstasy prend la direction des pays voisins et, surtout, du Royaume-Uni. Une affaire lucrative : la production d’un comprimé reviendrait à 15 centimes d’euros. Selon la justice brugeoise, responsable de l’enquête de Knokke, la valeur d’une pilule à la revente est de 1 euro en Belgique û l’ecstasy est notamment distribué dans les discothèques de la région de Malines, d’Anvers, de Courtrai ou de Tournai û, de 10 euros en Grande-Bretagne et de 25 euros aux Etats-Unis. O.R.

Olivier Rogeau et Eric Pelletier

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