» Arrêtons de faire de la caricature ! «
Mi-juillet, dans Le Vif/L’Express, Vincent Reuter, le patron de l’Union wallonne des entreprises, pointait cinq points noirs pour la Wallonie : l’enseignement, le climat social, le chômage, le coût du travail et la politique énergétique. Réplique agacée du ministre wallon de l’Economie, Jean-Claude Marcourt.
Le Vif/L’Express : Avez-vous le sentiment que le discours de l’Union wallonne des entreprises (UWE), ou, du moins, de son administrateur délégué Vincent Reuter, se radicalise ?
Jean-Claude Marcourt : Non. Mais cette organisation patronale s’exprime plus clairement qu’auparavant. Pendant longtemps, elle a laissé la FEB (Fédération des entreprises de Belgique) être le porte-parole de tous les patrons, alors que le Voka, son pendant flamand, avait davantage de visibilité. Aujourd’hui, l’UWE rattrape son retard.
Le Voka, plus agressif dans sa communication, peut-il lui avoir servi de modèle ?
Je pense que le fait de la régionalisation est aujourd’hui assumé. Pour autant, l’UWE n’a pas la vision politisée du Voka. Elle prend aussi beaucoup moins l’initiative que son alter ego flamand.
L’organisation patronale wallonne déplore que le handicap salarial de la Belgique par rapport à certains pays soit nié ou minimisé par certains responsables politiques…
Plus personne, même dans les syndicats, ne nie qu’il faut une réflexion sur le coût salarial, mais dans le cadre plus vaste de la fiscalité et de la parafiscalité. Tout le monde sait qu’en Belgique, nous n’avons pas de matières premières, que nous faisons face à un problème énergétique majeur et, dans l’industrie manufacturière, à un souci de compétitivité des salaires. Il faut tout faire pour doper la croissance. Dans la compétition mondiale, la Belgique doit continuer à travailler pour s’améliorer.
Par rapport à la nationalisation d’ArcelorMittal, Vincent Reuter a déclaré à La Libre Belgique : » On a essayé ça à partir de 1917 en Russie et on a vu ce que ça a donné. »
C’est une position facile et idéologique. Nationaliser, Barack Obama l’a fait, les Pays-Bas l’ont fait. Dans le domaine financier, la Belgique a fait pareil et personne n’a osé ni voulu en débattre. La régulation économique est fondamentale. C’est la dérégulation qui a conduit à la crise de 2008. Les Etats doivent avoir des instruments juridiques pour éviter les dérives d’un système dans lequel la cupidité règne et pour pouvoir réagir quand quelque chose d’inacceptable se passe. Arrêtons de faire de la caricature : on n’a pas entendu Vincent Reuter demander l’exclusion de ceux qui ont conduit à la crise, responsable de la ruine économique de beaucoup de citoyens.
Le patron de l’UWE déplore encore qu’en Wallonie, on utilise l’embauche dans la fonction publique comme un rempart contre le chômage.
Il y a longtemps que la Wallonie ne pense plus que l’emploi public est le remède à la crise de l’emploi. C’est un poncif, mais historiquement, les organisations patronales ont toujours trouvé qu’il y avait trop d’emplois dans la fonction publique. En revanche, quand un permis d’exploiter ou des subsides ne leur parviennent pas rapidement, faute de personnel suffisant, ce sont les mêmes qui rouspètent ! Nous sommes dans un schéma, en Wallonie, où l’activité économique est dé- sormais mieux accueillie. On est d’accord pour dire que c’est encore insuffisant. Mais il est plus facile de se plaindre que de poser une analyse objective : il y trop peu d’activité économique et trop peu d’emplois.
Entretien : Laurence van Ruymbeke
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici