La révolution des chaumières ?

(1) La consommation du transport a augmenté, elle, de 13 %. Celle de l’industrie, de 7 %.

Gagner 500 euros par an, sans trop d’efforts. Cela vous tente ? Ce billet gagnant, la ministre bruxelloise de l’Environnement, Evelyne Huytebroeck (Ecolo), le propose à chaque habitant de la capitale. Bien sûr, ce chiffre est une moyenne. Mais la ministre enfonce le clou :  » Investir dans la performance énergétique de votre bâtiment rapporte plus que laisser vos économies dormir sur un livret d’épargne.  » Pour atteindre un tel objectif, il faudra en tout cas un long travail de persuasion et de contagion culturelle. Y compris auprès de ceux qui ne sont ni des bricoleurs du dimanche, ni des acharnés du kilowattheure épargné. Dites  » économies d’énergie  » et, instantanément, beaucoup de mines se renfrognent. Mais parlez  » performances  » ou  » efficacité  » : voilà qui rend l’affaire déjà – un peu – plus sexy. A fortiori si le prix du baril fait souffrir les portefeuilles.

Bruxelles abrite 472 000 logements, soit 175 000 bâtiments. Près de 42 000 bâtiments non résidentiels s’y ajoutent. Las ! Les habitations de la capitale de l’Europe sont réputées pour leur mauvais niveau d’isolation thermique, notamment celle des murs. La faute à qui ? Probablement à une culture énergétique assez particulière, inscrite, semble-t-il, dans les gènes nationaux :  » Chez nous, parler de l’énergie, c’est parler de la production du parc de centrales disponibles, argumente Evelyne Huytebroeck. Techniquement, nous sommes excellents dans ce domaine. Mais, en Allemagne, quand on parle d’énergie, on parle – en plus – d’efficacité et d’environnement.  »

Environnement ? De fait, entre 1990 et 2002, la consommation énergétique des bâtiments bruxellois a augmenté de 16 % (1). Chaque tonne brûlée de mazout ou de gaz, relâche son lot de polluants dans l’atmosphère. Parmi eux, le CO2, un gaz à effet de serre que le protocole de Kyoto nous impose de réduire. Même si Bruxelles est autorisée à voir ses émissions augmenter légèrement d’ici à 2008-2012, il y a du pain sur la planche.

Car la capitale a de lourds handicaps : un parc de logements souvent vétustes et  » énergivores « , une proportion élevée de locataires (peu disposés à investir dans l’équipement économe), un revenu moyen inférieur à celui des autres Régions et une quasi-absence de chauffage urbain. Sans compter cette malédiction, tant physique que médiatique : pas de belles éoliennes à inaugurer dans le paysage, pas de promenades promotionnelles dans les champs de colza pour vanter les atouts de la biomasse, comme en Wallonie.

Demain, lorsque les projets techniques seront au point, Bruxelles pourrait, par contre, valoriser un fantastique atout géologique : celui d’être implantée à proximité de deux sources de froid, bien plus intéressantes (écologiquement et économiquement) que les systèmes électriques de climatisation, à savoir les  » sables bruxelliens  » et les nappes phréatiques.

Mais, en attendant, les autorités doivent proposer du concret aux habitants, aux ingénieurs, aux architectes, aux entrepreneurs, aux gestionnaires de collectivités. Une seule piste : l’ef-fi-ca-ci-té. Comprenez : faire mieux, y compris en termes de confort, avec moins d’énergie.

Les trois articles qui suivent donnent des exemples concrets de comportements et d’équipements qui concourent à une utilisation plus rationnelle de l’énergie.

 » Selon une étude récente de la KUL et du bureau 3E, basée sur le prix actuel de l’énergie et les factures réelles, on peut diminuer de 30 % la consommation énergétique d’un ménage bruxellois dans un logement neuf, sans procéder à des investissements démesurés, explique Grégoire Clerfayt, conseiller de la ministre. Dans le cas d’une rénovation, il faut compter un surcoût de 73 à 170 euros par mètre carré. Mais ces frais sont vite amortis grâce aux économies qu’ils permettent . »

Encore faut-il convaincre. Evelyne Huytebroeck ne se fait guère d’illusions. Elle sait que sa crédibilité politique, dans ce secteur, est encore faible. Les primes aux particuliers et aux entreprises, annoncées à la hausse pour 2006 ( lire Le Vif/L’Express du 9 septembre 2005 ), ne suffiront pas. Il faut donc susciter le bouche-à-oreille entre professionnels du bâtiment, faire circuler des success stories dans le public, promouvoir le rôle des  » facilitateurs « , qui graissent les rouages de la communication entre les techniciens et les particuliers. Tout cela, en attendant mieux, demain. Mieux ? Il s’agit, primo, de la certification énergétique de tous les bâtiments mis en vente ou en location, insufflée par une directive européenne. Secundo, d’un mécanisme de financement alternatif pour tous ceux qui, malgré les primes, ne peuvent se permettre d’investir dans une nouvelle chaudière, de nouveaux châssis ou un système de régulation thermique. Lorsque de tels outils seront opérationnels, les mentalités, peut-être, changeront en profondeur.

Philippe Lamotte

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire