Gérald Papy

C’est la hess par Gérald Papy : combien d’inculpations faudra-t-il encore pour entamer la popularité de Donald Trump?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Sorti de charge il y deux ans et demi, l’ancien président des Etats-Unis Donald Trump n’a cessé depuis d’occuper le devant de l’actualité, par le soutien qu’il a personnellement apporté à «ses» candidats républicains lors des élections parlementaires de mi-mandat avec, d’ailleurs, un bilan très mitigé, et par le feuilleton médiatique que suscitent les accusations portées contre lui par la justice dans de multiples affaires. Jusqu’à présent, elles n’ont pas affecté la popularité du milliardaire auprès de la base militante républicaine. Celle-ci le juge toujours majoritairement comme le meilleur prétendant à la candidature républicaine à l’élection présidentielle de novembre 2024. Un sondage publié, le 24 mai, par CNN lui accordait encore une confortable avance (53%) face à son plus sérieux rival, le gouverneur de Floride, Ron DeSantis (26%).

L’affaire qui occupe l’actualité depuis des semaines et a valu à Donald Trump, le 13 juin, une convocation devant un tribunal de Miami et la notification de son inculpation est pourtant d’une extrême gravité. Le 20 janvier 2021, au moment de quitter la Maison-Blanche contre son gré, l’ex-président républicain emporte dans sa villa de Mar-a-Lago, en Floride, des boîtes de documents. Parmi eux, certains touchent aux capacités nucléaires des Etats-Unis, à leurs armements de pointe, à l’accord de coopération Five Eyes entre les services de renseignement des Etats-Unis, du Royaume-Uni, du Canada, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande… Bref, des documents qui, vu leur caractère sensible, justifient d’être classifiés. La défense de Donald Trump avancera qu’ils ont été déclassifiés par le président lui-même, comme il y est autorisé. Un argument contesté et démenti par un enregistrement dans lequel, devant des personnes dépourvues d’habilitation à consulter des secret-défense, le «retraité de Mar-a-Lago» assure sous forme de bravade: «En tant que président, j’aurais pu les déclassifier. […] Maintenant, je ne le peux plus, mais il s’agit toujours de secrets.» C’est donc des chefs d’accusation de mise en péril de la sécurité des Etats-Unis par recel de documents gouvernementaux classifiés, «rétention et dissimulation d’informations relevant de la défense nationale», «entrave à la justice» et «faux témoignages», entre autres, que Donald Trump a été inculpé le 13 juin. Certaines de ces préventions sont passibles de peines de dix à vingt ans de prison.

Deux ans et demi après avoir lancé ses partisans à l’assaut du Capitole à Washington dans une attaque sans précédent contre la démocratie américaine, le milliardaire montre à nouveau, à travers ce dossier, le mépris qu’il porte aux institutions de son pays. A combien de nouveaux développements politico-judiciaires faudra-t-il encore assister avant de voir se tarir le réservoir de ses supporters? Comment ceux-ci peuvent-ils en même temps exhorter au «Make America Great Again» et être les complices d’un tel discrédit de leur nation? Quand les stratèges et les militants du Parti républicain comprendront-ils enfin que miser sur un tel candidat, sous la menace de tant de démêlés judiciaires, pourrait les confronter à une nouvelle désillusion? Y compris dans un an et demi face à un Joe Biden trébuchant…

Gérald Papy est rédacteur en chef adjoint au Vif.

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