Le grand muet

Le service de renseignement de l’armée n’a jamais aimé la publicité. Sa devise  » Je demande et je protège  » s’exerce dans la discrétion, pour prévenir les menaces militaires étrangères et garantir la sécurité des Belges expatriés

Logé au Quartier Reine Elisabeth, à Evere (Bruxelles), le Service général de renseignement et de sécurité (SGRS) de l’armée est – du moins sa branche contre-ingérence – numériquement moins important que la Sûreté de l’Etat mais, comme pour celle-ci, ses effectifs, son organigramme et son budget sont top secret. Une bonne appréciation – un mot clé dans le monde du renseignement – peut sauver des vies humaines. Dans le cas d’un service secret militaire, il s’agit prioritairement d’être à jour dans la connaissance technico-militaire du terrain et des équipements des autres parties à un conflit. Les cartes, en deux et trois dimensions, sont nourries d’informations aériennes ou par satellites, ou issues de captages à rayons infrarouges, de relevés recueillis sur place par les attachés militaires des ambassades ou par des agents du SGRS. Principales cibles : les régions où opèrent des troupes belges (Afghanistan, Kosovo…) et où résident beaucoup d’expatriés (Afrique centrale).  » Il est toujours utile de connaître la longueur d’une piste pour y faire atterrir l’appareil ad hoc « , dit-on bénignement au SGRS. Le service profite, néanmoins, de ses sorties pour prendre la  » température  » sur d’autres sujets.

Au quartier général, à Bruxelles, des bataillons d’analystes – pas nécessairement militaires – dressent en permanence des états de la situation politique dans le monde et envoient, chaque matin, leurs synthèses au centre opérationnel, au chef d’état-major et au ministre de la Défense. Le SGRS emploie des civils (inspecteurs et commissaires) et des militaires pour recueillir du renseignement en Belgique auprès de  » contacts  » (sources humaines) dans le cadre de la contre-ingérence (recherche et identification de toute menace pour la sécurité militaire par le sabotage, l’espionnage, la subversion et le terrorisme). Des protocoles de collaboration ont été signés entre le SGRS et la Sûreté de l’Etat pour échanger des informations dans ce domaine. Le service de renseignement consacre une partie de ses ressources à sécuriser tout ce qui relève du personnel et des installations militaires. Il assure également cette mission auprès des entreprises, comme la Sabca ou la FN, qui travaillent beaucoup pour l’Otan. Enfin, le SGRS organise la défense informatique contre les hackers.

Disposant d’un solide réseau d’amicales d’anciens ou d’officiers de réserve sur qui il peut compter, le SGRS se tient volontairement à l’écart de la vie publique. Seul le Comité R peut y fourrer un nez indiscret, et il ne s’en prive pas. Mais son histoire, étroitement liée à celle de la Belgique, n’est pas ennuyeuse, comme peuvent en témoigner les 17 millions de pages d’archives de l’armée sur lesquelles il veille. l

M.-C.R.

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