Hervé Niquet, le goût des belles choses

Barbara Witkowska Journaliste

Le charismatique chef d’orchestre français s’est installé à Bruxelles. Intarissable quand il s’agit d’évoquer la magie de la musique et… de la Belgique, il nous parle de son nouveau CD, Ein deutsches Requiem de Brahms. Un enregistrement empreint d’humanité.

Ici, en plein centre-ville, dans ces anciennes écuries du XVIe superbement rénovées, Hervé Niquet est chez lui. Il y règne un calme olympien.  » Je n’écoute jamais de musique chez moi, la musique, c’est le bruit !  » lance-t-il d’emblée avec son humour légendaire. Equilibre, raffinement et simplicité élégante signent l’éclat feutré et racé de cet appartement étiré tout en longueur et très profond. Salon, salle à manger, cuisine et chambre se partagent un espace à la clarté prédominante. Les grandes baies vitrées qui longent quasi tout l’appartement donnent l’impression de vivre dans le jardin, aménagé dans l’ancienne cour.

 » Je suis de la campagne, j’adore jardiner.  » En décorateur éclairé, Hervé Niquet a orchestré l’ambiance de sa maison en mariant meubles japonais, objets  » coups de coeur  » chinés aux puces, étoffes précieuses, coloris chaleureux et belle collection de portraits qui habille tout le mur face au jardin.  » Un amoncellement de choses avec lesquelles on a envie de vivre « , dit-il. On déguste du thé, japonais bien sûr.  » Pourquoi je me suis installé à Bruxelles ? Et pourquoi pas ? Je m’y sens bien, il y a une belle qualité de vie. Les Belges sont des Français de bonne humeur. A l’  » usine  » Flagey où je travaille avec le Brussels Philharmonic, dont je suis le premier chef invité, et avec le Choeur de la radio flamande que je dirige sur le plan musical, l’acoustique est excellente. Et puis, les fleurs à Bruxelles sont quatre fois moins chères qu’à Paris et c’est vachement important ! Bref, quand je pèse la balance, je suis mieux ici !  »

L’année passée, on avait été enthousiasmé par son enregistrement consacré au Requiem de Gabriel Fauré. Voilà que le chef nous donne un éclairage nouveau sur Ein deutsches Requiem de Johannes Brahms. Moins d’emphase, plus de simplicité et de douceur.  » Cette série autour des Requiems les plus emblématiques, c’est une idée d’Alain De Ley, directeur artistique du Choeur de la radio flamande. Au début, cette idée m’a paru saugrenue et complètement démodée, puis, à la réflexion, pas si bête que ça. Le Requiem, c’est le sommet de la vie sociale, toute la société bourgeoise est là, le compositeur doit développer tout son savoir-faire et son inspiration, il se doit de se dépasser car il a intérêt à épater la galerie. Socialement parlant, c’est une vitrine formidable et les Requiems n’ont jamais laissé insensible.  » Celui de Brahms, sous-titré  » allemand  » tient son originalité du fait que la musique n’est pas illustrée du texte latin standardisé. Le compositeur a fait une compilation de différents passages de la Bible (traduite en allemand par Martin Luther) et les a structurés en sept mouvements pour créer une  » dramaturgie « .

 » Requiem est son meilleur opéra !  » Brahms a mis l’accent sur la vie, et non sur la mort. Le texte compilé n’est pas une prière pour le défunt, mais un message d’espoir et de réconfort pour ceux qui restent. Hervé Niquet impose une intensité et une humanité qui feront de cet enregistrement la grande référence. On attend la suite : les Requiems de Mozart, de Maurice Duruflé et d’Alfred Desenclos.

Ein deutsches Requiem, Johannes Brahms (1 CD) et Requiem, Gabriel Fauré (1 CD), Evil Penguin Records Classic.

Hervé Niquet dirigera des choristes masculins du Choeur de la radio flamande le 30 septembre à Flagey, à 20 h 15 (Saint-Saëns, Mendelssohn, Brahms, Wagner, Schumann…).

Barbara Witkowska

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