Il s’appelle Chita. C’est un chimpanzé de 38 ans. Les huit premières années de sa vie, il a vécu parmi les humains. Il était alors leur animal de compagnie. Aujourd’hui, il vit dans le parc zoologique d’Anvers. Lorsqu’il est arrivé, ses congénères, un clan de huit chimpanzés, ont eu du mal à l’accepter, à tolérer ses comportements «humains». Chita a dû alors apprendre à se conduire comme un chimpanzé. Le hic: il apprécie encore beaucoup la visite des humains, il reconnaît ceux qui lui rendent visite régulièrement, leur envoie des baisers… Parmi ceux-ci, une personne, surtout, vient souvent, trop souvent: chaque semaine, depuis quatre ans, Adie Timmermans (photo) passe des heures devant la vitre de Chita. Lui la salue, embrasse le vitrage. C’est sans doute une belle histoire, touchante à première vue, qui a fait le tour du monde. Mais elle ne fonctionne pas. Cette relation pompe toute l’énergie du chimpanzé. Une fois Adie et les autres visiteurs partis, l’animal n’a plus rien à faire, et s’ennuie. «Il est alors juste assis là, tout seul», rapporte une soigneuse du zoo à l’agence Belga. Ses pairs, par conséquent, l’ignorent, ne le considèrent pas comme membre de la bande, le maintiennent en bas de l’échelle sociale et l’excluent de la communauté. Une place peu enviable. Car dans ce monde très compétitif des chimpanzés, où la force est loin d’être le seul facteur déterminant, il existe une certaine hiérarchie formelle. «Lorsqu’un conflit survient, ce qui est courant avec ces animaux, il est important qu’ils sachent qui fréquenter et qui ne pas fréquenter, explique la porte-parole du parc animalier. Si en raison d’un contact intensif avec les humains, ils ne peuvent pas se concentrer sur leur groupe, ils peuvent manquer certains gestes et événements qui peuvent être importants pour eux.» Bref, pour le zoo, il faut «sauver» Chita. Des gardiens, des soigneurs, des biologistes ont mis en garde Adie Timmermans plusieurs fois. Rien à faire. Elle continue de rendre visite à Chita souvent, trop souvent. «Cette bête m’aime et je l’aime. Je n’ai rien d’autre», répond-elle, en pleurs, lors d’une interview télévisée. Agacé par l’obstination de son abonnée, le zoo vient finalement de lui interdire son entrée et de lui supprimer son abonnement. Résumons, donc: ce dont a besoin un chimpanzé, c’est avant tout d’autres chimpanzés.

L’abonnement au zoo
28-09-2022, 21:00
2 min. de lecture
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