Les compositions abstraites d’Elise Leboutte font circuler la lumière vers les lutrins de Cécile Bertrand. © Jean-François Flamey

Elsewhere

Le Vif

Le commissaire Yves Depelsenaire s’est fait une spécialité de trames d’exposition comme murmurées à l’oreille des visiteurs, sortes de madrigaux entonnés sotto voce dont la petite musique grise les amateurs. En lieu et place de la grosse caisse plastique habituelle, l’homme cultive le goût de la nuance, du demi-ton. La position est courageuse à une époque où il est acquis que ce sont les propos «stabilossés», voire boursoufflés, dont se nourrit préférablement la machine médiatique. Le tout prend place au Centre culturel de Namur, espace magnifiquement rénové par le bureau d’architecture belge Emmanuel Bouffioux, qui occupe, depuis sa réhabilitation en 2014, les anciens abattoirs de la capitale wallonne.

Avec Elsewhere, l’intéressé joue la carte de la confrontation. Pour ce faire, le curateur fait dialoguer l’œuvre de deux artistes: Lucile Bertrand (1960) et Elise Leboutte (1984). A première vue, la rencontre apparaît comme artificielle. Il semble alors nécessaire de creuser pour mettre au jour les convergences entre les installations aux contours politiques de la première et les grandes toiles méditatives effleurées par la lumière de la seconde. Au fil de la déambulation, ce sentiment s’efface pour faire place à une nécessité que l’on n’avait pas envisagée. S’impose alors l’évidence que les compositions abstraites de Leboutte font circuler adéquatement la lumière vers les lutrins, blocs de plâtre perforé et autres sacs de verre de Bertrand narrant la fragilité de la condition humaine – ainsi que celle d’une planète dont l’avenir est incertain. Le tout consacre une proposition poétique, un écho métaphorique, que Depelsenaire résume en ces termes: «Une musicalité délicate émane des œuvres de Lucile Bertrand comme de celles d’Elise Leboutte. Une atmosphère qui, chez l’une comme l’autre, conjugue le “je ne sais quoi” et le “presque rien”, chers à Vladimir Jankélévitch, à l’évidence transparente d’un air de Mozart.»

Au Centre culturel de Namur, à Namur, jusqu’au 2 avril.

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