Annick Delfosse. © DR

Le confinement, réflexe universel

De tout temps, l’isolement des malades a été la première démarche prophylactique, avec la recherche d’un bouc émissaire.

Avant de trouver un remède (la vaccination), la première réponse des autorités face aux épidémies a toujours été le confinement.  » Lors de la grande épidémie de peste qui ravagea l’Europe au milieu du xive siècle, les maisons des pestiférés étaient marquées, voire murées, pour protéger le reste de la communauté, quand bien même la maladie était transmise par les puces des rongeurs, rappelle Annick Delfosse (ULiège), spécialiste des Temps modernes et de l’histoire du christianisme. On regroupait les malades dans certains quartiers. Le premier lazaret a été créé à Venise au début du xve siècle. Les gens ne pouvaient se déplacer qu’avec un billet de santé ou un passeport sanitaire qui permettait d’attester que l’on venait d’un lieu non infesté.  » L’Eglise insiste alors sur le devoir de charité pour aider les malades et sauver la communauté ; les messes peuvent être suspendues.  » Mais ce sont les autorités civiles, à commencer par les villes elles-mêmes, qui édictent les mesures prophylactiques.  »

Les gens ne pouvaient se déplacer qu’avec un billet de santé ou un passeport sanitaire.

Jusqu’à la fin du xviiie siècle, le savoir médical est impuissant à contrer les épidémies. Les théories  » aéristes  » de contamination de l’air font florès, d’où l’usage de feux aromatiques pour chasser les miasmes. On s’interroge sur l’équilibre entre les humeurs des humains et la conjonction des astres. Ces grands malheurs sont considérés comme une punition de Dieu, les juifs sont présentés comme les responsables des épidémies – le phénomène du bouc émissaire – et subissent des persécutions.  » Une attitude plus rationnelle se fait jour à la fin du xviiie siècle, enchaîne l’historienne liégeoise. Mais c’est l’approche microbiologique et la vaccination mises au point par Louis Pasteur et Robert Koch, au xixe siècle, qui vont permettre de maîtriser peu à peu les épidémies de fièvre typhoïde, variole, peste, maladie du charbon, rage, grippe, etc.  »

L’histoire permet-elle de confirmer qu’une reprise économique suivra mécaniquement la crise actuelle ?  » Les situations ne sont pas comparables, car, aujourd’hui, nous dépendons fortement des marchés étrangers, alors que le monde de nos ancêtres était plus circonscrit. Les épidémies se répandaient surtout via les conflits armés. A l’époque moderne (xve – xviiie siècles), les épidémies sont suivies d’une reprise économique très rapide et la fécondité devient extrêmement vigoureuse. Toutefois, elles ont plutôt tendance à creuser les inégalités sociales, car les paysans et les artisans sont attachés à la terre et à leur métier. Ils ne peuvent pas fuir comme les plus riches, ni déplacer des capitaux qu’ils n’ont pas.  »

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