Brett Kavanaugh © AFP

Brett Kavanaugh, le juge de Trump rattrapé par ses excès de jeunesse

Le Vif

Rattrapé par sa jeunesse turbulente et des accusations d’abus sexuels alors qu’il était sur le point d’accéder à la Cour suprême des Etats-Unis, Brett Kavanaugh est un magistrat aux valeurs conservatrices solidement ancrées.

Début septembre, on ne connaissait qu’un seul Brett Kavanaugh: un juge de 53 ans au pedigree impeccable pour la droite américaine, doublé d’un père de famille attentionné apparemment irréprochable. Mais ces quinze derniers jours est apparu un autre Brett Kavanaugh, selon des témoignages sur des faits vieux de plus d’un quart de siècle: un lycéen et étudiant adepte de beuveries et de comportements déplacés à l’égard de ses camarades féminines de la bonne société de Washington.

Voire de bien pire: le juge se défend jeudi, devant les sénateurs chargés de le confirmer à l’un des neuf sièges de la plus haute instance judiciaire du pays, d’une accusation d’agression sexuelle sur une adolescente de 15 ans, quand lui-même était lycéen au début des années 1980.

Jeunesse déviante pour un futur serviteur du droit ? Ou mensonges ourdis par des démocrates furieux de le voir arriver à la Cour suprême? Le magistrat doit convaincre l’opinion publique américaine, dans un jeu de parole contre parole. Donald Trump dénonce une opération de déstabilisation « totalement politique » visant M. Kavanaugh. Mais le président a tempéré mercredi son soutien à l' »homme remarquable » qu’est selon lui le magistrat.

Brett Kavanaugh va dérouler à nouveau sa carrière brillante, qui l’a vu conseiller l’ancien président républicain George W. Bush. Et insister sur ses valeurs familiales traditionnelles, sa fidélité à son épouse Ashley, avec laquelle il a eu deux filles.

Avant que n’éclate la retentissante controverse, telle est l’image qu’avait réussi à projeter le juge lors d’une première audition au Sénat, qui aurait dû être sa dernière étape avant d’entrer dans le temple du droit américain. Il avait été nommé à la Cour suprême le 9 juillet par M. Trump.

« La Cour suprême ne doit jamais être perçue comme une institution partisane », avait professé devant les élus le juge Kavanaugh, martelant une allégeance absolue à la Constitution. Il était alors apparu imperturbable, malgré les chahuts dans le public, émanant notamment de femmes s’inquiétant des dangers que ferait planer le magistrat sur le droit à l’avortement.

M. Kavanaugh est né à Washington et il siège depuis une décennie à la cour d’appel, une instance réputée pour l’importance des dossiers qui y passent et donc considérée comme un tremplin.

Il a commencé sa carrière dans la magistrature comme assistant du juge Anthony Kennedy qui, fin juin, a créé la surprise en annonçant qu’il prenait sa retraite de la Cour suprême.

Brett Kavanaugh est diplômé de Yale. C’est dans cette prestigieuse université qu’il aurait exhibé son sexe devant une étudiante, lors d’une soirée arrosée. Une deuxième accusation qui fragilise davantage le juriste. Plus tard, il s’est fait connaître dans les années 1990 lors de deux scandales de l’ère Bill Clinton.

Brett Kavanaugh
Brett Kavanaugh © REUTERS

– Catholique pratiquant –

Il a mené l’enquête sur le suicide de Vince Foster, ami de Clinton et collaborateur de la Maison Blanche, dans l’affaire Whitewater, concernant des investissements dans l’immobilier du couple présidentiel.

M. Kavanaugh a par ailleurs participé à la rédaction du rapport du procureur Kenneth Starr, portant notamment sur la relation extra-conjugale que Bill Clinton avait eue avec une stagiaire, Monica Lewinsky.

Le juriste conservateur a aussi proposé son aide à George W. Bush lors de l’imbroglio du comptage des voix en Floride lors de la présidentielle de 2000, qui opposait le candidat républicain au démocrate Al Gore. Puis, tout naturellement, George W. Bush l’a recruté parmi ses collaborateurs directs en prenant ses fonctions en 2001 dans le Bureau ovale.

Plus tard, à la cour d’appel de Washington, M. Kavanaugh a fait preuve d’une constance conservatrice dans ses décisions. Il a notamment rassuré les républicains en se déclarant –il est vrai sur un motif technique– opposé à la loi Obamacare sur la couverture maladie universelle.

En 2012, le juge a fait partie d’un panel ayant annulé une mesure de l’EPA, l’agence fédérale de protection de l’environnement, visant à réduire la pollution de l’air entre les Etats.

Récemment, il a exprimé son désaccord avec une décision permettant à une adolescente entrée clandestinement aux Etats-Unis de se faire avorter.

Vigoureux défenseur des armes à feu, ce catholique pratiquant est actif dans diverses associations religieuses. A ses heures perdues, il entraîne aussi une équipe de jeunes joueurs de basketball et supporte l’équipe de baseball des Washington Nationals.

L’accusatrice de Kavanaugh dit être « terrifiée » mais avoir le « devoir » de témoigner

Christine Blasey Ford, qui accuse le candidat à la Cour suprême américaine Brett Kavanaugh d’agression sexuelle, a dit jeudi, des sanglots dans la voix, être « terrifiée » d’apparaître devant la commission judiciaire du Sénat, estimant toutefois que son témoignage était un « devoir civique ».

« Je ne suis pas ici aujourd’hui parce que je le veux. Je suis terrifiée. Je suis ici parce que j’estime qu’il est de mon devoir civique de vous dire ce qui m’est arrivé lorsque Brett Kavanaugh et moi étions au lycée », a-t-elle dit, alors qu’elle accuse le juge Kavanaugh d’avoir tenté de la violer lors d’une soirée entre lycéens en 1982.

M. Kavanaugh nie catégoriquement ces allégations.

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