Peter Vandermeersch

Siegfried Bracke, le cadeau du ciel à la N-VA

Ce fut comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Siegfried Bracke, le journaliste le plus connu et le plus en vue de la VRT, déclarait subitement, après trois décennies passées à la chaîne publique flamande, qu’il quittait celle-ci pour s’engager en politique. On lui connaissait des sympathies de gauche et il avait déjà révélé son appartenance à une loge maçonnique. A la stupéfaction générale, ce journaliste de 57 ans sera tête de la liste N-VA en Flandre orientale.

Par PETER VANDERMEERSCH, Rédacteur en chef général du Standaard

Le choc dans le monde politique et journalistique flamand ne pouvait être plus grand. C’est comme si François de Brigode avait annoncé qu’il serait tête de liste pour le FDF à Bruxelles. Bien sûr, Bracke n’est pas le seul BV (Bekende Vlaming) qui, le 13 juin, briguera les voix des électeurs. Eva Brems, une professeure très populaire de l’université de Gand et qui s’est fait remarquer par ses passages à la télévision, entre autres dans De slimste mens ter wereld, conduit la liste de Groen ! à Louvain. Et Rik Torfs, professeur de droit canon à la KUL, omniprésent dans les journaux et au petit écran, occupera la deuxième place sur la liste CD&V pour le Sénat, derrière Marianne Thyssen, la présidente du parti.

Il n’en reste pas moins vrai que la candidature de Bracke est singulière. D’abord, parce que la déontologie journalistique a été mise à mal. Le vendredi 30 avril, Bracke avait encore interviewé, en long et en large, les socialistes Caroline Gennez et Johan Vande Lanotte dans son programme hebdomadaire Bracke op vrijdag. Le journaliste y faisait face à deux politiques. Le lundi suivant, il annonçait qu’il avait donné sa parole à Bart De Wever. Entre-temps, le journaliste était devenu l’adversaire politique des deux ténors du SP.A. Avouons que cela n’est pas très convenable.

Mais les raisons invoquées par Bracke pour expliquer son revirement sont encore plus significatives. Il est passé de sa propre initiative, dit-il, à la N-VA, alors qu’il avait déjàété sollicité par tous les partis flamands, à l’exception du Vlaams Belang. « Je n’en pouvais plus de contempler le spectacle offert par la politique, lançait-il. Chaque jour qui passe, je suis impuissant à regarder l’incompétence et la léthargie du microcosme politique. C’est épouvantable ! Le pays s’immobilise. Seule une réforme institutionnelle très poussée peut encore sauver le royaume. Et il n’y a que la N-VA qui est crédible pour s’y attaquer. »

Pour De Wever, qui deviendra peut-être le président du premier parti de Flandre, l’arrivée de Bracke est un cadeau du ciel. « Si même un socialiste comme Bracke estime que la N-VA est l’unique parti qui puisse faire bouger les choses, la mauvaise volonté des francophones doit être particulièrement grande », estime De Wever.

Dans les semaines qui viennent, la Belgique francophone a tout intérêt à prendre au sérieux ce que disent des gens comme Bracke. Mais il ne faut pas s’attendre à le voir agiter le drapeau au lion, assister au pèlerinage de l’Yser ou chanter le Vlaamse Leeuw. Son objectif, c’est le maintien de la prospérité des Flamands. Bracke rejoint là la grande préoccupation de la plupart des Flamands.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire