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Egypte: Mohamed Morsi défie le tribunal

Le Vif

Le président égyptien déchu, Mohamed Morsi, a défié lundi le tribunal où il est jugé dès l’ouverture de son procès. Il doit y répondre d' »incitation au meurtre » d’au moins 7 manifestants.

« Je suis le président de la République ». C’est ce qu’a déclaré d’emblée Mohamed Morsi à l’ouverture, lundi 4 novembre, sous haute sécurité de son procès au Caire. Le chef d’État islamiste pourtant destitué a martelé qu’il restait le président légitime de l’Egypte.

Quatre mois après sa destitution par l’armée, l’ancien président a appelé à « juger les leaders du coup d’État militaire » et qualifié d' »illégal » le tribunal devant lequel il doit répondre, avec 14 co-accusés, d' »incitation au meurtre » d’au moins 7 manifestants devant le palais présidentiel le 5 décembre 2012. Sept autres accusés, toujours en fuite, n’étaient pas présents.

Première apparition publique depuis juillet

Détenu au secret depuis son renversement le 3 juillet, le seul chef d’État élu démocratiquement en Egypte a fait sa première apparition publique dans une salle d’audience d’où caméras et téléphones étaient bannis. Il est entré, vêtu d’un costume bleu sombre, sous les applaudissements et aux cris de « A bas le régime militaire! » de deux dirigeants des Frères musulmans, Essam al-Erian et Mohammed al-Beltagui, présents à ses côtés dans le box grillagé des accusés.

« C’était un coup d’État militaire, les leaders de ce putsch devraient être jugés » pour « trahison » et « crime », a lancé aux juges le président déchu manifestement en bonne santé, selon un journaliste de l’AFP présent dans la salle d’audience, au coeur de l’Académie de police dans l’est du Caire.

Les partisans de M. Morsi, qui encourt la peine de mort, avaient prévenu qu’ils ne reconnaissaient pas l’autorité des juges ni la légitimité d’un procès qu’ils qualifient de « politique ». Ses avocats ont annoncé qu’ils n’assisteraient au procès que « pour surveiller la procédure judiciaire ».

Ce procès est un « test » pour évaluer la volonté des autorités intérimaires de respecter les droits de l’Homme, a prévenu Amnesty International, estimant que si M. Morsi n’avait pas droit à un procès juste « alors il (serait) permis de soulever des questions quant aux motivations cachées du procès ».

Le procès ajourné au 8 janvier prochain

Après une audience suspendue à deux reprises, le tribunal a annoncé l’ajournement du procès au 8 janvier, une procédure habituelle en Egypte, la première audience se limitant à l’enregistrement des accusés et de leur défense et au dépôt de leurs doléances. Mohamed Morsi a ensuite été transféré à la prison Borg al-Arab d’Alexandrie. Au même moment, la télévision officielle a diffusé des images de l’arrivée de l’ex-président au tribunal ainsi que du président destitué dans le box grillagé tandis que ses co-accusés, vêtus de blanc, tournaient le dos à la cour.
Ses partisans se sont rassemblés en plusieurs endroits du Caire, où ont été déployés pour l’occasion 20 000 policiers et soldats. La mégalopole de 20 millions d’habitants est déjà quadrillée depuis le 3 juillet par les chars de l’armée et d’innombrables barrages de police.

Plusieurs affrontements

En milieu de journée, des accrochages limités ont eu lieu devant la Cour de cassation dans le centre du Caire, partisans et opposants de M. Morsi s’échangeant des jets de pierre. La police a tiré des gaz lacrymogènes pour les disperser, selon un correspondant de l’AFP. Plusieurs places du Caire étaient également verrouillées par les forces de l’ordre. « Le procès de M. Morsi est une mascarade, ces criminels sont en train de juger le seul président légitime » du pays, a lancé un manifestant à l’AFP, Ibrahim Abdel Samad.

À l’issue de ce procès sous tension, l’Alliance contre le coup d’État, coalition pro-Morsi chapeautée par les Frères musulmans, a appelé à de nouvelles manifestations mardi face au pouvoir installé par l’armée qui réprime dans le sang les défilés pro-Morsi depuis le 14 août.

Alors que les attaques contre les forces de l’ordre se sont multipliées depuis le 3 juillet, un officier de l’armée a été tué lundi par balle à Ismaïliya, sur le canal de Suez, où deux policiers avaient été tués dimanche soir, selon des responsables de la sécurité.

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