L’écrivain Salman Rushdie, une vie gâchée pour un roman. © getty images

Salman Rushdie démontre la faiblesse des islamistes

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le psychanalyste Fethi Benslama revient sur l’agression de l’écrivain par un homme qui n’était pas né au moment de la fatwa appelant à le tuer : pourquoi cet acharnement ?

Salman Rushdie, auteur du livre Les Versets sataniques, a été agressé le 12 août 2022 à l’occasion d’une conférence dans l’Etat de New York. Celui qui l’a poignardé n’était pas né le 14 février 1982, lorsque l’ayatollah Khomeiny a édicté une fatwa appelant tout musulman à tuer l’écrivain. «L’Etat iranien officiel a pris ses distances avec elle. En un tiers de siècle aux imprévus vertigineux, le monde s’est tant éloigné d’alors: pourquoi cet acharnement? Que s’est-il passé d’irrévocable avec Les Versets sataniques?», interroge dans Le Sacrifice de Rushdie (1) le psychanalyste Fethi Benslama, qui a popularisé la notion de «surmusulman» pour expliquer le comportement de l’islamiste violent.

(1) Le Sacrifice de Rushdie, par Fethi Benslama, SeuilLibelle, 60 p.
(1) Le Sacrifice de Rushdie, par Fethi Benslama, SeuilLibelle, 60 p. © National

L’auteur rappelle que le Guide suprême de la révolution iranienne a transgressé, avec sa fatwa, l’ordre juridique et théologique de l’islam «puisque nul ne peut être tué pour outrage à Dieu ou au Prophète […] sans un procès par des instances publiques qui le jugent». En réalité, l’appel au meurtre s’expliquait par des motivations politiques: la réaffirmation du pouvoir de Téhéran après l’échec de la guerre contre l’Irak, et la rivalité avec l’Arabie saoudite sunnite pour le leadership du monde musulman.

A la vengeance illimitée, notre réplique est de lire encore et infiniment le roman de Salman Rushdie, clame Fethi Benslama. «Il plonge dans l’histoire des problèmes les plus cruciaux de l’islam et émerge dans son actualité marquée par le mouvement islamiste qui a décidé de faire barrage à tous ceux qui veulent […] proposer de nouvelles interprétations» du Coran. Or, Rushdie y démontre que le Prophète lui-même a remanié le texte sacré et que, dès lors, il ne peut être considéré comme dicté par Dieu. Un constat plus dérangeant pour les fondamentalistes vengeurs qu’un soi-disant blasphème.

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