Les époux Balkany. © Belga

« Corruption », fraude fiscale et montages exotiques: Patrick Balkany seul face à ses juges

Le Vif

Le procès pour fraude fiscale et blanchiment de Patrick et Isabelle Balkany s’est ouvert lundi à Paris en présence du maire LR de Levallois-Perret, mais sa tenue restait incertaine en l’absence de son épouse Isabelle, hospitalisée depuis début mai après avoir ingéré des médicaments.

Isabelle Balkany, 71 ans, « a fait une tentative de suicide il y a quelques jours », « elle a craqué, comme on dit », a déclaré son avocat Pierre-Olivier Sur en demandant d’emblée le report du procès. « Elle ne viendra pas à l’audience aujourd’hui car elle en est incapable ».

La première adjointe de Levallois « est pour le moment dans une clinique psychiatrique », « elle est incapable de marcher seule » et « d’un point de vue psychologique elle est très mal », a-t-il ajouté. Dans une lettre lue à l’audience, sa cliente évoque « le choc émotionnel provoqué par une médiatisation outrancière et dévoyée » de l’affaire.

Patrick Balkany, 70 ans, est arrivé sans dire un mot, escorté par ses avocats sous une nuée de caméras et dans le crépitement des flashs.

En l’absence de son épouse mais aussi des quatre autres prévenus, dont leur fils Alexandre, l’élu en costume bleu marine a pris place seul au premier rang d’une salle comble.

Ses avocats demandent également le renvoi du procès, théoriquement prévu pour six semaines. Patrick Balkany « a envie d’être auprès de sa femme », « c’est lui qui la découvre inanimée, qui la croit morte », a plaidé son avocat Eric Dupond-Moretti.

Le couple encourt jusqu’à dix ans de prison et surtout des peines d’inéligibilité.

Les juges d’instruction avaient débuté leur enquête en 2013 après des révélations de Didier Schuller, un ancien allié du couple.

Les Balkany sont accusés de « blanchiment à grande échelle » entre 2007 et 2014: d’avoir dissimulé au fisc des revenus et un patrimoine « occultes » à hauteur « au minimum » de 13 millions d’euros, en particulier deux propriétés cachées derrière d’exotiques montages financiers.

La première, la villa Pamplemousse, acquise en 1997 par une société constituée au Liechtenstein par une fiduciaire suisse, est sise à Saint-Martin, aux Antilles.

Isabelle Balkany a fini par reconnaître qu’elle en était propriétaire, expliquant l’avoir achetée avec l’argent d’un héritage. Son époux en est officiellement bénéficiaire depuis 2004.

La seconde propriété, la villa Dar Gyucy de Marrakech, est détenue depuis 2010 par une SCI marocaine propriété d’une société panaméenne, Hayridge. Cette dernière est au nom de Jean-Pierre Aubry, l’homme de confiance de Patrick Balkany à Levallois. M. Aubry et l’avocat Arnaud Claude devront répondre de leur « rôle central » dans le montage financer autour du riad.

« Dessous de table »

Les Balkany, habitués des lieux, ont constamment nié en être propriétaires. Mais les juges sont formels: ils sont les « seuls bénéficiaires » du riad, où des peignoirs brodés aux initiales « PB » ont été retrouvés. Leur fils Alexandre est jugé pour avoir souscrit deux baux de location fictifs, permettant à ses parents d’affirmer qu’ils ne possédaient pas la villa.

Les enquêteurs ont fini par établir que le prix de vente officiel du riad, 2,75 millions d’euros, avait été payé par l’homme d’affaires saoudien Mohamed Al Jaber au moment où celui-ci négociait un super-projet immobilier à Levallois. Le promoteur est jugé pour la « corruption active » du maire.

Par ailleurs, 2,5 millions d’euros de « dessous de table » ont été réglés via le compte singapourien d’une autre société panaméenne. Cet argent provient selon les enquêteurs d’une commission versée à Patrick Balkany par un industriel belge, George Forrest, contre son aide pour un contrat minier en Namibie. Ce que réfute M. Balkany.

Les investigations sont remontées bien au-delà de la période 2007-2014 qu’elles ciblent, sans pouvoir retracer l’origine de tous les fonds.

Les juges estiment que Patrick Balkany a été « à la tête d’un véritable réseau de sociétés offshore » mis en place dès la fin des années 1980, quand son ancien compère Didier Schuller déposait en Suisse des fonds occultes du BTP destinés à financer le RPR.

En 2016, le baron de la droite avait fini par admettre avoir détenu des avoirs non-déclarés en Suisse, un héritage selon lui.

L’enquête a aussi mis au jour les fortes sommes en liquide utilisées par le couple, notamment plus de 87.000 euros payés dans une agence de voyages.

La justice a saisi le riad, le produit de la vente de la villa Pamplemousse et le moulin de Giverny, où résident les Balkany en Normandie.

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