Martin Schulz © Belga

Martin Schulz (SPD): « Nous voulons les États-Unis d’Europe d’ici 2025 »

Kamiel Vermeylen Journaliste Knack.be

Jeudi dernier, le président du SPD, Martin Schulz, s’est adressé aux députés de son parti. Ces derniers devaient décider de son maintien dans ses fonctions et d’une éventuelle poursuite de la Grande Coalition avec l’Union d’Angela Merkel. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne manque pas de projets ambitieux.

Schulz s’est adressé aux 600 députés sociodémocrates lors de la journée du parti. Le président du parti n’a pas hésité à présenter ses excuses pour le mauvais résultat des élections du Bundestag du 24 septembre 2017. Son parti a atteint le pire score de son histoire, avec 20,5% des voix.

Plans ambitieux

« En tant que candidat au poste de chancelier, il relevait de ma responsabilité de réaliser de meilleurs résultats. Je sais à quel point les gens étaient déçus » déclare l’ancien président du Parlement européen. Mais Schulz dit vouloir tirer des enseignements de ses erreurs et a demandé la confiance au parti, ce qui lui a valu un standing ovation.

Schulz estime qu’il est temps que la social-démocratie propose à nouveau des projets ambitieux qui puissent enthousiasmer les gens pour la politique. « Nous avons perdu un profil clair, notre parti doit à nouveau faire comprendre clairement ce que nous représentons. Et il faut aller plus loin que le niveau national. Nous devons ancrer la social-démocratie en Europe. C’est notre assurance-vie », a déclaré le président du parti, inspiré.

C’est pourquoi le SPD désire parfaire les « États-Unis d’Europe » basés sur une Constitution européenne. Les états membres actuels de l’Union européenne qui ne veulent pas oeuvrer à une telle structure fédérale doivent quitter le navire. En outre, Schulz partage l’idée du président français Emmanuel Macron de nommer un ministre européen des Finances pour la zone euro. Il est frappant que le délai avancé par Schulz corresponde presque à celui du président français, qui souhaite achever ses plans européens d’ici 2024.

Ces derniers jours, le président français a appelé Schulz plusieurs fois pour le convaincre d’entrer dans la Grande Coalition avec Angela Merkel (CDU). Il y a trois jours, Schulz a déclaré au Handelsblatt qu’il souhaite formuler une réponse positive aux propositions de Macron. En outre, le Premier ministre grec Alexis Tsipras avait également appelé le président de parti sociodémocrate à entrer dans la coalition noire et rouge.

Pour l’instant, on ignore si cette coalition verra le jour. Aujourd’hui, les membres du parti ont décidé si le SPD pourra effectivement démarrer des entretiens préliminaires avec le CDU/CSU d’Angela Merkel. Au sein du parti, l’opposition est plus forte qu’avant. Les jeunes socialistes allemands, appelés JuSos, ont déposé une pétition parce qu’ils craignent que le parti perde encore davantage son identité dans la nouvelle Grande Coalition. Les JuSos sont uniquement prêts à apporter un soutien de bienveillance au gouvernement de minorité. Cependant, l’Union ne veut pas en entendre parler.

Très irréaliste

Reste à voir évidemment si le SPD sera capable de mettre ses plans ambitieux en pratique. En cas de création d’une grande coalition, il doit d’abord parvenir à convaincre son partenaire de coalition de ses propositions. Après le discours de la Sorbonne de Macron, la chancelière Merkel s’est montrée prête à réaliser certaines parties de ses projets. Mais au sein de son parti, Merkel rencontre la résistance d’une aile moins europhile avec notamment le ministre des Finances Wolfgang Schäuble. En outre, son partenaire de cartel bavarois du président Horst Seehofer est encore moins enclin à transférer des compétences vers le niveau européen.

Mais si on trouve tout de même un accord au niveau national, il faut réaliser les projets de Schulz au niveau européen. « Une affaire impossible », déclare le professeur en politique européenne à l’Université d’Anvers Peter Bursens. « Bien que l’article 7 permette de supprimer le droit de vote aux états membres, il n’y a pas de clauses dans le Traité de Lisbonne pour expulser les états membres récalcitrants de l’Union européenne. En outre, la proposition de Schulz requiert une modification du traité et il suffit qu’un état membre vote contre pour que tout tombe à l’eau. C’est une stratégie très particulière. À moins qu’il vise un tout nouveau traité, ce qui serait vraiment inédit. »

En septembre, le président de la Commission européenne Jean Claude-Juncker (EPP) a déclaré lors de son State of the Union qu’il n’était guère enthousiaste à l’idée d’une Union européenne à différentes vitesses. En outre, Juncker souhaite supprimer les différentes vitesses qui composent déjà l’Union aujourd’hui, pensez à la zone euro et Schengen en mettant tous les états membres et les candidats états-membres sous le même toit de l’Union. C’est contraire à l’idée d’expulser les états membres récalcitrants de l’Union européenne.

« Schulz réalise de très grands projets. Non seulement sur le plan politique, mais aussi institutionnel. Il va encore plus loin que Macron et se place plutôt sur la ligne de Guy Verhofstadt. Il n’y a que sa proposition de nommer un ministre des Finances pour la zone euro qui est sur la même ligne que Macron et les propositions récentes du Parlement européen. Il voudra se positionner là-dessus, même si on ignore ce que cela peut lui apporter », affirme Bursens.

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