Depuis la tentative de coup d'Etat de 2016, plus de 50 000 personnes ont été placées en détention en Turquie. © Depo Photos/belgaimage

Rétro 2017: la Turquie, entre surveillances et punitions

Sa victoire étriquée au référendum sur la réforme constitutionnelle renforçant ses pouvoirs n’a pas empêché le président Erdogan de radicaliser sa gouvernance.

L’état d’urgence est prolongé en Turquie jusqu’au 18 janvier 2018, et les purges se poursuivent. Depuis le coup d’Etat avorté de 2016, plus de 50 000 personnes ont été placées en détention, dont 7 500 militaires, et quelque 150 000 fonctionnaires ont été mis à pied. Raison invoquée : éliminer la menace séditieuse, dont l’origine est imputée au prédicateur Fethullah Gülen, en exil aux Etats-Unis. Mais la répression s’abat également sur les opposants kurdes et les milieux jugés trop critiques. Plus de 140 journalistes ont ainsi été arrêtés, et des milliers d’ONG fermées. Pour les gens éjectés de leur travail, c’est la mort sociale : pointés du doigt, ils ne bénéficient plus d’aucun salaire ni d’indemnités de chômage.

Entre-temps, le président Erdogan a gagné son référendum du 16 avril renforçant considérablement ses pouvoirs. Il pourra désormais dissoudre le Parlement, nommer et révoquer les vice-présidents et les ministres, jusqu’aux juges de la Cour constitutionnelle. Mais sa victoire est si étriquée (54 %) qu’elle en devient amère. D’autant plus que ce sont les grandes villes qui ont infligé à Erdogan un camouflet cinglant, là où se concentrent les pouvoirs financier, industriel et intellectuel. Le rôle des Turcs de l’étranger a été décisif. Ainsi, 77 % des électeurs belgo-turcs ont approuvé la réforme. Celle-ci sera mise en oeuvre après les élections présidentielle et législatives de 2019. Ce scrutin n’est pas gagné d’avance : si l’opposition rassemble ses forces, elle pourrait bien miner le projet  » dictatorial  » d’Erdogan.

Sur le plan extérieur, la radicalisation d’Erdogan est tout aussi patente. Son rapprochement avec Moscou, autant stratégique (sur la Syrie) que militaire et commercial, est un véritable pied de nez à l’égard des Européens et de l’Otan. Dernier incident en date : au cours d’un exercice de simulation de l’Otan en Norvège, le président Erdogan a été  » malencontreusement  » assimilé à un ennemi. La Turquie a aussitôt retiré des manoeuvres ses 41 militaires. En 2018, l’Union européenne pourrait supprimer jusqu’à 175 millions d’euros d’aide à la Turquie, dans le cadre de la procédure d’adhésion, et bloquer des crédits, sans toutefois toucher aux gigantesques montants octroyés à Ankara pour qu’il garde les migrants sur son sol.

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