L’armée du Savu

Depuis près de vingt ans, le Service d’aide vétérinaire urgente ouvre pour le bien-être des animaux. Pour mener son combat à bien, l’association dispose d’un refuge, mais aussi d’équipes sur le pied de guerre vingt-quatre heures sur vingt-quatre

Informations : www.savu.be

Un labrador couleur crème prénommé Sandy ? Oui, madame. La police l’a trouvé à Rixensart le 25, et il est arrivé chez nous le jour même. Vous pouvez venir le récupérer. Mais je vous explique le chemin, parce que c’est un peu compliqué…  » Perdu au milieu de la campagne du Brabant flamand, à Gooik, le refuge du Service d’aide vétérinaire urgente (Savu) pourrait effectivement être plus facile d’accès.  » Mais l’endroit est idéal, précise Daniel Janssens, le fondateur de l’association. Il nous fallait un endroit spacieux, où il était possible de faire de belles promenades. Et puis, il fallait aussi penser au voisinage.  » La moindre visite provoque en effet, à chaque fois, un assourdissant concert d’aboiements, les chats, moutons, chevaux, poules, furets, renards ou ratons laveurs se montrant, eux, nettement plus discrets. En tout, ce sont ainsi près de 2 000 animaux qui passent ici chaque année, et 400 bêtes qui y sont hébergées en permanence.

C’est en 1986 que le Savu voit le jour. Constatant le manque de formation des inspecteurs chargés de contrôler les animaux chez les particuliers û la plupart du temps pour des cas de maltraitance û, Daniel Janssens, alors bénévole chez Help Animals, décide de créer sa propre association.  » Avec des copains, nous nous sommes documentés, et nous avons suivi des formations à la Croix-Rouge. Quelque temps après, nous avons acheté une camionnette, que nous avons fait aménager en ambulance pour animaux.  » L’ASBL n’a, depuis lors, cessé de se développer et compte à présent une dizaine de véhicules, dont trois ambulances, une bétaillère et des véhicules tout-terrain.

Le Savu est actif vingt-quatre heures sur vingt quatre, sept jours sur sept. Sauvetages, capture d’animaux agressifs ou sauvages, enlèvement d’animaux morts, prise en charge d’animaux perdus ou maltraités : les missions sur le terrain û un peu plus de 5 500 par an û sont variées. Et, pour parer à toute éventualité, des membres du personnel ont même été spécialement formés pour les opérations difficiles.  » Nous devons par exemple régulièrement aller rechercher des animaux sur les toits, raconte Philippe Lambot, ambulancier au Savu. Le plus souvent, ce sont des chiens ou des chats, mais nous avons un jour eu un iguane. Ils passent par une fenêtre de toit, chutent un peu plus bas et restent bloqués là. Il faut alors éviter que l’animal tombe, et assurer notre propre sécurité. Mais le plus dangereux reste quand même d’aller récupérer des animaux sur l’autoroute. Là, il faut faire vraiment très attention ! Heureusement, il y a des moments plus légers, comme cette fois où l’on m’a appelé d’urgence pour un serpent caché sous un buisson. Les quatre policiers qui avaient leur arme pointée sur l’animal ont été très surpris que je le prenne sans hésitation à pleine main. Il s’agissait d’un faux…  »

La zone d’activité du Savu est vaste. Elle s’étend de Jodoigne à Ath û soit la majorité du Brabant wallon et une partie du Brabant flamand et du Hainaut û, pour un total de 62 communes. En Belgique, chaque entité communale est en réalité affiliée à l’association de son choix, comme Veeweyde, la Croix Bleue ou la SPA, à laquelle elle verse des cotisations.  » Il y a donc de la concurrence entre les associations, explique Daniel Janssens. Mais surtout, et c’est dommage, un flagrant manque de collaboration. Ce qui permettrait pourtant de faciliter le travail de tout le monde.  »

Les adoptables

Jusqu’en 1998, le Savu se limitait à ce service d’ambulances. Les animaux récupérés étaient tout simplement emmenés dans les refuges d’autres associations. Jusqu’au jour où, pour différentes raisons û notamment de surpopulation û, procéder de cette façon n’a plus été possible. Contraint de trouver une autre solution, Daniel Janssens décide alors de créer son propre refuge, dont les travaux, qui auront duré cinq ans, sont enfin en passe d’être achevés.

Le refuge est une plaque tournante. C’est là qu’arrivent les animaux recueillis. C’est là aussi qu’ils seront récupérés ou adoptés, voire dans certains cas euthanasiés, en cas d’agressivité, d’asociabilité, de maladie ou de blessure grave. Environ 70 % des chiens retrouvent leurs maîtres. Une moyenne élevée, due à la généralisation des tatouages, mais surtout des puces électroniques. Pourtant, avertir les propriétaires se révèle parfois impossible, en raison, le plus souvent, d’un changement d’adresse ou de propriétaire n’ayant pas été signalé. Après une période de garde au refuge û généralement deux semaines û, l’animal acquiert le statut d' » adoptable « . Commence alors pour lui un spectacle intrigant : le défilé des candidats adopteurs devant les cages, avec son lot de regards attendris, d’exclamations en tout genre et de caresses.  » Ils sont tous plus craquants les uns que les autres, déplore une jeune femme, venue choisir un compagnon à quatre pattes. Mais j’ai quand même une préférence pour celui-ci « , confie- t-elle en désignant du doigt un petit chien blanc.

L’adoption se fait souvent sur un coup de c£ur. C’est pourtant un acte qui doit être mûrement réfléchi.  » Aurai-je vraiment le temps de m’y consacrer ? Que vais-je en faire durant les vacances ou les week-ends ? » sont quelques-unes des questions auxquelles l’adoptant est invité à répondre. Ensuite, si sa décision est prise, le nouveau maître doit encore remplir et signer un contrat d’adoption. Et s’acquitter d’une participation financière, de 62 euros pour un chat et de 105 euros pour un chien. Car les frais de fonctionnement du Savu sont élevés : en moyenne, 375 000 euros par an. Une somme qui comprend la location des bâtiments, les opérations sur le terrain, la nourriture, les soins et vaccinations. Mais, surtout, les salaires, six personnes étant employées à plein temps, en plus de la vingtaine de bénévoles prêtant main-forte à l’association. Et si les subsides octroyés par les communes affiliées couvrent un tiers des dépenses, le reste provient exclusivement de dons, de parrainages et des cotisations des membres. Sans oublier la note, souvent salée, que les employés présentent avec beaucoup de psychologie à ceux qui viennent récupérer leur animal. Pour ne pas trop gâcher les retrouvailles.

Christophe Bortels

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