Poutine, le 15 février 2022.

Poutine décrit le scénario catastrophe sur les prix énergétiques et alimentaires en cas de sanctions

Le Vif

Le président russe Vladimir Poutine a prévenu jeudi que les sanctions occidentales visant son pays en lien avec l’Ukraine allaient aggraver la crise énergétique et l’inflation des prix alimentaires à l’échelle mondiale.

Alors que la morsure de ces mesures punitives commence à se faire sentir en Russie, avec notamment un effondrement du rouble, M. Poutine s’est voulu rassurant en soutenant qu’elles n’affecteraient pas durement ses concitoyens.

Depuis son déclenchement le 24 février, l’intervention militaire russe en Ukraine suscite l’inquiétude des marchés mondiaux. Les cours du gaz et du pétrole, dont la Russie est un important fournisseur, se sont envolés.

Lors d’une réunion gouvernementale retransmise à la télévision, M. Poutine a assuré que son pays « respecte toutes (ses) obligations en matière d’approvisionnements énergétiques ». Il a insisté sur le fait que « tous les volumes » étaient livrés à l’Europe comme ailleurs et que même le « système de transport de gaz de l’Ukraine est rempli à 100% », ce réseau de gazoduc constituant l’une des artères gazières clé pour approvisionner le continent européen, dont environ 40% du gaz consommé est russe.

Selon M. Poutine, dès lors, l’envolée des cours du gaz et du pétrole sur les marchés mondiaux n’a rien à voir avec la Russie, alors que les prix atteignent des sommets depuis que les forces russes sont entrées en masse en Ukraine. « Les prix augmentent là-bas, mais ce n’est pas de notre faute, c‘est le résultat de leurs propres erreurs de calcul, on ne peut pas nous rejeter la faute », a-t-il dit.

Engrais

Le chef de l’État russe a par ailleurs estimé que les sanctions occidentales allaient compliquer l’exportation d’engrais et entraîner une hausse mondiale des prix alimentaires.

La Russie, tout comme son voisin le Bélarus, lui aussi durement sanctionné, sont des grands fournisseurs d’engrais minéraux et approvisionnent aussi bien l’Europe que l’Amérique du Sud.

« Si ça continue comme ça, cela aura des conséquences sérieuses (…) pour le secteur alimentaire dans l’ensemble, la hausse de l’inflation sera inévitable », a dit M. Poutine.

Si les engrais russes ne sont pas directement visés par les sanctions, les secteurs de la finance et de la chaîne logistique le sont, ce qui affecte les capacités de la Russie à exporter.

Le ministère russe de l’Industrie a recommandé la semaine dernière aux producteurs d’engrais de suspendre temporairement leurs exportations. « Si on continue de nous créer des problèmes pour financer ce travail, l’assurer, dans la logistique, la livraison de nos produits (…) alors les prix vont augmenter toujours plus, et cela va se ressentir sur le prix du produit final, les produits alimentaires », a insisté M. Poutine.

Tout en décrivant ce scénario catastrophe, le président russe s’est efforcé de rassurer les Russes en soutenant que l’économie du pays allait s’adapter. « Cela mènera à une plus grande indépendance, autonomie et souveraineté » économique, a-t-il déclaré.

« Isolement »

Face aux sanctions, qui ont provoqué une chute du rouble et une accélération supplémentaire de l’inflation, la Russie a pris des mesures pour enrayer autant que possible la fuite des devises et capitaux étrangers.

Sans prononcer le mot « nationalisation », M. Poutine s’est dit jeudi pour la nomination d’administrateurs « externes » à la tête d’entreprises étrangères cherchant à quitter la Russie « pour les transférer à ceux qui veulent les faire fonctionner ».

« Il y a suffisamment d’instruments légaux » pour le faire, a-t-il dit sans apporter de précisions, tout en assurant que la Russie restait « ouverte » aux acteurs économiques étrangers le désirant et que leurs droits « doivent être protégés ».

En dépit des déclarations de M. Poutine se voulant rassurantes, les économistes anticipent de fortes turbulences économiques en Russie.

Selon les chiffres officiels publiés mercredi, l’inflation a atteint en février 9,15% en rythme annuel, un chiffre élevé qui ne prend pas encore en compte tous les effets des sanctions occidentales.

Pour le cabinet Capital Economics, il est « hautement probable » que le conflit en Ukraine va « accélérer le virage de la Russie vers un isolement et une autarcie », ce qui l' »empêchera de rattraper les économies les plus développées ».

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