La Fédération des notaires a analysé le marché immobilier, sur base des transactions effectuées à Bruxelles et dans les communes proches. Les Bruxellois restent largement fidèles à leur région, même si le désir d’une maison pousse certains à franchir la frontière de la Région. Le prix, la qualité de vie et le télétravail redessinent le marché immobilier bruxellois.
Bruxelles coûte cher et le marché immobilier reste tendu. Pourtant, l’acheteur bruxellois continue globalement à se montrer fidèle à sa région, selon la dernière analyse de Fednot, la Fédération des notaires. L’an dernier, 61,4% des habitants de Bruxelles qui ont acheté une maison ou un appartement l’ont fait dans l’une des 19 communes bruxelloises, contre 60,3% en 2019. Dans le même ordre d’idée, 85,7% des maisons et 77,5% des appartements mis en vente dans la capitale sont achetés par des Bruxellois.
Une autre réalité se dévoile pourtant derrière ces moyennes, avec une fuite plus importante lors de la recherche d’une maison: seul un tiers des acheteurs bruxellois a acquis une maison dans la capitale, à peine moins choisissent la proche périphérie et plus d’un tiers déménage même au-delà de cette zone.
Une tendance que plusieurs facteurs peuvent expliquer. «Depuis la crise du Covid, l’équilibre vies professionnelle et privée est devenu un enjeu important. Les acheteurs recherchent une meilleure qualité de vie, symbolisée par la maison avec jardin, devenue hors de prix dans la capitale. Dès lors, ils s’éloignent. Ce mouvement existe déjà depuis longtemps, mais il s’est encore accentué, estime Jean Martroye, notaire et porte-parole de notaire.be. Il ne faut pas non plus oublier le télétravail. Les gens passent moins de temps au bureau, ils acceptent un trajet plus long s’ils ne doivent le faire que deux ou trois fois par semaine. Tout cela a sans doute influencé le marché et stimulé les recherches hors de Bruxelles.»
Des différences de taux qui pèsent sur le prix
Côté prix, les écarts de taxation entre régions ont eux aussi pesé sur le marché. La Région wallonne a abaissé ses droits d’enregistrement de 12,5 à 3% au début de l’année, pour l’achat d’une habitation propre et unique, la Flandre a emboîté le pas, ramenant son taux à 2% pour les acheteurs résidents. Au sein de la Région de Bruxelles-Capitale, le taux est resté de 12,5%, même s’il est possible de profiter d’un abattement dans certaines conditions.
«Cet abattement ne vaut que pour les biens sous les 600.000 euros, ce qui complique l’achat d’une maison dans le sud de Bruxelles. Il faudrait faire l’analyse, mais vu le nombre d’achats d’appartements dans la capitale, une partie sert évidemment à faire de l’investissement et non comme lieu de résidence. Comme ces achats ne bénéficient pas des taux réduits appliqués en Flandre et en Wallonie, Bruxelles redevient compétitive si l’on veut, ce qui influence aussi le marché», souligne encore le notaire.
Dernier facteur financier susceptible d’avoir influencé le marché immobilier: la période du bon d’Etat record, émis fin 2023. «On était dans une période d’incertitude importante. Certains investisseurs ont sauté sur cette occasion. Mais un an plus tard, en septembre 2024, ce sont 22 milliards qui ont été à nouveau rendus disponibles. Miser sur la brique a sans doute pesé dans certaines décisions d’investissement», poursuit Jean Martroye.
Un âge qui grimpe encore
Fednot a également compilé les données sur l’âge des acheteurs. La fédération constate qu’entre 2019 et 2024, l’âge moyen des Bruxellois qui choisissent d’acheter une maison a augmenté, peu importe où ils décident de s’installer. L’âge moyen atteint 40 ans pour un achat dans la capitale, 41 ans en moyenne en périphérie wallonne, 39 ans pour ceux visant la périphérie flamande.
Idem côté appartement, avec une particularité: la périphérie wallonne attire davantage les acheteurs bruxellois d’appartements plus âgés, qui ont 45 ans en moyenne. Ce chiffre est notamment tiré à la hausse par les retraités, les plus de 65 ans représentant le groupe d’acheteurs le plus important (18,2%), à égalité avec les 31-35 ans sur ce secteur.
«Les critères de recherche évoluent logiquement au fil de la vie. Les jeunes couples sans enfants privilégient les appartements; avec la famille vient le besoin d’espace –donc la maison. Plus tard, lorsque les enfants quittent le foyer, la maison devient trop grande : beaucoup ne veulent plus d’escaliers ni de jardin à entretenir et reviennent vers l’appartement. Maintenant, quittent-ils tous Bruxelles pour autant? Pas spécialement. Le changement de région est bien plus important pour ceux qui cherchent de l’espace et un jardin, donc une maison», analyse Jean Martroye.
Qui monte à Bruxelles?
Si les départs du centre vers la périphérie sont plus fréquents, le mouvement inverse existe aussi. La proportion la plus forte concerne les résidents des communes à facilités: un acheteur sur quatre a choisi la capitale en 2024. En périphérie wallonne et flamande, seuls 11% des acheteurs se sont tournés vers les 19 communes bruxelloises.
Dans la plupart des cas, les nouveaux venus à Bruxelles optent pour un appartement. Les notaires relèvent que les acheteurs des communes à facilités sont ceux qui paient le plus cher, avec un prix moyen de 305.000 euros, contre 10.000 euros de moins pour les Bruxellois qui restent dans leur région.
Pour les maisons, les résidents de la périphérie wallonne déboursent le plus, avec un prix moyen de 683.000 euros. Les Bruxellois achetant une maison à Bruxelles visent moins haut, avec un prix moyen de 568.000 euros. Tant côté maison qu’appartement, les acheteurs qui déboursent le moins pour acquérir un bien dans les 19 communes bruxelloises sont ceux de la périphérie flamande: ils déboursent en moyenne 491.000 euros pour une maison et 255.000 euros pour un appartement.
Bruxelles-Ville demeure la commune la plus prisée par les habitants de la périphérie, dont les biens immobiliers attirent 14,3% des acheteurs. Suivent la commune d’Ixelles (10,4%), d’Anderlecht (9,7%) et de Schaerbeek (7,2%). En dernière position, on retrouve Saint-Josse, avec 1,5% des transactions enregistrées.