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L’état d’Alabama vote la loi la plus répressive sur l’avortement aux USA

Le Vif

Les républicains du Sud des Etats-Unis ont lancé une grande offensive contre le droit à l’avortement avec l’objectif affiché de faire revenir le sujet à la Cour suprême, à l’image de l’Alabama qui a adopté une loi très restrictive sur les IVG, provoquant un tollé chez les démocrates.

Le texte, voté mardi soir par le Sénat de l’Alabama à une large majorité, est le plus répressif du pays. Il interdit la quasi-totalité des interruptions volontaires de grossesse, même en cas d’inceste ou de viol et prévoit une peine de 10 à 99 ans de prison pour les médecins pratiquant un avortement, sauf en cas d’urgence vitale pour la mère ou d' »anomalie létale » du foetus.

Il a été ratifié mercredi par la gouverneure, Kay Ivey, qui a notamment expliqué dans un communiqué que « toute vie est un cadeau sacré de Dieu ».

Cette mesure doit prendre en effet dans six mois.

Côté démocrate, la majorité des candidats à l’investiture pour la présidentielle de 2020 ont dénoncé une atteinte au droit des femmes à disposer de leur corps, ainsi qu’une attaque contre l’arrêt de la Cour suprême « Roe v. Wade », qui a légalisé l’avortement en 1973 dans tous les Etats-Unis.

Joe Biden, l’ancien vice-président de Barack Obama, a affirmé que le choix d’avorter « devait rester entre une femme et son médecin ».

« Les femmes de ce pays ont peur, elles sont en colère », a pour sa part assuré la sénatrice Elizabeth Warren.

« Aucune de nous ne devrait accepter un avenir dans lequel nos filles et nos petites-filles auront moins de droits que nous n’en avons eus », a pour sa part réagi l’ex-candidate à la présidentielle de 2016, Hillary Clinton.

Mais chaque camp se prépare à une âpre bataille judiciaire, tous les recours devant être épuisés avant que la Cour suprême se saisisse éventuellement de l’affaire.

La puissante organisation de défense des libertés ACLU et l’organisation du Planning familial ont déjà annoncé qu’elles allaient saisir la justice pour empêcher l’application du texte.

« Nos propres lois »

Faire monter le dossier à la Cour suprême à Washington est l’objectif avoué des opposants à l’avortement, qui veulent convaincre les sages de Washington de revenir sur « Roe v. Wade ».

La droite religieuse, qui a soutenu la campagne de Donald Trump, veut profiter de la nomination par le président de deux juges opposés à l’avortement, qui ont ancré le temple du droit américain dans le camp conservateur.

« Mon but (…) est de faire casser Roe v. Wade et que cette décision revienne aux Etats afin que nous puissions faire nos propres lois, avec des amendements, qui règlent ces questions », a affirmé l’élue républicaine de l’Alabama Terri Collins, à l’origine du texte, après son adoption mardi soir.

« Beaucoup d’Américains, moi comprise, n’étaient pas d’accord quand l’arrêt Roe v. Wade a été rendu en 1973 », a déclaré la gouverneure de l’Alabama en promulguant la loi.

La Géorgie a adopté début mai une loi interdisant l’avortement dès que les battements du coeur du foetus sont détectables, soit environ à la sixième semaine de grossesse. De nombreuses femmes n’ont alors pas encore conscience d’être enceintes, soulignent les détracteurs de ces législations dites « battement de coeur ».

Des textes similaires adoptés dans le Kentucky et le Mississippi ont été bloqués par des tribunaux et il est probable que la loi de Géorgie connaisse le même sort.

L’Ohio, le Missouri et le Tennessee sont aussi en passe de voter des lois restrictives sur l’IVG.

Depuis le début de l’année, plus de la moitié des 50 Etats américains ont mis en place des règles limitant l’accès à l’avortement, selon l’Institut Guttmacher qui défend le droit des femmes à l’IVG.

Pour les républicains, la Cour suprême sera forcée de se saisir du dossier si les tribunaux parviennent à des conclusions différentes selon les Etats.

Mais même dominée par les conservateurs, la Cour a récemment rejeté des recours de deux Etats républicains – la Louisiane et le Kansas – liés à l’IVG, un sujet très clivant dans la société américaine. Selon un sondage du Centre de recherches Pew datant de 2018, 58% des Américains estiment que l’avortement devrait être légal, contre 37% à souhaiter son interdiction.

Plusieurs de ses neuf juges ont récemment redit leur volonté de ne pas revenir sur la jurisprudence de la haute cour. Mais l’histoire montre que la Cour suprême peut énoncer puis défaire certains grands principes de droit, en fonction des époques.

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