» Chère petite fée Aube « 

Marianne Payot Journaliste

Grand épistolier, André Breton n’a cessé d’écrire, notamment à sa fille unique. La publication de ces lettres est une première et un ravissement.

Quarante-trois ans ! Après de – très – longues années d’hésitation, Aube Breton-Elléouët s’est décidée à publier les lettres que son célèbre père lui adressa sa vie durant. André Breton (1896-1966) l’avait stipulé dans son testament : sa correspondance ne pourrait être publiée  » au plus tôt  » que cinquante ans après son décès, à l’exception de celle adressée à sa femme et à sa fille,  » dont elles disposeront librement « . Une chance pour tous ceux qui ne pourront attendre 2016 et l’éventuelle édition de l’extraordinaire correspondance du pape du surréalisme avec Claude Lévi-Strauss, Roger Caillois, Jean Paulhan, Octavio Paz et Aimé Césaire, aujourd’hui conservée à la bibliothèque littéraire Jacques-Doucetà

Née en 1935, la fille unique de l’auteur de L’Amour fou, et de Jacqueline Lamba, a donc disposé librement. La discrète Aube, qui vit aujourd’hui entre la Bretagne et la Touraine, n’entend pas pour autant commenter la superbe édition que la maison Gallimard publie ces jours-ci sur un papier Tintoretto Neve digne des dessins et collages en couleurs qui accompagnent les 61 lettres de ce recueil. C’est au poète surréaliste Jean-Michel Goutier, ami de la famille Breton et maître d’£uvre de l’ouvrage, que revient le rôle de porte-parole enthousiaste.  » Dans les missives à sa fille, c’est avec une grande exigence et dans un style somptueux que Breton lui fait partager ses enthousiasmes, ses projets de revues, ses rencontres et tribulations, avec Jacqueline puis avec Elisa, de La Havane au Mexique. « 

 » Chère petite fée Aube « ,  » Ma petite Aube chérie « ,  » Mon petit chéri « à. Ce qui frappe au fil des lettres, c’est la constance de la passion d’André pour sa fille, dépositaire de l’espoir paternel de  » transformer le monde « . Les premières missives (Sucy, le 15 septembre 1939, Aube a alors 4 ans) sont agrémentées de merveilleux croquis – autoportrait d’André en  » pauvre petit soldat « , la porte de la caserneà – ou encore de collages (Noisy, le 9 octobre 1939). Les dernières cartes postales, datées de mai 1966, proviennent d’un voyage en Bretagne. Entre-temps, c’est tout un monde qui défile, hanté par les figures de Benjamin Péret, Matta, Yves Tanguy, Julien Gracq, Marcel Duchamp, Léo Ferréà

Lettres à Aube, par André Breton, présentées par Jean-Michel Goutier. Gallimard, 184 p.

MARIANNE PAYOT

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