Le leader de la LCR a été espionné

Pendant plusieurs mois, d’octobre 2007 à janvier 2008 au moins, la vie d’Olivier Besancenot a été épiée, disséquée, mise en fiches par une officine de renseignement privée. Le Vif/L’Express s’est procuré l’édifiant rapport de surveillance qu’elle a rédigé : il met en lumière des pratiques barbouzardes, aux confins des mondes politique, économique et policier.

En octobre 2007 se met discrètement en place une surveillance physique au pied de l’immeuble du XVIIIe arrondissement parisien où vivent le chef de file de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), sa compagne et leur jeune fils. Un matin, la conjointe d’Olivier Besancenot est photographiée sortant du porche, à  » 8 h 23 « ,  » en compagnie du petit garçon aperçu les jours précédents avec monsieur Olivier Besancenot « . Il s’agit, lit-on,  » d’une femme typée européenne, âgée d’une quarantaine d’années (…), les cheveux longs de couleur blonde « .

Le 5 octobre, la surveillance se resserre et, cette fois, les  » espions  » entament une vraie filature. Le rapport mentionne même l’adresse de la maternelle où l’enfant est scolarisé. Y sont indiqués son prénom, son âge et ses habitudes. La compagne d’Olivier Besancenot, baptisée  » l’objectif « , sera suivie jusqu’à la station de métro du Quartier latin où elle descend pour se rendre à son travail. Une note confidentielle de 3 pages, datée du 25 octobre 2007, résume les premières investigations sur le couple, jusqu’à l’emplacement exact de son appartement, dont la fiche cadastrale est annexée.  » Nous n’avons pu obtenir les codes d’accès  » de l’immeuble, regrettent les détectives. Ils pousseront leurs investigations jusqu’au fisc pour tenter, sans succès, de se procurer la fiche d’imposition du facteur.

Ils vont cependant dénicher des éléments encore plus précis : un document, daté du 14 janvier 2008, recense les numéros des comptes de Besancenot et de sa compagne, établis au Crédit lyonnais (LCL) et à la Banque postale. Toutes les références bancaires y figurent : les soldes sont détaillés, au centime près. Autant d’informations provenant, au moins en partie, du Ficoba, un fichier sensible recensant plus de 80 millions de titulaires de comptes en France.

De façon plus anecdotique, l’officine décrit la Peugeot 106  » avec une galerie sur le toit  » de Besancenot, ainsi que son lieu habituel de stationnement. Quant à l’historique du véhicule, il a sans doute été obtenu grâce à un fichier administratif. Bizarrement, les  » privés  » sont mis sur la piste d’une Porsche Cayenne. Après vérification, ils démentent cette rumeur.

Edifiantes, ces informations n’ont pu être collectées sans la complicité de fonctionnaires et d’employés de banque disposant d’un accès informatique à plusieurs fichiers gérés par le ministère de l’Intérieur, par la Direction des impôts ou par des établissements bancaires. Il reste à connaître les raisons de cet espionnage. Selon les informations du Vif/L’Express, l’affaire trouverait son origine dans le contentieux opposant Olivier Besancenot à la société SMP Technologies, distributeur exclusif en France du pistolet à impulsion électrique Taser auprès de la police et de la gendarmerie. Lors de la campagne pour la présidentielle de 2007, le porte-parole de la LCR, craignant une utilisation massive et dangereuse, avait estimé que cette arme était responsable de  » 150  » décès aux Etats-Unis. Les dirigeants de Taser assurent, eux, qu’elle se révèle inoffensive pour la vie humaine. Ils ont donc intenté une procédure en diffamation contre Besancenot. L’audience doit se tenir en juin. l

Eric Pelletier

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