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Qui sont les Mormons mexicains ?

Le Vif

Les Mormons mexicains, endeuillés par le massacre de neuf de leurs membres, sont bien enracinés dans le nord du Mexique depuis la fin du 19e siècle mais sont à cran avec les narcotrafiquants dont ils réprouvent la violence.

Les premiers pionniers, affiliés à l’Eglise de Jesus Christ des Saints du Dernier Jour, se sont implantés dans les montagnes de la Sierra Madre, près de la frontière avec les Etats-Unis, dès 1875.

C’est après la Guerre de sécession que les autorités fédérales américaines ont commencé à persécuter les Mormons pour leur polygamie, une pratique officialisée en 1852.

Poussés à bout par une justice américaine très conservatrice, ils commencèrent à fuir l’Utah et les rivages du Grand Lac Salé où ils vivaient, pour se diriger vers la frontière sud des Etats-Unis.

« Le Mexique est ainsi devenu le premier pays d’Amérique latine où des mormons se sont établis », explique Francisco Jara, auteur d’une thèse de doctorat consacrée à l’histoire des Mormons.

Selon lui, après 1891, date à laquelle l’église mormone américaine a décidé d’abolir officiellement la polygamie, de nombreuses familles sont restées polygames et des sectes fondamentalistes pratiquant la polygamie ont fait leur apparition, y compris au Mexique où on en recense une quarantaine, selon Francisco Jara.

Elles se fondent généralement sur les enseignements de Joseph Smith, considéré comme un prophète (décédé en 1844), qui jurait par tous les saints que la polygamie relevait d’un ordre divin.

La pratique reste courante au sein des différentes communautés mormones au Mexique.

L’Eglise de Jésus Christ des Saints du Dernier Jour estime à 1,2 million le nombre de ses membres au Mexique, la deuxième plus grande communauté mormone après celle des Etats-Unis.

Mais le dernier sondage officiel, commandité par le gouvernement mexicain en 2010, donne le chiffre très différent de 314.932 membres pour la même église.

Selon un communiqué de presse de la Mairie de Mexico, cette différence considérable s’explique par le fait que les majorité des Mormons mexicains refusent d’être affiliés à l’église « mère » et le font savoir lorsqu’ils sont interrogés par les sondeurs.

Le clan LeBaron, qui a perdu six membres lors du massacre de lundi soir, appartient à l’Église du Premier-né, une secte dissidente de l’Église de Jésus-Christ des Saints du Dernier-Jour, fondée en 1924 à Chihuahua, un Etat limitrophe des Etats-Unis. Cette secte compte 5.000 fidèles, selon Julian LeBaron qui s’est exprimé dans de nombreux médias locaux.

Le 2 mai 2009, Erick LeBaron, 17 ans, avait été enlevé dans la région de Chihuahua. Ses ravisseurs avait réclamé une rançon d’un million de dollars mais s’étaient heurtés au refus obstiné de toute la communauté. Le jeune homme avait été libéré une semaine plus tard.

Les mormons mexicains, qui sont souvent détenteurs de la nationalité américaine, se sont illustrés ces dernières années par des appels à cesser les violences en relation avec le trafic de drogue. Selon plusieurs médias mexicains, la demande a suscité l’ire des cartels qui opèrent dans la région.

Benjamin LeBaron, qui a fondé l’organisation Segura (SOS Chihuahua) à l’origine de l’un de ces appels, a été tué en juillet 2009 avec son beau-frère, Luis Widmar, par 17 tueurs qui avaient irruption chez eux.

Après ces deux meurtres, Julian LeBaron est devenu l’un des protagonistes de la Caravane pour la paix avec Justice et Dignité en mars 2011, un mouvement composé d’environ 600 personnes, proches de familles de victimes disparues ou assassinées a traversé le Mexique afin de sensibiliser à la question de la violence liée au narcotrafiquants.

La famille LeBaron a rejeté l’hypothèse avancée mercredi par les autorités mexicaines selon laquelle les victimes se sont trouvés au coeur d’une bataille entre deux cartels pour le contrôle d’une parcelle de territoire entre les Etats de Sonora et de Chihuahua. Elle estime avoir été une cible directe des cartels suite à des menaces explicites.

Selon la presse mexicaine, la famille LeBaron aurait également été impliquée dans des disputes avec des agriculteurs locaux autour du partage de l’eau, une denrée rare dans cette région du nord du Mexique.

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