Aux grands maux les petits remèdes

Foin de grands effets de manche, place à la sagesse : les mesures anticrise ne peuvent pas hypothéquer l’avenir.

 » Il faudrait être fou pour dépenser plus « , scandait une pub. On ne saurait si bien dire : avec sa dette monumentale, la Belgique ne pouvait se permettre des mesures anticrise spectaculaires, qui auraient plombé l’avenir. Le plan de relance économique concocté par le gouvernement fédéral coûtera donc  » seulement  » quelque 2 milliards d’euros. Le budget de l’Etat pour 2009 accusera, du coup, un déficit de l’ordre de 1,8 % du Produit intérieur brut (PIB). Voilà pour la version optimiste .  » Il ne m’étonnerait pas que l’année prochaine se solde, en réalité, par un déficit de 2 à 3 % du PIB « , s’inquiète Vincent Bodart, économiste à l’Ires (UCL). En un mot comme en cent : ce plan s’apparente plus à des mesurettes qu’à une vraie relance, mais il aurait été dangereux d’en faire davantage. A moins de renouer avec les fantômes des années 1970, marquées par les largesses des gouvernants que l’on a payées pendant vingt ans.

Cette fois, l’accord interprofessionnel – plus d’un milliard d’euros, financés par le gouvernement – fait partie intégrante du plan de relance. Il y a fort à parier que, sans cette obligation de renouveler le cadre applicable aux salariés du secteur privé durant les deux prochaines années, l’équipe d’Yves Leterme aurait éprouvé beaucoup plus de peine à rédiger son ordonnance, tant les dissensions sur la médication à administrer étaient grandes entre le PS et l’Open VLD.  » Cet accord interprofessionnel est la pierre angulaire du plan de relance, souligne Jacques Defourny, économiste à la HEC/ULg. Outre le fait qu’il s’agit là du véritable plan de résistance à la crise, il a l’immense mérite de sauver le modèle belge de concertation sociale, qui vise à la fois à protéger le pouvoir d’achat des ménages et à sauvegarder la compétitivité et la « liquidité » des entreprises. « 

Pour ce qui est du plan de relance proprement dit, hors accord intersectoriel, donc, il est surtout axé sur le soutien au secteur de la construction. Et là, les experts se montrent nettement moins enthousiastes :  » Ceux qui avaient décidé de construire construiront et bénéficieront de l’effet d’aubaine que représente la baisse de la TVA, analyse Jacques Defourny. Mais cette baisse ne suffira pas à persuader les autres de se lancer dans l’aventure en pleine période d’incertitude.  » Autre bémol, aussi, sur l’allègement de la facture énergétique :  » On peut s’interroger sur l’opportunité de pareille mesure alors que la problématique du réchauffement climatique se fait de plus en plus sensible, s’inquiète Vincent Bodart. Il aurait fallu, au moins, les réserver aux ménages les plus faibles : les gens qui roulent en 4×4 et gagnent 10 000 euros par mois n’ont pas besoin d’un tel coup de pouce. « 

Isabelle Philippon et Laurence van Ruymbeke

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire