Le tourbillon Bouhlal

Le président du Mrax cristallise le malaise des militants face aux défis du multiculturalisme et de la mondialisation

Radouane Bouhlal, 31 ans, donne rendez-vous au bar d’un grand hôtel de l’avenue Louise plutôt qu’entre les murs du Mouvement contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie (Mrax), qu’il préside depuis avril 2004. Contesté pour sa gestion du personnel et ses prises de position, il s’échappe d’une pirouette pour rebondir, présenter une autre facette du personnage – il en a déjà tant – désarçonner, caracoler, se multiplier, plaire, horrifier. Ni les cathos (il a fait ses études de droit à l’UCL) ni les laïques (qu’il fréquente au Mrax) n’ont été, selon lui, plus tendres que les siens, finalement, à l’égard de l’orientation gay qu’il proclame. Cette exclusion dans l’exclusion lui a fourni les armes d’une affirmation tourbillonnante. On regarde, amusé, la toupie, on oublie les zigzags. Jusqu’à présent, les vieux éléphants du troupeau antiraciste ne lui ont pas retiré sa protection. Et pourtant. Il s’est emparé du Mrax à la hussarde. Et décidé d’y assumer sa double nationalité, belge et marocaine, au risque de la confusion. Changement de génération. Concurrence des victimes ? Ni les agressions antisémites d’Anvers, en 2004, ni le harcèlement de la famille Rosenberg, à Gans-horen, ne font bouillir son sang. Il temporise, là où le Centre pour l’égalité des chances a pris, d’initiative, contact avec la famille malmenée, avec injures antisémites, par des jeunes du quartier. Comme Mouloud Aounit, son homologue français du Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), il refuse de stigmatiser une minorité arabe déjà trop montrée du doigt. Lui qui s’était engagé à combattre le racisme intercommunautaire, seule nouveauté d’un programme classique donnant sa place au droit des étrangers, à la lutte contre le racisme politique (extrême droite) et au racisme quotidien, il s’est enflammé contre l’interdiction du port de couvre-chef dans deux établissements scolaires de Charleroi. Recours au Conseil d’Etat et propos martiaux à l’égard de la ministre socialiste de l’Enseignement, Marie Arena. Une partie du Mrax s’étonne de cette position. Même l’Union des progressistes juifs de Belgique (UPJB) se fâche devant un film de commande, qui présente une vision unilatérale de la question du voile. Nouvelle surprise quand Radouane Bouhlal se fait l’ardent défenseur – après la Ligue des droits de l’homme – de la mise sur un pied d’égalité des génocides des Arméniens, des juifs et des Tutsi. Le MR soutient même l’un de ses amendements ! Pour un homme réputé proche d’Ecolo (il a travaillé au cabinet de Jean-Marc Nollet, Enseignement), c’est finement joué. Reste à savoir si sa créativité personnelle – appelons cela ainsi – lui garantira une longue carrière à la tête du Mrax.

M.-C.R.

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