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 » Le Parkinson fait de vous un soliste « 

Sept mois après son diagnostic, Stefan, un ingénieur de 44 ans, se confie sur les changements psychologiques associés à sa maladie.

 » C’est assez comparable à ce que l’on vit sur le plan physique. Si je voulais prendre ce verre, par exemple, je devrais imaginer l’action avant de pouvoir la réaliser. C’est comme s’il y avait un obstacle entre moi et mes actes, cela ne va plus tout seul, ce qui rend tout moins facile et moins rapide.  » […]  » C’est comme d’avoir la tête recouverte d’une épaisse couverture: on se sent comme émoussé, incapable d’anticiper ou de réagir rapidement.  » […]  » Je suis encore en mesure de prendre des décisions rationnelles, mais lorsqu’il est question d’émotions, de sensations, de questions majeures, j’ai du mal. C’est moins le cas dans mon travail, sauf lorsque je dois trancher tout de suite.  »

 » Prendre des initiatives est un autre point qui pose problème. On a beau planifier telle ou telle activité, en définitive, on ne la fait pas. Ce problème s’est aggravé progressivement et se remarque surtout dans un contexte privé, pas tellement au boulot. Après les travaux de transformation de notre maison, par exemple, il y avait encore une foule de choses à régler. Je les planifiais, mais sans jamais parvenir à m’y mettre. Idem pour les vacances, les weekends, les activités avec les enfants, etc.  »

 » À un moment donné, j’ai pu mieux regarder ma situation en face, notamment grâce aux médicaments. Je me suis aperçu que je paniquais lorsque je devais accomplir simultanément cinq ou six tâches ; m’en rendre compte m’a aussi permis de prendre des mesures.  » […]  » Autrefois, je rêvais de devenir directeur technique, mais j’ai revu mes ambitions à la baisse. Au fond, j’ai déjà le boulot idéal. C’est un poste exigeant, mais qui ne me force pas non plus à repousser mes limites et me laisse une marge de manoeuvre.  » […]  » En cas de problème, c’est toutefois à moi de décider ce qu’il faut faire. Réagir au quart de tour, prendre des décisions… est-ce que j’en serai encore capable dans le futur?  »

 » Mon épouse continue à chercher en moi l’homme dont elle est tombée amoureuse. Je suis devenu, disons, quelqu’un de plus réfléchi.  » […]  » Je vous disais que je dois être pleinement conscient de l’action de prendre mon verre ; de même, je dois rester attentif au fait qu’il y a en face de moi une personne qui a ses propres émotions. J’essaie activement de me mettre à sa place, de m’astreindre à demander à mon épouse comment s’est passée sa journée. Pareil avec les enfants: je planifie les contacts et l’attention. Métaphoriquement, on pourrait dire que le Parkinson a fait de moi un soliste. Là où cela dérape parfois, c’est lorsque nous sommes ensemble et que les demandes et les desiderata partent dans tous les sens. Cela, je ne peux vraiment plus le gérer.  »

Ces passages ont été tirés du témoignage de Stefan, rapporté en pp 17-23 de l’ouvrage Mijn denken stottert vaak meer dan mijn benen. Ad Nouws, Poiesz Uitgevers, 2014

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