Le fumoir ou… la porte

L’interdiction de fumer sur tous les lieux de travail (et jusque dans les camionnettes véhiculant du personnel !) à partir du 1er janvier prochain ne semble pas donner des sueurs froides aux responsables des entreprises, quelles que soient la nature et la taille de celles-ci. Probablement parce que la mesure était annoncée de longue date ou… parce qu’elle ne changera pas grand-chose sur le terrain. Au service juridique de l’Union des classes moyennes (UCM), par exemple, on s’étonne de ne pas avoir reçu la moindre demande de conseil ou d’éclaircissement des patrons de petites ou moyennes entreprises.  » Parce que les règles de courtoisie y sont bien respectées, explique Thierry Evens, porte-parole de l’UCM, ou parce que rien ne changera dans une équipe de deux ou trois personnes où chacun fume…  »

Dans les grandes villes, le spectacle des fumeurs faisant le pied de grue, par tous les temps, au pied de leurs immeubles fait déjà partie du paysage : c’est probablement le signe que l’application de la législation y a été anticipée. C’est le cas à l’université de Liège (ULg), par exemple, qui a profité de la dernière rentrée académique pour instaurer l’interdiction générale de tabac dans tous ses bâtiments, renonçant également à la création de fumoirs. Prévue par le législateur, cette éventualité d’aménager des pièces spéciales pour les fumeurs pose problème à de nombreux employeurs. En effet, le nouvel arrêté interdit explicitement toute discrimination entre travailleurs. Comment garantir, dès lors, l’égalité de traitement entre les personnes qui, étroitement liées à leur poste de travail, n’ont accès aux fumoirs qu’à certaines heures et ceux qui disposent d’une certaine liberté de mouvement ? Beaucoup d’employeurs ont tranché la question : pas d’accès au fumoir en dehors des heures de pause. Autre obstacle : ces fumoirs doivent répondre à des spécifications techniques très précises. Des entreprises spécialisées commercialisent d’ailleurs des  » pièces fumoirs  » clés sur porte.

Chez Dexia, les 2 000 employés fumeurs du nouveau bâtiment de la place Rogier, à Bruxelles, devront se contenter, en 2006, de trois petits fumoirs exigus : le prolongement d’une politique de confinement douce, mais de plus en plus restrictive. Un accompagnement psychologique des fumeurs, probablement avec distribution de patchs, est également en cours de discussion. Au Service public fédéral (SPF) Emploi, cette aide à la désintoxication a déjà démarré. Chez Electrabel, des petits préaux sont en cours de construction sur les sites de production d’électricité. Ils compléteront les fumoirs. A la Stib, on estime que la nouvelle réglementation marquera la fin de la tolérance pratiquée jusqu’à présent dans les couloirs, les halls, les lieux de passage.

Sautant sur l’occasion de la nouvelle réglementation, des entreprises remplacent les distributeurs de sodas par de l’eau et des jus de fruits, ou proposent des menus allégés dans les cantines. A l’ULg, 30 étudiants jobistes rappellent inlassablement l’interdiction de fumer à l’intérieur des locaux, y compris – une tâche ardue… – dans les cercles étudiants. Au siège de la FEB, on distribue, depuis peu, des fruits frais au personnel et on organise des séances de détente ou de sport. Un arrêté qui fait boule de neige ? l

Ph.L.

Ph.L.

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