Benoît Poelvoorde au sommet du Podium

Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

Le succès fou de son dernier film ne changera pas un acteur qui a su, dès le départ, conjuguer l’humour et l’humain, le plaisir du rire et une certaine exigence

C’est l’histoire d’une vocation contrariée. Il était une fois, en effet, un gamin de Namur qui ne rêvait que d’une chose : être dessinateur de BD. Enfant, il faisait des  » petits Mickey  » dans les marges de ses cahiers, dévorait les albums des autres en pensant à ceux qu’il commettrait lui-même plus tard, quand il serait grand. Les années ont passé, les circonstances ont éloigné Benoît Poelvoorde des planches à dessin pour lui tracer un futur du côté de celles des théâtres et, surtout, des écrans de cinéma et de télévision. De ses premières amours, il aura conservé un sens certain de la caricature, une aptitude à  » croquer  » un personnage en quelques traits aussi vifs qu’éloquents, une manière, aussi, de cheviller le réel à l’imaginaire, le banal à la démesure, que ses bandes dessinées auraient sans doute également cultivés.

C’est l’histoire d’un talent. D’un talent fou, férocement naturel et affiné par un remarquable travail. Dès son premier long-métrage, le stupéfiant C’est arrivé près de chez vous, Poelvoorde a révélé une pure présence cinématographique, comme seuls certains acteurs d’outre-Atlantique (son idole, De Niro, en tête) savent en imposer avant même d’ouvrir la bouche. Et quand il l’ouvre, la bouche, c’est pour exprimer la verve extraordinaire d’un grand amoureux des mots, alliant à merveille jeu physique et verbal. Une riche alliance qu’il n’a jamais cessé de cultiver avec une précision souvent impressionnante.

C’est l’histoire d’un succès. Et même, aujourd’hui, d’un triomphe. Les records de popularité battus par Podium placent Poelvoorde au rang des comédiens francophones les plus appréciés du public. Et cela, sans effort particulier de plaire, sans compromis majeur ni recours au plus petit dénominateur commun, aux facilités où tombent tant de prétendants à la couronne du rire. Sans, non plus, renoncer le moins du monde à son identité ni à une belgitude qu’il n’a jamais reniées pour rejoindre la  » grande famille  » du cinéma français.

Car c’est aussi l’histoire d’une fidélité. Dès le départ, Benoît Poelvoorde a su afficher une liberté s’exprimant aussi bien dans ses refus que dans ses choix positifs. Très courtisé par le cinéma français après l’explosion de C’est arrivé près de chez vous, il a préféré prendre le risque de se consacrer au théâtre, écrivant, puis jouant en solo un Modèle déposé révélant sur le fil du rasoir une créativité dont aucun film, à l’époque, n’aurait pu faire aussi bien résonner les subtils accords. La suite relève, elle aussi, d’une belle exigence. Presque tous les choix de Poelvoorde se sont inscrits dans une ligne comique et humaine des plus originales, avec, à la clé, une galerie de personnages composant une famille cohérente, jusque dans ses riches contradictions. En amitié comme en amour, en matière de famille comme d’habitat (il vit toujours dans son Namur natal), celui que l’on aime appeler simplement Ben s’est aussi bien gardé des grandes et petites trahisons si fréquentes dans le milieu changeant du spectacle. Le succès, l’argent, la popularité ne semblent pas pouvoir tourner la tête à un homme dont l’intelligence û aiguë û passe aussi par le c£ur… L. D.

Louis Danvers

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