Impuissant face aux événements ?

J’ai le sentiment que mon opinion a peu d’importance puisque la possibilité d’influer sur l’événement est faible.

Jean-Yves Gros, par e-mailLe sentiment que mon opinion sur les événements est quasi sans effet sur ceux-ci existe à des degrés divers chez tout un chacun. Intimement, l’individu comme tel ne peut se défaire de l’idée que cela passe bien au-dessus de sa tête . Dans ces moments, l’image qu’il se fait du pouvoir est celui d’un monde à part. Là se fait et se défait l’essentiel de notre destin sans que l’avis du petit homme dans la masse compte pour beaucoup. Par ailleurs, sur nombre de problèmes, nos dirigeants donnent l’impression d’être, eux aussi, impuissants. On délocalise, on restructure, l’Etat demande davantage aux citoyens et offre moins de services. Nul n’est responsable… sauf la mondialisation. Face à l’hydre, que faire ? Dans ces conditions, comment rationnellement garder confiance dans notre système démocratique si, effectivement, l’impuissance est si largement présente ?

Comment définir l’impuissance ? C’est le problème du tas de sable. Quand se trouve-t-on devant un tas de sable ? Après avoir déposé dix grains ou dix mille ? Tas de sable pour une mouche ou un éléphant, face à quelques centimètres carrés ou un kilomètre de plage ? Dans l’Antiquité, à Athènes, quelques milliers de personnes – parfois moins – pouvaient changer l’aspect des choses. Ce fut vrai lors des guerres médiques. Plus tard, face aux Macédoniens et aux Romains, les quelques milliers de citoyens athéniens ont vite pris la mesure de leur faiblesse numérique et de ses conséquences.

Il n’empêche, si notre impuissance est facilement mise en avant, elle ne peut avoir le dernier mot… sauf à renoncer à la liberté. Celle-ci n’étant pas une sorte de propriété  » de masse « , mais l’apanage exclusif des individus, son usage effectif définit la réalité de l’ordre démocratique. Belle phrase, dira-t-on, mais l’impuissance est là et ressentie comme telle par l’immense majorité des citoyens. Oui et non !

En réalité, notre impuissance est générée par le sentiment que nous formons non pas une collectivité de citoyens animée par un même projet et une même volonté de le réaliser, mais un conglomérat d’individus liés par la double crainte de perdre sécurité d’existence et capacité de consommation. Il nous manque la foi politique en notre destin. Mais cette foi ne réduirait-elle pas à néant le droit individuel de penser librement ? Non, dans la mesure où il s’agirait de vouloir ensemble cette liberté et le progrès qu’elle permet, chacun luttant pour faire accepter sa vision de l’une et de l’autre. Adressez vos questions de philosophie ou de société à Jean Nousse, via Le Vif/L’Express ou par courriel à jeannousse@hotmail.com

par jean nousse

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