OTAN

Explosion d’un missile en Pologne: ce que disent les Articles 4 et 5 de l’OTAN

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

La chute d’un missile, probablement de fabrication russe mais dont l’origine reste inconnue, dans un village de Pologne, près de la frontière avec l’Ukraine, provoque des tensions internationales. Il est question de faire appel à l’OTAN, dont la Pologne est membre. Les Articles 4 et 5 sont notamment évoqués: à quoi font-il référence? Explications.

En réaction à cette chute de missile en Pologne, dont l’origine est encore incertaine, il est question de faire appel à l’aide de l’OTAN, dont la Pologne est membre. « En ce moment, nous n’avons aucune preuve univoque sur qui a lancé ce missile. Une enquête est en cours. Il était très probablement de fabrication russe », a déclaré le chef de l’Etat polonais. La Russie dément qu’il lui appartient et renvoie la balle à l’Ukraine.

Une réunion d’urgence des ambassadeurs de l’Otan a lieu ce mercredi matin pour faire le point sur la situation. Il est « important que tous les faits soient établis« , a déclaré le chef de l’OTAN au sujet de l’explosion mortelle.

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La Pologne, qui partage une frontière avec l’Ukraine, envahie le 24 février par la Russie, est membre de l’OTAN et quelque 10.000 militaires américains se trouvent dans le pays. Les Articles 4 et 5 de l’OTAN sont notamment cités. Que signifient-ils et dans quels cas peuvent-ils être déclenchés ?

Article 4, celui de la consultation

Le président polonais Andrzej Duda a tenu une série d’entretiens avec des hauts responsables des pays de l’Otan, dont le chef de l’Etat américain Joe Biden, son homologue français Emmanuel Macron et le Premier ministre britannique Rishi Sunak. Il a signalé que son pays s’apprêtait à demander l’application de l’Article 4 du Traité de Washington. Ce traité est le socle de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), signé le 4 avril 1949 par les 12 Etats membres fondateurs.

L’Article 4 stipule que des consultations peuvent être organisées lorsqu’un membre de l’Alliance estime que son intégrité territoriale, l’indépendance politique ou la sécurité sont menacées. Toutes les décisions de l’OTAN sont prises par consensus, après échange de vues et consultation entre pays membres. La consultation entre les États membres est donc un processus central car il permet aux Alliés d’échanger des avis et des informations, et de mener des débats avant de parvenir à un accord et de prendre des mesures.

Concrètement, la consultation s’applique « à tous les sujets présentant un intérêt pour l’Alliance, notamment aux tâches courantes de l’OTAN, à ses objectifs élémentaires et à son rôle fondamental », explique l’OTAN. L’Article 4 prévoit que les pays membres peuvent porter à l’attention du Conseil de l’Atlantique Nord toute question concernant en particulier la sécurité d’un pays membre.

Depuis la création de l’Alliance, l’Article 4 a été invoqué à plusieurs reprises. En 2003 par exemple, où les membres s’étaient réunis suite à l’activation de l’Article 4 par la Turquie, qui se sentait menacée par le conflit irakien. L’OTAN avait alors prononcé le déclenchement d’une opération défensive appelée « Display Deterrence ». 

La Pologne examine donc la possibilité et le bien-fondé du recours à cet Article et juge très probable d’en faire usage dès ce mercredi.

Article 5, celui de la défense collective

Ce mardi soir, la possibilité d’un déclenchement de l’Article 5 de l’OTAN a également été évoquée. Tant que l’enquête n’a pas déterminé d’où proviennent les missiles, à qui ils appartiennent et si c’est accidentel ou volontaire, il est peu probable d’en faire usage.

L’Article 5 du traité de l’OTAN affirme que si un Etat membre est victime d’une attaque armée, les autres considèreront cet acte de violence comme une attaque armée dirigée contre l’ensemble des membres et prendront les mesures jugées nécessaires pour venir en aide au pays attaqué.

C’est ce qu’on appelle le « principe de la défense collective », qui est consacré dans cet Article. Il est au cœur du traité fondateur de l’OTAN. « Il reste unique et immuable, il unit les membres de l’Alliance, ceux-ci s’engageant à se protéger mutuellement, et il instaure un esprit de solidarité au sein de l’Alliance », explique l’Alliance.

L’OTAN avait invoqué l’Article 5, pour la première fois de son histoire, après les attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. L’Alliance a également déjà pris des mesures de défense collective à plusieurs reprises, notamment en réponse à la situation en Syrie et après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

« Il est important de rester calme dans notre expression »

« À ce stade et sur base des informations disponibles, il s’agirait de débris de missiles russes et de missiles ukrainiens de défense anti-aérienne qui ont touché le sol polonais », a indiqué la ministre belge de la Défense Ludivine Dedonder, confirmant que, sur base des informations disponibles actuellement, « rien n’indique néanmoins qu’il s’agisse d’une attaque délibérée sur un ou des objectifs polonais ».

« En ce qui concerne les réactions possibles de l’OTAN concernant cet incident, je rappelle que des procédures de consultation et d’aide mutuelle existent au sein de l’Alliance, et qu’il incombe en première instance au pays affecté par une menace de choisir la suite à donner. Sur base du Traité de l’OTAN, un pays peut par exemple invoquer l’Article 4 , s’il estime que ‘son intégrité territoriale, son indépendance politique ou sa sécurité sont menacées’. Si la Pologne invoque l’article 4, une concertation entre les Alliés de l’OTAN prendra place immédiatement. Des réunions sont encore prévues aujourd’hui entre pays alliés », a encore précisé la ministre de la Défense. « La situation est bien entendu suivie de près… Dans ces circonstances, il est important de rester calme dans notre expression. La Belgique continuera à soutenir l’Ukraine, son armée et sa population. Dans le même temps, nous continuons à appeler à la désescalade et à la cessation immédiate de l’invasion russe », a conclu Ludivine Dedonder.

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