Vladimir Poutine © Belga

Incrimination de l’Occident, nucléaire, traîtres…: ce qu’il faut retenir du discours de Poutine

Vladimir Poutine a pris la parole ce mardi à l’occasion de son discours annuel à la nation. Il y a, entre autres, abordé l’invasion de l’Ukraine. Le Vif fait le point.

Ce mardi, à midi heure locale (dix heures heure belge), Vladimir Poutine a pris la parole devant l’élite politique ainsi que des militaires qui ont combattu en Ukraine. Outre l’invasion de l’Ukraine qu’il compte poursuivre, il a également abordé les sanctions occidentales et annoncé la suspension de la participation russe à l’accord sur le désarmement nucléaire.

Poursuite de l’offensive

Le président russe Vladimir Poutine a affirmé qu’il restait déterminé, un an après le début de son offensive, à la poursuivre, alors que son armée est à la peine depuis des mois sur le champ de bataille, en dépit de la mobilisation de centaines de milliers de réservistes.

« Pour assurer la sécurité de notre pays, pour éliminer les menaces venues d’un régime néonazi existant en Ukraine depuis le coup d’Etat de 2014, il a été décidé de mener une opération militaire spéciale. Et nous allons régler pas à pas, soigneusement et méthodiquement, les objectifs qui se posent devant nous », a-t-il martelé.

Face à l’élite politique du pays et des militaires ayant combattu en Ukraine, il a aussi remercié « tout le peuple russe pour son courage et sa détermination ».

Incrimination de l’Occident

Vladimir Poutine a poursuivi en accusant l’Occident d’utiliser le conflit en Ukraine pour « en finir » avec la Russie, estimant que les Occidentaux portaient « la responsabilité » de l’escalade. « Les élites de l’Occident ne cachent pas leur objectif: infliger une défaite stratégique à la Russie, c’est-à-dire en finir avec nous une bonne fois pour toutes », a-t-il martelé, dans une allocution intervenant trois jours avant le premier anniversaire de l’offensive russe.

« La responsabilité de l’escalade dans le conflit ukrainien et ses victimes (…) repose totalement sur les élites occidentales« , a encore dit le président russe, répétant sa thèse selon laquelle l’Occident appuie des forces néonazies en Ukraine pour y consolider un Etat antirusse. 

L’échec des sanctions

Evoquant les sanctions internationales qui frappent la Russie, M. Poutine a estimé que les Occidentaux « se punissent eux-mêmes. Cela a entraîné dans leurs pays des pertes d’emploi. Ils rejettent la faute sur la Russie car elle a envahi l’Ukraine ». Et d’ajouter : « Ils avaient pour objectif de faire souffrir le peuple russe. Mais ils ne sont arrivés à rien et n’arriveront à rien« , alors que l’économie russe a résisté mieux qu’anticipé par les experts. « Nous avons assuré la stabilité de la situation économique, protégé les citoyens », a-t-il noté, estimant que l’Occident avait échoué à « déstabiliser notre société ».

Selon lui, la baisse du PIB en 2022 de seulement 2,1% est un succès, alors « que l’on nous prédisait une baisse de 20%. » Il a aussi assuré que l’inflation allait bientôt se stabiliser près de son objectif de 4% annuel. Vladimir Poutine a toutefois aussi appelé les entrepreneurs russes à « se souvenir » du « chaos » économique des années 1990, après la chute de l’URSS.

Il a demandé à « ne pas répéter les erreurs du passé » et à ne pas « détruire notre propre économie » comme lorsque la Russie s’était « particulièrement » reposée sur des partenaires occidentaux, « un danger » à ses yeux.

« Maintenant, tout change, et très rapidement. C’est un moment non seulement de défis mais aussi d’opportunités », a fait valoir M. Poutine, se réjouissant de « l’indépendance » grandissante de l’économie russe vis-à-vis des marchés étrangers. « Chacun doit le comprendre : les sources de bien-être, de l’avenir, doivent être ici, dans le pays natal, la Russie », a-t-il souligné. « Investissez en Russie ! », a-t-il encore dit. « Ainsi, nous créerons un pays qui ne se ferme pas au monde mais utilise tous ses avantages », a-t-il ajouté.

Suspension de la participation russe à l’accord sur le désarmement nucléaire

Le président Vladimir Poutine a annoncé par ailleurs que la Russie suspendait sa participation à l’accord New Start sur le désarmement nucléaire et a menacé de réaliser de nouveaux tests nucléaires si les Etats-Unis en font d’abord.

Signé en 2010, ce traité est le dernier accord bilatéral du genre liant les deux puissances. Il limite les arsenaux des deux pays à un maximum de 1.550 ogives déployées de part et d’autre, soit une réduction de près de 30% par rapport à la limite précédente fixée en 2002. La Russie avait déjà annoncé début août suspendre les inspections américaines prévues sur ses sites militaires dans le cadre de l’accord, assurant agir en réponse aux entraves américaines aux inspections russes aux Etats-Unis. « Ils veulent nous infliger une défaite stratégique, s’en prennent à nos sites nucléaires, c’est pourquoi je suis dans l’obligation d’annoncer que la Russie suspend sa participation au traité (New) Start », a déclaré le président russe dans un discours-fleuve fortement hostile aux Occidentaux. 

Il a notamment accusé ces derniers d’avoir aidé l’Ukraine à moderniser des drones pour les envoyer sur des objectifs stratégiques, une référence aux récentes explosions sur la base de bombardiers stratégiques d’Engels, à quelque 500 kilomètres de la frontière ukrainienne. 

M. Poutine a aussi appelé les autorités russes à se tenir « prêtes à des essais d’armes nucléaires » si Washington en effectuait en premier. « Personne ne doit se nourrir d’illusions, la parité stratégique pourrait être altérée », a martelé le président russe.

Il a en outre qualifié de « théâtre de l’absurde » le fait que l’Otan ait réclamé que la Russie applique New Start et autorise « l’accès aux inspections des sites nucléaires militaires » russes. « Via les représentants de l’Otan, on nous adresse des ultimatums : +Vous, la Russie, faites tout ce sur quoi on s’est mis d’accord, notamment New Start, et nous, nous ferons ce que bon nous semble« , a accusé le maître du Kremlin.

M. Poutine a ainsi suggéré que l’Otan rejoigne New Start pour rendre ce traité équitable, « car, au sein de l’Otan, les Etats-Unis ne sont pas la seule puissance nucléaire ». « La France et la Grande-Bretagne ont aussi des arsenaux nucléaires, elles les perfectionnent, les modernisent et ils sont dirigés contre nous », a-t-il encore dit.

Les traîtres à la nation

Vladimir Poutine a aussi appelé à poursuivre les « traîtres » en Russie, en pleine répression de toute voix critique du Kremlin et du conflit en Ukraine, à coup d’arrestations et de lourdes peines de prison.

« Ceux qui ont choisi de trahir la Russie doivent être tenus responsables devant la loi« , a déclaré le président russe, lors d’un discours à la nation, avant d’assurer qu’il ne s’agissait pas pour autant d’une « chasse aux sorcières ».

Aucune voix critique du Kremlin n’est tolérée en Russie. Depuis le début de l’assaut contre l’Ukraine, toute critique de l’armée est passible de 15 ans de prison, et les rares figures de l’opposition à ne pas s’être exilées ont été incarcérées, à l’instar d’Ilia Iachine et de Vladimir Kara-Mourza. Mais de nombreux anonymes ont également été arrêtés pour avoir pris position contre le Kremlin. Des dizaines de milliers de Russes, peut-être des centaines de milliers, se sont en outre exilés depuis un an, craignant la répression ou d’être mobilisés sur le front

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