Art déco en Belgique, quel éclectisme !

Barbara Witkowska Journaliste

Au musée de la Céramique d’Andenne, plus de deux cents ouvres racontent, selon un parcours thématique très clair, ponctué de nombreuses pièces fortes, les expressions artistiques des années 1930 figées au sein de l’argile.

Une exposition riche, exubérante et vivante qui ne s’est pas refermée uniquement sur les valeurs sûres, telles les £uvres de Boch Frères Kéramis, par exemple, mais qui s’est enrichie de la production des manufactures moins connues.  » Nous avons voulu sortir des sentiers battus et être le plus objectif possible, explique Anne Pluymaekers, commissaire de l’exposition. Le but était de dépoussiérer certaines manufactures, notamment à Bruxelles et en Flandre, et de montrer la variété de la production, allant des £uvres décoratives d’artistes connus et méconnus aux pièces à caractère plus fonctionnel, comme, par exemple, les carrelages. « 

Les premières vitrines révèlent les principaux thèmes du mouvement Art déco qui s’est imposé en Belgique dès 1925, après l’Exposition de Paris. Ils s’inscrivent résolument dans la modernité ambiante. Avions, trains et bateaux se posent sur les faïences de la manufacture de Nimy. L’esthétique cubiste, qui fait fureur dans l’art, inspire au sculpteur Angelo Hecq plusieurs £uvres, dont cet étonnant groupe en terracotta réunissant trois musiciens célèbres : Franz Liszt, Ludwig van Beethoven et Richard Wagner. L’engouement de l’époque pour l’exotisme se remarque dans ce masque  » africain  » en faïence turquoise, réalisé à Nimy. La statuette d’un Couple au ballon de plage ou Le Monde, issue de la faïencerie Georges Dubois, dit assez combien l’Art déco s’attache à la beauté et au dynamisme du corps en mouvement. Les Ballets russes de Diaghilev inspirent aux artistes de très belles figurines : la Danseuse au disque de la faïencerie de Wasmuël, la Danseuse aux voiles de Léon Nosbusch, Joséphine Baker immortalisée par le célèbre Charles Catteau et, surtout, la statuette Danseurs modernes, signée du grand sculpteur George Grard.

Si le goût pour les animaux est toujours bien vivant, les artistes prennent pour modèle un léopard ou une antilope (Oscar De Clerck, par exemple, réalise La femme à la panthère), symboles de la vitesse et du dynamisme, contrairement à leurs confrères de la période Art nouveau qui se passionnaient, eux, pour l’aspect purement décoratif d’un escargot ou d’une libellule. Pour ce qui est des célèbres vases et coupes de Boch Frères Kéramis, la manufacture la plus réputée, les plus beaux spécimens sont ici bien représentés, des modèles parés de couleurs chatoyantes, mêlant admirablement le turquoise et le bleu cobalt, jusqu’à un modèle plus rare en faïence noire lisse comme du verre, décorée d’incrustations de platine.

Aux antipodes de ce style raffiné, la production flamande dont l’épicentre était située à Torhout, se caractérise par un esprit marqué de  » poterie « . Les formes sont certes graphiques et géométriques, mais la polychromie où fusionnent des bruns, des verts et des bleus assez sombres, renvoie à des ambiances médiévales. Elle fait aussi ressentir que les traditions culturelles sont très différentes au Nord et au Sud. La grande originalité de l’exposition est de les exposer, pour la première fois, côte à côte, de les rassembler, dans une vision complète de la céramique belge Art déco.

Céramiques de l’Art déco en Belgique, musée de la Céramique d’Andenne, jusqu’au 8 janvier 2012.

www.ceramandenne.be

BARBARA WITKOWSKA

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