Dimanche, la plage emblématique de Bondi Beach à Sydney a été le théâtre d’une fusillade visant la communauté juive réunie pour le premier jour de Hanouka. Les autorités ont requalifié les faits en acte terroriste.
Le bilan est passé de 11 à 15 morts tôt lundi matin. Et 42 personnes restent hospitalisées. Les deux assaillants étaient un père et son fils, a indiqué la police de l’État de Nouvelle-Galles-du-Sud. Le père a été tué et le fils, blessé, est hospitalisé dans un état critique.
«Le mal s’est déchaîné sur la plage de Bondi au-delà de tout entendement», a affirmé, dimanche, le Premier ministre Australien Anthony Albanese, qui a salué les «héros» qui sont intervenus lors de l’attaque pour tenter de maîtriser les meurtriers. «Il s’agit d’une attaque ciblée contre les juifs australiens le premier jour de Hanouka, qui devrait être un jour de joie, une célébration de la foi. Un acte malveillant, antisémite et terroriste qui a frappé le cœur de notre nation», a poursuivi M. Albanese. «Une attaque contre les juifs australiens est une attaque contre tous les Australiens», a-t-il ajouté.
Il s’agit d’un «acte terroriste», a, de son côté, affirmé le chef de la police locale, Mal Lanyon. «Nous avons découvert un engin explosif artisanal dans une voiture liée au criminel décédé.»
Le déroulé de l’attaque
L’attaque a eu lieu dimanche soir sur la plage de Bondi, la plus célèbre d’Australie, habituellement très fréquentée pendant le week-end par des foules de promeneurs, de nageurs et de surfeurs. Les faits se sont produits sur un espace vert près de la plage, accessible par une passerelle piétonne. Une célébration de Hanouka y était organisée lorsque plusieurs coups de feu ont retenti vers 18h45, heure locale.
Les images diffusées montrent des scènes de panique: des personnes en fuite, des blessés à terre recevant les premiers soins. La police a lancé un appel à témoin pour collecter tout enregistrement de l’incident. Des vidéos vérifiées par ABC News montrent plusieurs victimes étendues sur la pelouse au nord de la plage emblématique, avant d’être évacuées vers des ambulances.

À la tombée de la nuit, le quartier habituellement festif et bruyant a été évacué, la police armée bouclant les rues animées, les lumières clignotantes des boîtes de nuit laissant place aux sirènes stroboscopiques des véhicules d’urgence.
Un civil désarme l’un des tireurs
Un témoin, un touriste britannique, a raconté à l’AFP avoir vu «deux tireurs vêtus de noir» sur Bondi Beach. «Il y a eu une fusillade, deux tireurs vêtus de noir et armés de fusils semi-automatiques», a déclaré un autre touriste, Timothy Brant-Coles.

Une séquence saisissante circule également sur les réseaux sociaux: on y voit un passant s’approcher discrètement de l’un des deux assaillants avant de le plaquer au sol par-derrière. Le tireur lâche son fusil à pompe, que le civil parvient à saisir. L’agresseur se replie alors derrière le muret de la passerelle, où son complice ouvre le feu. L’homme maîtrisé semble tenter de saisir une arme de secours.
Bilan dramatique
Le bilan est lourd: 15 morts et 42 personnes hospitalisées.

L’une des victimes est le rabbin Eli Schlanger, 41 ans, né à Londres et père de cinq enfants. «Comment un rabbin joyeux qui était allé à la plage pour répandre la joie et la lumière, pour rendre le monde meilleur, peut voir sa vie s’achever de cette façon?», a déploré le rabbin Zalman Lewis auprès du média britannique Jewish News.
Des liens entre l’un des tireurs et l’EI
Des liens présumés entre l’un des auteurs de l’attaque à Bondi Beach et une cellule de l’organisation Etat islamique (EI) avaient fait l’objet d’une enquête des services de renseignement australiens (ASIO) il y a six ans, selon la chaîne publique australienne ABC News. Selon le média, les services antiterroristes australiens présument que les tireurs avaient prêté allégeance à l’EI. La chaîne ajoute que deux drapeaux de l’organisation ont été retrouvés dans leur voiture dimanche.
Le fils, âgé de 24 ans, aurait été identifié comme un partisan de l’Etat islamique à la suite d’un attentat déjoué par la police en 2019. Le tireur aurait en effet eu des liens étroits avec l’un des instigateurs de l’attaque manquée, qui avait alors été arrêté.
Dimanche, le directeur de l’ASIO, Mike Burgess, a confirmé que l’un des auteurs de l’attaque à Bondi Beach était connu des services de renseignement, mais pas dans une «perspective de menace immédiate».
Un drame annoncé?
Isaac Herzog, président israélien, n’a pas tardé à réagir. Il condamne «l’attaque ignoble visant des Juifs» et interpelle directement le Premier ministre australien Anthony Albanese, lui reprochant de ne pas en faire assez face à la montée de l’antisémitisme dans le pays. Robert Gregory, président de l’Association juive australienne, va plus loin en parlant d’une «tragédie évitable». Selon lui, le gouvernement a été alerté à plusieurs reprises mais n’a pris aucune mesure adéquate pour protéger la communauté juive.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, a, lui, accusé le gouvernement australien d’avoir «jeté de l’huile sur le feu de l’antisémitisme». «Il y a trois mois, j’ai écrit au Premier ministre australien», a déclaré M. Netanyahu, en référence à une lettre envoyée à Anthony Albanese en août après l’annonce par Canberra de sa décision de reconnaître un Etat palestinien. «L’antisémitisme est un cancer qui se propage lorsque les dirigeants restent silencieux et n’agissent pas», a fustigé M. Netanyahou, lors d’un discours télévisé prononcé à l’occasion d’un événement dans le sud d’Israël.
Le Conseil national des imams australien a lui condamné cette «attaque traumatisante». «C’est le moment pour tous les Australiens, y compris la communauté musulmane australienne, de se serrer les coudes dans l’unité, la compassion et la solidarité», a ajouté l’organisation.
Une série d’attaques antisémites a semé la peur parmi les communautés juives d’Australie depuis l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 et la guerre qui s’en est suivie à Gaza. Le gouvernement australien a accusé l’Iran d’être à l’origine de deux de ces attaques et a expulsé l’ambassadeur de Téhéran il y a près de quatre mois. Aucune victime n’avait été signalée lors de ces deux attaques.
Bart De Wever appelle à combattre l’antisémitisme «avec une détermination sans faille»
«En ce premier jour de Hanouka, nous pleurons les victimes de l’horrible attentat perpétré à Sydney», affirme Bart De Wever sur les réseaux sociaux. «Nos pensées accompagnent les familles (des victimes) et la communauté juive. L’antisémitisme n’a pas sa place dans nos sociétés et nous devons le combattre avec une détermination sans faille. À jamais», a-t-il ajouté.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a exprimé sur X la «solidarité» de son pays «face à la brutale attaque terroriste (…) qui visait la communauté juive au début de Hanouka».
La France «partage la douleur du peuple australien et continuera de lutter sans faiblesse contre la haine antisémite qui nous meurtrit tous, partout où elle frappe», a écrit le président français Emmanuel Macron.
Le Premier ministre britannique Keir Starmer a qualifié l’attaque de «répugnante», ajoutant que «le Royaume-Uni sera toujours aux côtés de l’Australie et de la communauté juive».
«L’Europe est aux côtés de l’Australie et des communautés juives partout. Nous sommes unis contre la violence, l’antisémitisme et la haine», a écrit la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
«Je suis horrifié et je condamne l’attaque odieuse perpétrée aujourd’hui contre des familles juives réunies à Sydney pour célébrer Hanouka, a écrit le secrétaire général des Nations unies, António Guterres. Mes pensées vont à la communauté juive du monde entier en ce premier jour de Hanouka, une fête qui célèbre le miracle de la paix et de la lumière triomphant des ténèbres.»
Les drapeaux vont être mis en berne en signe de deuil national.