Ce que nous pouvons pour les Arabes

Et si la solution était en nous-mêmes ? Et si l’indispensable marche vers la démocratie du monde arabo-musulman dépendait moins du volontarisme américain et de la prudence européenne que du respect et de l’affirmation de nos valeurs, de la force d’entraînement que nous ne leur insufflons pas aujourd’hui ?

D’un côté, les Américains martèlent qu’il faut agir, qu’on ne peut plus laisser perdurer le sous-développement, les dictatures et l’injustice sociale sur lesquels prospèrent les islamistes. De l’autre, les Européens rétorquent qu’il faut s’attaquer aux causes et pas seulement aux effets de l’intégrisme, qu’il est heureux que les Américains le comprennent enfin mais qu’on doit, pourtant, voir les réalités et penser ce que l’on fait.

Précipiter la chute des oligarchies arabes et favoriser, du jour au lendemain, l’organisation d’élections libres dans ces pays aurait pour seul résultat, disent les Européens, de permettre aux islamistes d’accéder légalement au pouvoir.

Ni les Arabes, ni la démocratie, ni la stabilité internationale n’y gagneraient quoi que ce soit. Les arguments des uns et des autres sont si bien fondés qu’Européens et Américains n’ont pu se rejoindre, mercredi dernier, au G 8, que sur des banalités. Tous s’en félicitent. Les Américains se targuent d’avoir, malgré tout, réussi à mettre cette grande question à l’ordre du jour international, les Européens d’avoir évité d’autres aventures irakiennes, mais les seuls à pouvoir vraiment se réjouir du statu quo sont MM. Ben Laden et consorts.

Avec ce statu quo, les islamistes ont de beaux jours devant eux, mais comment le briser ? En commençant par balayer devant nos portes.

Nous ne pouvons pas prêcher l’apaisement des tensions proche-orientales et nous désintéresser du conflit israélo-palestinien. Les Européens le disent, mais cela ne suffit pas. Il faut faire bouger les choses et l’Union le pourrait en annonçant qu’elle est prête, seule ou dans le cadre de l’Otan, à déployer suffisamment de troupes le long de la ligne verte pour assurer la sécurité des Israéliens et permettre aux Palestiniens de construire leur Etat. Cette seule offre donnerait au camp de la paix israélien une base sur laquelle se reformer, les Palestiniens les plus modérés pourraient s’appuyer sur cette dynamique et, un jour, les Etats-Unis suivraient.

Nous ne pouvons pas nous draper dans l’étendard des droits de l’homme et ne pas nous élever plus vigoureusement contre les tortures irakiennes alors qu’elles ont été voulues au plus haut niveau d’une démocratie occidentale. Nous ne pouvons pas nous inquiéter du sous-développement proche-oriental et ne pas avoir une politique d’attribution massive de bourses à ceux des étudiants arabes qui s’engageraient à travailler dans leurs pays pour au moins vingt ans.

Nous ne pouvons pas parler de paix et de développement sans commencer par faire ce que nous pouvons faire sans mettre la planète à feu. l

Bernard Guetta

Européens et Américains n’ont pu se rejoindre au G 8 que sur des banalités. Avec ce statu quo, les islamistes ont de beaux jours devant eux

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