C'est sur le plateau de The Voice que tout a commencé. Depuis, Charlotte Foret est devenue Charles et a viré au rouge manga. © HENRI DOYEN

Charles, remarquée dans The Voice, sort son premier album: « La musique ne m’a jamais laissée tomber »

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

A 21 ans, la jeune femme lancée par le télécrochet de la RTBF sort Until We Meet Again, un premier album aux ambitions pop-rock prometteuses.

Le post Instagram date du 31 décembre dernier. Charles y célébrait la fin de 2021. Non pas cette cuvée rance laminée par une pandémie à rallonge mais bien «une année incroyable», l’une «des meilleures» de sa vie. Six mois plus tard, assise dans un café schaerbeekois, la jeune femme en rigole: «Je sais, c’est un peu bizarre, mais c’est vrai, j’ai eu beaucoup de chance.» Pas question, évidemment, de nier le chaos créé par le virus. Mais, en effet, pour Charles, force est de constater que 2021 fut prolifique.

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Après un premier single – Wasted Time, publié en plein confinement, au mois de mai 2020 –, la chanteuse a pu enchaîner avec un EP qui lui a directement ouvert la porte des festivals – notamment la version Covid-19 de Rock Werchter. Aujourd’hui, elle persiste et signe avec un premier album, Until We Meet Again. Le disque embrasse les codes générationnels d’une pop emo sous influences rock, quelque part entre Måneskin (Systematic) et Muse (Coward). Ongles pimpés et vêtements baggy à la Billie Eilish, la millenial affiche ses tatouages, rappelant mantra – «expect nothing» – et itinéraire perso – 312, «le chiffre porte-bonheur de mon papa, le numéro de son casier quand il a commencé à travailler, à l’âge de 15 ans, aux Forges de Clabecq». Entre-temps, Charles en a également profité pour virer du blond platine au rouge passion (ou manga, c’est selon). Loin du châtain de départ, celui qu’elle arborait encore sur le plateau de The Voice. Puisque c’est bien là que tout a commencé…

© BELGA IMAGE

Sous influences rock

C’était en 2019. Charlotte Foret, de son vrai nom, remportait le télécrochet de la RTBF. Elle a à peine 18 ans et termine sa rhéto. «L’idée était d’enchaîner avec une année sabbatique pour voir si la musique était vraiment une option viable. Mes parents ont tout de suite été d’accord. Ils savaient bien que c’était vraiment ce que je voulais faire, et c’était un peu le moment ou jamais.» Charlotte déménage donc à Bruxelles dans une coloc remplie d’autres musiciens, et commence à chercher. Comment trouver son identité artistique? Quelle est la musique qui la fait vraiment vibrer? Il y a les grandes voix pop, à la Lady Gaga, Christina Aguilera, etc. Mais aussi le rock. «A 11 ans, un copain m’a fait écouter Nirvana. Cela m’a retournée. J’ai démarré avec Smells Like Teen Spirit, évidemment. Mais mon album préféré reste In Utero et la chanson Heart-Shaped Box. Cette colère mélangée à la mélancolie m’ont complètement parlé.» Les éructations de Kurt Cobain alimentent moins une rébellion – «je me suis toujours bien entendue avec mes parents» – que le mal-être et les montagnes russes des sentiments adolescents. . «Et puis, c’est bête, mais le fait que ce soit une musique réalisée avec de « vrais » instruments me touche énormément.»

Until We Meet Again, par Charles, distribué par Universal.
Until We Meet Again, par Charles, distribué par Universal. © National

C’est d’ailleurs encore par le rock qu’ elle se met au… piano, son instrument fétiche. «En première secondaire, je découvre Muse et leur chanson New Born (NDLR: titre qu’elle reprendra lors de son audition à l’aveugle). Je suis directement tombée amoureuse de leur musique et leur manière d’associer le piano et le rock.» A 14 ans, à Noël, elle se fait offrir un clavier (qu’elle explore en autodidacte). A 16, elle chante dans ses premiers groupes. Et à 18, malgré ses propres réticences (lire l’encadré en bas de l’article), se retrouve derrière l’écran télé, qu’elle crève avec son mélange d’humilité et de grands effets vocaux.

Aujourd’hui, Charlotte Foret est donc Charles. Un prénom masculin, en hommage à son grand-père. Un pseudo qui, au passage, ne s’embarrasse pas de la question du genre . «La maison de disques m’a bien demandé: « T’es sûre pour Charles? » Evidemment! On est en 2022, franchement on s’en bat les c…!»

La millenial affiche ses tatouages, dont un 312, «le chiffre porte-bonheur de mon papa, le numéro de son casier quand il a commencé à travailler aux Forges de Clabecq».
La millenial affiche ses tatouages, dont un 312, «le chiffre porte-bonheur de mon papa, le numéro de son casier quand il a commencé à travailler aux Forges de Clabecq». © STEPHANIE GOOSSE

Evidemment, au-delà de la success story, tout n’a pas été si simple. «En réalité, j’ai très mal vécu les premiers mois de confinement. Déjà, je me suis fait larguer juste avant (sourire). Et puis, j’ai dû faire face à des troubles alimentaires. Cela faisait des années que je traversais des phases de boulimie, toujours un peu toute seule. Mais là, en restant enfermée, je compensais tellement avec la bouffe que je me suis vue dépérir. Cela m’a fait peur. Parce qu’au départ, je ne suis pas du tout quelqu’un qui se laisse submerger. J’ai fini par appeler ma mère, qui a tout de suite compris.» Retour à la case familiale, à Braine-le-Château, à la «campagne», où elle respire à nouveau. De cet épisode, Charles a trouvé la matière pour écrire sa toute première chanson, The Fall, présente sur son EP inaugural. Sur l’album, le titre Anymore évoque, lui, ses premières désillusions avec une industrie parfois «compliquée». «J’avais travaillé mon premier EP avec toute une équipe. Au final, pour des questions de business, que je ne maîtrisais pas, dont s’occupait le label, cela s’est mal terminé. Ce qui a été dur, c’est d’avoir partagé autant de choses très intimes avec des gens, et de s’apercevoir que ce lien était juste lié au boulot.» There’s no business like show-business, disait l’autre. Mais pas de quoi dégoûter la jeune femme. «La musique ne m’a jamais laissée tomber. Elle me sauve même plutôt dans les moments difficiles.»

La voix est libre

En dix ans d’existence, The Voice Belgique a charrié son lot de candidats. Avec pour constat paradoxal qu’il vaut souvent mieux… ne pas gagner l’émission si l’on veut s’assurer une carrière (cf. Loïc Nottet, Alice On The Roof). Charles en est probablement consciente, elle qui a toujours expliqué s’ être inscrite un peu par hasard. «Au départ, c’ était le genre d’émission que j’avais tendance à dénigrer. Mais j’étais en rhéto, je commençais à me poser des questions sur ce que j’allais faire après. A part la musique, je n’avais vraiment aucune idée. Je me suis dit « pourquoi pas tenter le coup? ».» Aux auditions à l’aveugle, Charlotte Foret recueille les quatre «buzz» et choisit l’équipe de Matthew Irons, chanteur de Puggy. Le surlendemain de sa victoire, elle retrouve les bancs de l’école. «Je me vois encore, au cours de sciences économiques, à me demander ce que je foutais là. J’ai compris que la musique était vraiment ce que je voulais faire de ma vie. Avant cela, mes amis, ma famille, me disaient déjà que je chantais bien. Mais j’imaginais qu’ils n’étaient pas forcément objectifs. Je n’ai jamais eu beaucoup confiance en moi. Aujourd’hui, cela va mieux, je me soigne (sourire). A cet égard, The Voice m’ a beaucoup aidée.»

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