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Peine de mort en Turquie: le risque d’un retour en arrière

Le Vif

Un possible rétablissement de la peine de mort en Turquie, évoqué par le président Recep Tayyip Erdogan pour punir les auteurs de la tentative de coup d’Etat de vendredi, soulève l’inquiétude des responsables européens.

La turquie avait aboli la peine de mort en 2004, dans le cadre des négociations d’adhésion à l’Union européenne.

Le militant d’extrême gauche Hidir Aslan est le dernier condamné à avoir été exécuté le 25 octobre 1984, quatre ans après un coup d’Etat militaire.

Large recours après 1960

Entre la fondation de la République turque en 1923 et jusqu’en 1984, plus de 400 condamnés à mort ont été exécutés par pendaison. L’application de la peine capitale a pris un relief particulier après le coup d’Etat militaire de 1960.

A cette époque, la junte avait condamné à mort plusieurs membres du pouvoir renversé. Le chef du gouvernement, Adnan Menderes et deux de ses ministres avaient été exécutés en septembre 1961 sur l’île d’Imrali (nord-ouest).

M. Erdogan a souvent qualifié d' »injustice » la condamnation à la peine capitale d’Adnan Menderes, l’un de ses modèles politiques.

Plusieurs militants de gauche, Deniz Gezmis, Yusuf Aslan et Huseyin Inan, exécutés en 1972, restent eux aussi des héros aux yeux du mouvement socialiste turc.

Une nouvelle vague d’exécutions a suivi le coup d’Etat de 1980.

Levon Ekmekjian, un Libano-arménien, a été exécuté en 1983 à Ankara, après avoir été reconnu coupable d’une attaque meurtrière contre l’aéroport de la capitale turque au nom d’une organisation arménienne.

Demande populaire

En 2002, le parlement turc avait voté l’abolition de la peine de mort en temps de paix, avec une entrée en vigueur en 2004. Un moratoire était toutefois déjà observé depuis plusieurs années.

Cette adoption avait ainsi permis de commuer la condamnation à mort, en 1999, du leader kurde Abdullah Öcalan, en une peine de prison à vie. Ce dernier, qui avait fait appel auprès de la Cour Européenne des droits de l’Homme, purge sa peine sur l’île d’Imrali.

M. Erdogan a souligné que toute décision de rétablissement de la peine de mort devrait passer le parlement.

Des milliers de partisans d’Erdogan ayant protesté contre les putschistes ces derniers jours dans les rues du pays ont plaidé pour un retour de la peine capitale.

Ce n’est pas la première fois qu’une partie de la société civile le réclame. En 2015, le meurtre d’une étudiante par trois individus, avait remis le débat sur la place publique.

Obstacle à l’entrée dans l’UE

L’Allemagne et l’UE ont prévenu que le rétablissement de la peine de mort saborderait le processus d’adhésion du pays au sein de l’Union.

« Que ce soit clair, personne ne devient un membre de l’UE en réintroduisant la peine de mort », a insisté la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.

Le Conseil de l’Europe a ajouté que cette sentence était incompatible avec la présence de la Turquie, qui a rejoint cette organisation en 1949.

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