Don Rodrigo, le retour

Hier ministre de José Maria Aznar et artisan du  » miracle espagnol « , Rodrigo Rato prend la tête du FMI

Il y a quelques mois, on le donnait comme le grand perdant de la vie politique espagnole. Il s’apprête à devenir l’un des hommes les plus influents de la planète. Rodrigo Rato vient d’être désigné comme nouveau directeur général du FMI. Ironie du sort, ce madrilène au flegme britannique, à qui José Maria Aznar avait sèchement refusé le titre tant envié de dauphin, réussit là où son mentor a échoué : à 55 ans, il entame une nouvelle carrière internationale.

Rodrigo Rato y Figaredo entre en scène auréolé de ses succès d’ex-ministre de l’Economie. Il est l’artisan du fameux  » miracle espagnol  » qui fait tant d’envieux en Europe : les 4,3 millions d’emplois créés en huit ans, le chômage tombé de 22 à 11 %, l’équilibre budgétaire, la croissance soutenue malgré une conjoncture mondiale déprimée… tout cela, c’est lui. Un bilan salué jusque dans les rangs de ses adversaires socialistes. Même si son profil de gentleman politicien agace parfois.

Héritier de bonne famille, licencié en droit et titulaire d’un MBA de l’université de Berkeley, Rato aime le yoga, Almodovar et les Rolling Stones. En avançant dans sa carrière politique, il a abandonné toutes ses responsabilités dans l’entrelacs de sociétés gérées aujourd’hui par l’un ou l’autre des membres de la famille, où l’on trouve agences de voyage, chaîne de radios, société immobilière, entreprises agroalimentaires ou agences en conseil. A l’arrivée de José Maria Aznar à la Moncloa, en 1996, il prend en main les rênes économiques du pays. Pendant ces huit années, il sera en première ligne du gouvernement. Vite, il devient le  » dauphin naturel  » d’Aznar, appuyé par l’establishment.  » L’Espagne est-elle prête à avoir un président millionnaire ?  » interroge alors un éditorialiste.

On n’aura jamais la réponse. Aznar le raie in extremis de sa liste de successeurs par crainte, dit-on, qu’il ne lui fasse de l’ombre. A six mois des élections, à la stupéfaction générale, il lui préfère le docile Mariano Rajoy : il n’aurait pas pardonné à Rato d’avoir pris discrètement ses distances au moment de l’engagement espagnol aux côtés des Américains en Irak. Rato encaisse le coup et fait loyalement campagne pour la liste de son rival, même si son flegme frise l’indifférence dans certaines réunions électorales. On connaît la suite : le 14 mars dernier, les socialistes emportent les élections par surprise. Rajoy ne passera pas par la case Moncloa, et Rato sera directeur général du Fonds monétaire international.

Cécile Thibaud

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