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A la recherche d’au moins huit disparus dans les décombres d’immeubles effondrés à Marseille

Le Vif

Sous d’imposants spots lumineux, les marins- pompiers de Marseille ont fouillé toute la nuit les gravats des trois immeubles du centre-ville tombés comme un château de cartes lundi, à la recherche des huit personnes, au moins, portées disparues. Mais l’heure n’est pas à l’optimisme mardi à l’aube, 24 heures après le drame, alors que la polémique monte sur l’habitat vétuste dans la cité phocéenne.

« Peu optimiste face à la situation », le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, arrivé sur place lundi soir, a précisé que huit personnes étaient « susceptibles » de se trouver dans l’immeuble du 65 rue d’Aubagne quand celui-ci s’est effondré, avec le bâtiment mitoyen du 63, vers 09h00 lundi. Huit victimes potentielles donc, voire dix, avec ces « deux passants susceptibles d’avoir été emportés dans l’effondrement », a-t-il ajouté.

« Tant qu’il y aura le moindre doute, nous rechercherons », a assuré le ministre, sans cacher son « inquiétude »: il y a « peu de chance que l’on puisse trouver des poches de survie », a souligné M. Castaner, l’effondrement d’un troisième immeuble, au 67 de la rue, en fin d’après-midi, ayant écrasé les gravats du matin.

Parmi les personnes disparues figureraient notamment une femme, qui n’est pas allée chercher sa fille à l’école, et une autre femme, « qui ne sortait jamais de chez elle », avait indiqué auparavant le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, évoquant lui le chiffre d’au moins sept habitants manquant à l’appel.

A la recherche d'au moins huit disparus dans les décombres d'immeubles effondrés à Marseille
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« Peur de rester prisonnière »

Survivante de la tragédie, Sophie, 25 ans, étudiante en Master en philosophie, avait elle quitté son appartement du 65 rue d’Aubagne dimanche soir, pour aller dormir chez ses parents: « Depuis plusieurs jours, les portes de plusieurs appartements ne fermaient plus, ou à peine, dont la mienne. Et j’ai eu peur de me retrouver prisonnière chez moi, la porte bloquée », a-t-elle raconté à l’AFP, dans un long témoignage, précisant avoir porté plainte dès lundi auprès de la police judiciaire, saisie de l’enquête par le parquet.

« Ce qui compte, c’est qu’on trouve le moins de morts possible, mais nous pensons qu’il y en aura », avait prévenu dans l’après-midi le maire LR de Marseille, Jean-Claude Gaudin, alors que le bilan officiel n’était toujours que de deux blessés légers, deux passants.

A la recherche d'au moins huit disparus dans les décombres d'immeubles effondrés à Marseille
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Pour cette « course contre la montre », comme l’avait qualifiée dans l’après-midi le ministre du Logement Julien Denormandie, près de 100 marins-pompiers et 33 véhicules ont été déployés dans cette rue commerçante du quartier populaire de Noailles, à deux pas du Vieux-Port et de la Canebière. Et les recherches pourraient durer plusieurs jours.

Casques de protection sur la tête, aidés d’une pelleteuse, ces marins-pompiers ont travaillé toute la nuit, face à un amas de gravats blanchâtres de 4 à 5 mètres de haut sur 10 à 15 mètres de profondeur. Tout ce qui reste de ces trois immeubles de 4 à 5 étages.

L’un des deux bâtiments, au 63 de la rue, était « fermé et muré », selon la mairie, qui l’avait racheté après avoir pris un arrêté de péril en 2008. Mais il était « entièrement sécurisé », a martelé l’adjointe au maire chargée du logement, Arlette Fructus.

A la recherche d'au moins huit disparus dans les décombres d'immeubles effondrés à Marseille
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Les maisons des pauvres

Au numéro 65, dans l’autre immeuble, 9 appartements sur 10 (BIEN 10) étaient en revanche habités, au-dessus d’un commerce vacant au rez-de-chaussée, selon les pompiers. En copropriété, il avait fait l’objet le 18 octobre « d’une expertise des services compétents qui avait donné lieu à la réalisation de travaux de confortement permettant la réintégration des occupants », a assuré la mairie.

Le troisième immeuble, au numéro 67, abandonné et muré depuis l’été 2012, s’est lui partiellement effondré dans la soirée. « On avait décidé d’intervenir avec la pelleteuse pour enlever la partie fissurée. (…) Puis tout est tombé d’un coup », a expliqué l’amiral Charles-Henri Garié, qui commande les marins-pompiers de Marseille.

« Ce dramatique accident pourrait être dû aux fortes pluies qui se sont abattues sur Marseille ces derniers jours », selon une hypothèse avancée par la mairie, qui a dû reloger 100 personnes évacuées dans les immeubles à proximité.

Mais plusieurs représentants de l’opposition ont fait le lien avec l’ampleur du problème du logement indigne à Marseille, notamment dans le centre. « Derrière la carte postale idyllique, on mesure une fois de trop les échecs de la politique de l’habitat et du centre-ville », a déclaré la sénatrice PS Samia Ghali.

« Ce sont les maisons des pauvres qui tombent et ce n’est pas un hasard », a tonné le chef de file des Insoumis et député du secteur Jean-Luc Mélenchon, regrettant « une drôle d’odeur de désinvolture et d’indifférence à la pauvreté ».

La mairie a engagé depuis 2011 un vaste plan de requalification du centre-ville, mais sans pouvoir véritablement remédier au problème. La cité phocéenne est particulièrement concernée: selon un rapport remis au gouvernement en 2015, le logement indigne menace la santé ou la sécurité de « 100.000 habitants » de la ville.

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