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Comment des multinationales financent les partis européens

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

De grandes multinationales financent des partis politiques européens. C’est courant et c’est légal.

Si l’on sait que les multinationales tentent d’influencer les décisions prises dans l’hémicycle européen via leurs lobbys, on sait moins qu’elles le font également en finançant directement les partis. Il s’agit toutefois d’une pratique légale et règlementée, mais qui pose tout de même question, rapporte Le Monde. Au cours de la dernière législature, quelque 83 entreprises ont versé 1.034.506 euros à cinq grands partis politiques européens.

En 2018, le Parti populaire européen (PPE), dont font partie le CDH et le CD&V, a reçu 61.000 euros pour l’accueil de quatre multinationales (AT&T, Walt Disney, Microsoft et UPS) à son congrès annuel d’Helsinki, en novembre.

La même année, les eurosceptiques du groupe des conservateurs et réformistes européens (CRE) ont reçu plus de 102 000 euros de neuf sociétés (AT&T, Triple A, Estiom, MTI, Wastech, Galerie Gema, Q.E.D. Systems, Without Limits et AWS Holding) et 47 000 euros de divers lobbys et fondations.

De son côté, le parti européen l’ALDE, dont font partie le MR et l’Open-VLD, a reçu un financement de 122.000 euros de la part de huit multinationales et lobbys. Ces entreprises ont toutes payé un droit d’entrée compris entre 7.000 et 18.000 euros pour pouvoir intervenir lors du congrès annuel du parti ou lors de colloque. Des entreprises telles que Bayer (dont Monsanto), Walt Disney, Uber, Stuart ou FoodDrinkEurope ont ainsi participé à des colloques sur « l’avenir du commerce, des investissements et de l’innovation », « la flexibilité et l’avenir du travail » ou « le marché unique après 2019 ».

« C’est une pratique courante et parfaitement légale: nous ouvrons nos débats à ces entreprises, qui participent en retour aux frais d’organisation de ces événements », explique Didrik de Schaetzen, le directeur de la communication de l’ALDE, interrogé par Le Monde. Pour les entreprises, il s’agit d’une occasion supplémentaire d’influer sur les décisions prises par les élus. Didrik de Schaetzen explique également avoir des relations avec des ONG. Mais en 2018, aucune n’a été invitée au congrès du parti.

Ces contributions privées (qui ne peuvent pas dépenser 18.000 euros par an) ne représentent qu’une petite part du budget des partis : 122.000 sur un total de 3.5 millions pour le parti ALDE. Mais elles sont tout de même très importantes pour les partis, car le règlement européen leur impose d’avoir 15 % de financement propre, le reste étant du financement public.

Selon Didrik de Schaetzen, les dons de Bayer, Google et consorts ne remettent, pour autant, pas leur indépendance en question. « Participer au congrès d’un parti est différent par rapport au fait de faire du lobbying auprès d’un député individuel », assure-t-il.

A contrario, le parti l’Europe des nations et des libertés, dont font partie Marine Le Pen et le Vlaams Belang, n’a reçu aucun financement privé. Il vit uniquement de son financement public (543.000 euros) et des dons de ses militants (124.000 euros), selon le Monde.

Parmi les plus gros donateurs, on retrouve en première position le géant de télécommunications américain AT&T avec plus de 200.000 euros de dons faits aux quatre plus grands partis européens au cours de la dernière législature. Vient ensuite Bayer (chimie et pharmaceutique) avec un montant de 78.000 euros et Syngenta (chimie et agroalimentaire) 68.000 euros.

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