© REUTERS

Taiwan : grève contre China Airlines, une première dans l’histoire du pays

Stagiaire Le Vif

Une grève menée vendredi dernier par les syndicats de l’aéroport de Taoyuan a marqué une nouvelle page dans l’histoire de l’île. En effet, c’est la première fois que la quasi-totalité des membres d’un syndicat votait en faveur d’une grève. Une grève qui traduit aussi un changement de l’opinion publique vis-à-vis de ces mouvements sociaux.

Depuis quelques années, avec l’ouverture des vols directs entre Taiwan et la Chine, le secteur touristique de l’île ne cesse de croître. De plus, le positionnement de l’aéroport international de Taoyuan (le plus grand de Taiwan, avec 38 millions de passagers en 2015) en hub de transit pour des vols internationaux, a conduit de nombreuses compagnies, China Airlines en tête, à multiplier les recrutements. A l’instar des compagnies européennes, China Airlines souffre de l’émergence de compagnies low-cost qui desservent de plus en plus l’île. De fait, la compagnie nationale a décidé d’aligner vers le bas le salaire des employés tout en rognant sur les temps de pause et de transfert jusqu’ici assimilés à du temps de travail.

Après de nombreuses négociations non-abouties et des manifestations, 99,5% des membres du syndicat ont voté en faveur de la grève. Alors qu’une grève, aux yeux des Européens, peut sembler banale, celle qu’a connue China Airlines était exceptionnelle et inédite.

La grève seulement reconnue depuis 2011

En effet, c’est la première fois qu’une grève de cette ampleur a été mise sur pied à Taiwan. Il faut dire que pendant très longtemps « le tissu industriel, composé pour grande part de petites entreprises familiales (était) peu propice à l’implantation des syndicats, et la loi a longtemps entravé l’organisation des salariés « , rappelle le média Asialyst. Ce n’est qu’en 2011 que le droit des syndicats à représenter les salariés, à négocier des accords avec les employeurs et à mener des grèves a été réellement reconnu.

Après 24h seulement, les dirigeants de China Airlines ont décidé de faire des concessions afin de mettre fin à la grève qui avait déjà affecté quelque 20 000 passagers. Mais au-delà de cette victoire, ce mouvement de grève a été pour la première fois suivi par « une réaction positive du public et (elle) pourrait marquer un pas en avant pour le droit des travailleurs dans le pays « , estime le Tapei Times dans un édito publié en début de semaine.

Les grèves longtemps décriées par la population.

Pendant très longtemps, la grève n’était pas vue d’un bon oeil par le public et était même décrite comme « diabolique » par l’ancien président Ma Ying-Jeou. Ainsi, en 2013, un groupe de travailleurs avait décidé de bloquer des rails pour protester contre leur licenciement, jugé abusif. Les passagers, en colère contre les grévistes, étaient allé jusqu’à pousser les conducteurs de trains à rouler sur les contestataires.

Cependant, la donne semble avoir changé, et ce depuis « le mouvement des Tournesols » en 2014. Ce mouvement poussa la population à prendre en considération l’impact qu’elle pouvait avoir et l’importance d’agir pour pouvoir jouir de meilleures conditions de travail. Une grande majorité du public semblait ainsi se ranger du côté des grévistes la semaine dernière, et ceux interviewés par les médias supportaient les requêtes des employés, explique le Tapei Times. Le soutien le plus important est venu de la jeunesse qui s’est massivement manifestée sur les réseaux sociaux, les blogs et dans les reportages télévisés en faveur des perturbateurs. Histoire de montrer qu’ils étaient eux aussi prêts à avoir recours à la grève le moment venu.

Par F. Ca.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire