Ce qu’a dit la Cour de cassation

La Cour de cassation a balayé les arguments de la chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Bruxelles en matière de compétence universelle. La cour d’appel avait déclaré irrecevables les poursuites contre des personnes ne se trouvant pas sur le territoire belge, comme le Premier ministre israélien Ariel Sharon, ancien ministre de la Défense, et Amos Yaron, ancien général de brigade. Ceux-ci sont cités pour leur responsabilité présumée dans les massacres perpétrés par des supplétifs chrétiens libanais de l’armée israélienne dans les camps palestiniens de Sabra et de Chatila, à Beyrouth, en 1982. En revanche, la Cour de cassation s’aligne sur la jurisprudence de la Cour de justice de La Haye et confirme l’immunité dont jouit le Premier ministre israélien jusqu’à sa sortie de charge. L’affaire va donc repasser devant la chambre des mises en accusation, autrement composée, et les avocats de la défense auront tout le loisir de faire valoir leurs arguments. Mais il est peu probable que la cour d’appel de Bruxelles entame une guérilla judiciaire avec la Cour de cassation. Encore que rien, vraiment, ne se déroule comme prévu dans cette affaire. Jean du Jardin, procureur général près la Cour de cassation, en rupture avec l’attitude du parquet depuis dix ans, n’avait-il pas plaidé l’irrecevabilité des poursuites? Du coup, l’urgence d’une « loi interprétative » pour confirmer la volonté du législateur de 1993-1999 – sur laquelle Jean du Jardin n’émettait pas de doute – ne s’impose plus. Le camp politique retrouve toute sa capacité à « discipliner » une loi qui a permis le procès des quatre « génocidaires » de Butare (Rwanda), éveillé des espoirs de justice parfois démesurés aux quatre coins du monde et qui complète le dispositif de la Cour pénale internationale. Tel doit être le rôle de la loi dite « modificative » qui vient d’être adoptée au Sénat. Nul doute que la Chambre des députés s’en emparera pour l’étudier à tête reposée, la pression judiciaire étant retombée. Michèle Hirsch, avocate de l’Etat d’Israël, propose « une concertation avec les pays de l’Union européenne, où la Belgique pourrait jouer un rôle pilote. » En Israël, on se tâte. Va-t-on envoyer paître la justice belge ou reconnaître les institutions d’un Etat souverainen se prêtant loyalement à ses procédures, fussent-elles contestées? La mission confiée au Mossad, le service secret israélien, de rassembler des informations sur le dossier d’instruction, les preuves déjà réunies et, même, la « biographie » des avocats des parties civiles n’est pas de bonne augure.

Marie-Cécile Royen,

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