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DÉCHAÎNEZ-VOUS

La Pro League clôture ce mercredi les offres pour le nouveau contrat TV. Devrez-vous acheter un nouveau décodeur la saison prochaine ou pas ?

Lundi prochain, tous les clubs professionnels de 1A et 1B se réunissent. Jadis, ils se retrouvaient une fois par mois mais désormais, la Pro League est gérée comme une entreprise, avec un solide conseil d’administration qui se retrouve régulièrement, prépare tous les dossiers et ne convoque tous les clubs que de temps à autre, pour approuver ces dossiers. La dernière assemblée générale s’est déroulée le 14 décembre et celle qui suivra le 20 mars sera programmée en début d’été. C’est le conseil d’administration qui détermine la politique. Il est composé de sept personnes : Herman Van Holsbeeck (Anderlecht), Mehdi Bayat (Charleroi), Vincent Mannaert (Club Bruges), Joseph Allijns (KV Courtrai), Johan Timmermans (YRFC Malines), Michel Louwagie (AA Gand) et Paul Van der Schueren (OH Louvain) pour la 1B.

Une décision tombera-t-elle lundi sur un nouveau format de championnat ? Non. Plusieurs propositions ont été mises sur la table – deux séries de douze, maintien du format actuel, play-offs à huit, D1 à vingt – mais une modification requiert une majorité de 80 % et il est peu probable qu’on aboutisse dès lundi à un consensus. Il faut quand même abandonner une idée : les chaînes TV ne s’intéressent pas seulement au maintien des play-offs. Ceux-ci ont sans conteste augmenté le suspense mais dans les négociations avec les chaînes, leur maintien n’a jamais été une condition sine qua non. D’ailleurs, l’attrait des PO1 devrait diminuer car de plus en plus de voix s’élèvent contre la division par deux des points acquis avant leur début.

Un des principaux points à l’agenda de lundi est le renouvellement du contrat TV. Il vient à terme cet été. Ou peut-être pas. En février 2014, le groupe MP&Silva, fondé par des Italiens, a signé un contrat de six ans avec la Pro League. Les trois premières années, il a versé 70 millions d’euros par saison et va en payer 80 les trois dernières. Le conseil d’administration a d’ailleurs eu de sérieuses discussions sur la répartition de ces dix millions supplémentaires. La semaine dernière, il n’y avait pas encore d’accord. Ça devrait être chose faite ces jours-ci, pour que tous les clubs puissent voter à ce sujet lundi et savoir de quel budget disposer la saison prochaine.

Le contrat reste donc valable trois ans encore pour les clubs mais il arrive à terme pour vous et moi. C’est ici que ça se complique : MP&Silva a achetéles droits pour six saisons mais n’est qu’un intermédiaire. Il a venduces droits à Telenet, Proximus, la VRT, VTM, VOO, la RTBF, etc… mais pour trois saisons seulement. Il y a perdu son pantalon. Tous ensemble, les partenaires TV n’ont payé que 60 millions annuellement aux Italiens. MP&Silva perd donc environ dix millions par an alors qu’il doit en verser dix de plus dès la saison prochaine. L’entreprise a donc tout intérêt à réunir plus d’argent.

On saura si c’est le cas ce 15 mars, en fonction des offres reçues par la Pro League. Elles seront sans conteste discutées durant l’assemblée générale de lundi.

DOUBLE CASQUETTE

Tout va-t-il rester comme maintenant ? Soit, pour la Flandre, tous les matches sur Telenet et Proximus, les résumés sur VTM et un programme en studio comme ExtraTimesur la VRT ? Et, pour les francophones, les matches sur Proximus et VOO et le reste sur la RTBF ? C’est possible mais ce n’est pas sûr car beaucoup de choses ont changé chez MP&Silva.

En mai 2016, les fondateurs italiens de la société ont vendu 65 % de leurs actions au duo chinois Baofeng Group et Everbright. Baofeng est un groupe de vidéo en ligne, Everbright est une société d’investissements. Les Chinois ont promu un des trois fondateurs de MP&Silva, Andrea Radrizanni, président de Baofeng Sports International. Radrizanni est un spécialiste de marketing qui fait la navette entre son domicile de Singapour et Londres. Il vit avec un mannequin sud-africain. Au moment de la reprise, il avait déjà élargi ses horizons.

En août 2015, il avait en effet vendu une partie de ses actions de MP&Silva à un autre co-fondateur, Riccardo Silva, pour fonder son propre holding d’investissement, Aser. Cette société a mis sur pied Eleven Sports Network, actuellement actif en Belgique, en Pologne, au Luxembourg, à Singapour et à Taiwan. En janvier 2017, il a acheté 50 % des parts de Leeds, qui luttait alors pour la promotion en Premier League. Silva a aussi son club : il partage la propriété du Miami FC, en division deux américaine, avec Paulo Maldini.

Radrizanni est impliqué dans les négociations actuelles sur deux fronts. Un, comme actionnaire, certes minoritaire, de MP&Silva. Deux, via Eleven, présent dans les paquets sportifs de tous les grands opérateurs belges (Telenet, Proximus, Voo et Orange) depuis la saison passée et candidat à la retransmission du football belge.

PARTENAIRE ET CONCURRENT

Eleven est un partenaire et concurrent direct pour les chaînes qui proposent du football payant. Partenaire, car elles sont présentes sur sa plate-forme mais aussi concurrent, puisqu’ils convoitent les mêmes droits. Jusqu’au début de cette saison, par exemple, Proximus détenait les droits exclusifs de la Primera Division espagnole. Ils appartiennent maintenant à Eleven, ce qui permet aux abonnés d’un paquet Eleven chez Telenet de suivre Barça-Real. Cela peut également arriver avec les populaires Premier League et Bundesliga. Pour l’heure, Telenet en possède l’exclusivité mais Eleven a déjà les droits anglais pour Singapour et les allemands pour la Pologne. Si Eleven acquérait les droits belges, il pourrait aussi les offrir via le réseau de Proximus.

Eleven a-t-il un avantage sur ses concurrents dans la lutte actuelle pour les droits TV belges ? En théorie, tout le monde part avec les mêmes chances, même des chaînes moins bien introduites comme Endemol, qui a déjà montré de l’intérêt dans le passé, ou Fox, qui détient le marché néerlandais. Mais tout le monde devra passer par Radrizanni, même s’il possède moins de pouvoir chez MP&Silva qu’en 2014. Quant aux responsables de cette société, ce qui les intéresse le plus, c’est de couvrir les 80 millions annuels promis à la Pro League.

Le nouveau contrat sera-t-il valable pour trois saisons ? Sans aucun doute. Eleven, qui veut proposer une sorte de chaîne Pro League, aimerait disposer de quatre à cinq ans. MP&Silva n’y est pas défavorable mais les clubs professionnels sont moins intéressés. En outre, les seize clubs de D1 ont pris l’engagement de mettre leurs droits en commun mais seulement jusqu’en 2020. Après, chacun est libre, en théorie, de les gérer lui-même.

D’autre part, un contrat lie les équipes de 1B et de la Pro League à Proximus. En février 2016, le nom et les droits de retransmission ont été vendus à la chaîne pour quatre ans. En d’autres termes, les 24 clubs ont tout intérêt à ce que tous les contrats TV arrivent à échéance en 2020 afin de pouvoir partir à la recherche d’un nouveau partenaire.

PAR PETER T’KINT – PHOTOS ISTOCK

MP&Silva perd dix millions par an alors qu’il doit en verser dix de plus dès la saison prochaine. L’entreprise a donc tout intérêt à réunir plus d’argent.

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