© REUTERS//Mike Segar

DSK démissionne de son poste de directeur du FMI

Accusé d’agression sexuelle, Dominique Strauss-Kahn démissionne de son poste de directeur du Fonds monétaire international.

« Dominique Strauss-Kahn a informé le Fonds monétaire international (FMI) de son intention de démissionner de son poste de directeur général avec effet immédiat », a indiqué l’institution de Washington dans un communiqué.

Le FMI a joint une lettre dans laquelle M. Strauss-Kahn explique ses raisons. »C’est avec une infinie tristesse que je me sens contraint aujourd’hui de présenter au conseil d’administration ma démission de mon poste de directeur général du FMI », a-t-il écrit dans ce courrier.

« Je tiens à dire que je nie avec la plus grande fermeté possible toutes les allégations qui ont été faites contre moi. Je veux protéger cette institution que j’ai servie avec honneur et dévouement, et en particulier, je veux consacrer toute ma force, tout mon temps, et toute énergie à prouver mon innocence », a-t-il ajouté.

L’inculpation pour agression sexuelle de Dominique Strauss-Kahn aux Etats-Unis a lancé plus tôt que prévu la bataille pour sa succession à la tête du FMI. Si le fonds a toujours été dirigé par un Européen, cette tradition est de plus en plus contestée dans les pays émergents, dont l’importance pour l’économie mondiale n’a cessé de croître.

Face à la crise de la dette qui frappe les plus fragiles d’entre eux, Les Européens veulent à tout prix garder le contrôle du FMI dont le rôle s’est avéré crucial depuis un an et demi. Malgré les déboires de DSK, c’est une compatriote, la ministre de l’Economie Christine Lagarde qui rassemble le plus de suffrages sur le Vieux continent. Elle-même évoque régulièrement son attrait pour les Etats-Unis et elle est très appréciée dans les milieux financiers. Son premier handicap, c’est que la France a déjà fourni 4 des 11 directeurs du FMI depuis 1946, occupant le poste pendant 34 ans sur 65. Surtout, elle n’est pas elle-même à l’abri de démêlés judiciaires: un procureur français l’a récemment menacée d’une enquête dans un dossier lié à l’ex-homme d’affaires Bernard Tapie.

Strauss-Kahn a marqué l’histoire du FMI, pour le meilleur et le pire

L’histoire retiendra probablement les images d’un puissant de ce monde entouré de deux policiers à la sortie d’un commissariat. Depuis sa prise de fonctions en novembre 2007, M. Strauss-Kahn, 62 ans, n’a pourtant pas ménagé sa peine pour ce qu’il pensait être le bien de l’économie mondiale.

Arrivé alors dans une institution qui s’interrogeait sur son avenir, et que beaucoup dénonçaient comme inutile et néfaste, il eut pour première tâche de remotiver ses troupes, tout en menant une restructuration.

Il laisse à son successeur un FMI complètement rajeuni, puissant, et de nouveau craint. « Le FMI est clairement devenu l’institution internationale la plus importante aujourd’hui », affirme à l’AFP l’économiste américain Colin Bradford.

Sur la scène diplomatique et financière, M. Strauss-Kahn a donné sa pleine mesure d’économiste curieux intellectuellement et ouvert à toutes les audaces, doublé d’une habileté politique qui lui a attiré des éloges venus du monde entier.

« La crise financière a donné au Fonds une occasion de commencer à réaffirmer sa place dans le monde, et M. Strauss-Kahn a saisi cette occasion », écrivait mardi le directeur général du fonds obligataire Pimco, Mohamed El-Erian, un ancien économiste du FMI.

En janvier 2008, alors que cette crise était décrite comme bénigne par les gouvernements, il appelait les grandes économies de la planète à mettre en oeuvre des plans de relance, brisant la tradition du poste.

M. Strauss-Kahn, voyageur infatigable, aura oeuvré sans relâche pour diversifier les points de vue au sein d’une institution emblématique du capitalisme occidental. Au point de déclarer, en avril 2011, la mort du « consensus de Washington », cet ensemble de doctrines libérales.

Parmi les pères fondateurs de l’euro, il fut aussi en première ligne quand l’union monétaire était menacée par la crise de la dette publique, militant pour la solidarité entre gouvernements. Son rêve d’une autorité budgétaire européenne qui organiserait cette solidarité sur le long terme risque aujourd’hui de ne pas se réaliser.

Son style plaisait non seulement aux ministres des Finances et banquiers centraux, mais aussi aux électeurs français. Dès 2009, ils le désignaient dans les sondages comme favori de l’élection présidentielle du printemps 2012. Cette ambition a été brisée net.

L’héritage de « DSK » devrait cependant laisser une trace indélébile. Tous ceux qui ont applaudi son discours de « protection des plus vulnérables » et de lutte contre les inégalités tolèreraient mal de son successeur un retour aux discours anciens de l' »ajustement structurel ».

Laura Raim avec Belga

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