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« La pandémie de coronavirus aurait pu être évitée »

Stagiaire Le Vif

La pandémie a tué plus de 3,3 millions de personnes et en a infecté plus de 160 millions. Un groupe d’experts indépendants a rendu son verdict ce mercredi : cette épidémie mondiale de coronavirus aurait pu être évitée.

Le monde n’est pas prêt pour une nouvelle pandémie. Voici le constat d’un rapport d’experts indépendants déposé ce mercredi. Ils dénoncent un « cocktail toxique » de mauvais choix stratégiques, d’un manque de volonté de s’attaquer aux inégalités et d’un système de la communauté internationale manquant de coordination.

Plus de rapidité

Les experts pointent du doigt un système d’alerte trop lent. « Trop de temps » aurait été perdu entre décembre 2019, moment de la prise de connaissance du foyer épidémique de pneumonie d’origine inconnue, et le 30 janvier 2020, date de la déclaration par l’OMS d’une urgence de santé publique de portée internationale. C’est le plus haut niveau d’alarme de l’organisation. Il a ensuite fallu attendre le 11 mars pour que Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’OMS, qualifie la situation de pandémie.

Un nouveau système mondial de surveillance

Pour Michel Kazatchkine, ancien directeur du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, ce retard serait lié à la vétusté du système d’alerte de l’OMS. « Dans le cadre du règlement sanitaire international, un pays communique des informations à l’OMS, l’OMS demande des informations complémentaires, il y a un circuit un peu bureaucratique qui comprend le bureau de l’OMS dans le pays, l’OMS à Genève, le gouvernement du pays » confie l’ancien directeur dans un entretien avec l’AFP. Pour y remédier, le rapport propose la mise en place d’un nouveau système mondial de surveillance basé sur la « transparence totale ». Ainsi, l’OMS pourrait, sans l’approbation des gouvernements, publier toutes les informations dont elle dispose sur les épidémies qui pourrait engendrer une pandémie. Le pouvoir d’investigation de l’OMS serait donc étendu.

Envoyer des vaccins aux pays en difficulté

Aujourd’hui, les « pays riches possèdent 4,3 milliards de doses alors qu’ils représentent 1,16 milliard en termes de population », indique Michel Kazatchkine à l’AFP. Les experts préconisent qu’ils s’organisent pour envoyer des vaccins au pays à ressources limitées avec le dispositif Covax. Et ce, dès qu’ils auront atteint une couverture vaccinale optimale pour leur population. Ils demandent la livraison d’un milliard de doses vaccinales d’ici septembre 2021 et un second milliard d’ici la moitié de l’année prochaine. L’objectif est de développer un accès équitable aux vaccins et aux autres technologies contre le coronavirus.

Un nouveau Conseil mondial de lutte contre les menaces sanitaires

Le panel recommande également le lancement d’un Conseil mondial de lutte contre les menaces sanitaire pour réunir les chefs d’État et de gouvernement. Chacun de ces derniers serait examiné par ses pairs sur sa préparation à une pandémie. Ce Conseil mondial des menaces sanitaires aura aussi sa charge le financement d’un fonds doté de 5 à 10 milliards de dollars par an pour les besoins en cas de pandémie. Tous les États devront l’alimenter pendant 10 à 15 ans.

Promouvoir les licences volontaires

Le propriétaire d’un brevet peut refuser de céder une licence sur son invention. Sauf en cas de santé publique, non-exploitation d’une invention, ou d’invention dont l’exploitation dépend d’une autre invention. En pleine épidémie mondiale, les 13 experts misent sur la collaboration, l’entraide et le partage de compétences. Leur rapport demande à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et à l’OMS de concerter les pays producteurs de vaccin et les producteurs privés pour négocier un système de licence volontaire dans un délai de trois mois. En cas de refus du producteur, l’OMC serait chargée d’imposer la levée des brevets et donc une suspension de la propriété intellectuelle. La Suisse est opposée à cette exception.

Qui sont ces experts ?

Le 9 juillet 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) annonçait la création d’un panel indépendant d’experts pour établir « une évaluation honnête » de la gestion de la pandémie de coronavirus et permettre de « prévenir de telles tragédies à l’avenir ». Constitué de 13 experts, le panel indépendant a consacré les huit derniers mois à examiner la propagation de la pandémie et les mesures prises par l’agence sanitaire et les États pour y faire face.

Les objectifs du panel d’experts

Ce panel indépendant pour la préparation et la réponse aux pandémies est coprésidé par Helen Clark, ancienne Première ministre de Nouvelle-Zélande et Ellen Johnson Sirleaf, l’ancienne présidente du Liberia et Nobel de la paix.

« L’objectif du panel est d’examiner l’expérience acquise et les enseignements tirés de la réponse sanitaire internationale coordonnée par l’OMS » indique le site officiel de l’institution. Ils espèrent s’inspirer de l’expérience et des acquis des crises passées, et apprendre à gérer au mieux les prochaines crises sanitaires. Dans son annonce, le Directeur général de l’OMS invitait chaque état à être transparent et à tout montrer aux experts « comme un livre ouvert » pour « comprendre honnêtement et sincèrement ».

Anaelle Lucina

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